Daniel C. Suraqui : Après,

Voici un roman de politique-fiction qui contrairement à bien d'autres ne se fonde pas sur le péril du totalitarisme. D'emblée, la crise climatique vient tout perturber. La dérive nord-atlantique, communément appelée Gulf Stream, tend à s'arrêter menaçant de faire geler l'Europe au lieu d'adoucir son climat. Et c'est ensuite le trou de la couche d'ozone qui menace l'humanité. Il faudrait des mesures radicales pour lutter contre ces périls. Or les gouvernements nationaux reculent devant leur opinion publique et l'ONU est impuissante comme d'habitude. Malgré tout, un sursaut survient à l'instigation d'un juge finlandais imaginatif. Face à l'urgence climatique, et suite à une guerre nucléaire évitée de justesse entre l'Inde et le Pakistan, une sorte de gouvernement mondial plus efficace est institué avec à sa tête un très puissant Directeur dont le nom reste caché aux dirigeants des États comme au grand public, alors que les noms de ses collaborateurs sont connus, tel ce Samuel Weinstein que certains qualifient de « Candide du monde moderne ».

Sous les deux premiers Directeurs, la NUN (New United Nations) se lance dans un programme ambitieux. Elle entreprend de lutter contre la corruption, contre la dégradation de l'environnement, contre le déséquilibre du commerce mondial et de réaliser le désarmement nucléaire. Effectivement un système de contrôle mondial des activités bancaires est mis en place qui permet d'abattre rapidement l'économie criminelle. Mais plus difficile est d'agir sur le climat car il faut réussir à réduire drastiquement les émissions de carbone et les moyens d'y parvenir ne seront pas populaires. Samuel Weinstein, fort de son succès contre la criminalité financière, sera le second Directeur, opportunément soutenu par sa jeune compagne fille d'un pétrolier texan lui-même miraculeusement converti aux énergies renouvelables.

L'objectif le plus difficile à atteindre sera le désarmement nucléaire. Toutes les puissances nucléaires sont réticentes, et plus particulièrement l'Iran dont les dirigeants jurent de détruire Israël, et Israël en raison de la crainte que Téhéran n'ait un jour les moyens de rayer l'État juif de la carte. L'affaire semble pourtant réussir mais voilà qu'après avoir détourné des armes qui devaient être détruites quand l'Ukraine s'est débarrassé de l'arme nucléaire, le régime des mollahs fanatiques semble avoir acquis assez de bombes pour détruire le monde des mécréants et du coup l'humanité entière. Le récit atteint alors son moment le plus haletant.

Ce thriller de politique-fiction a été écrit en 2002 et l'on doit tout d'abord se souvenir que le contexte international — qui l'avait nécessairement influencé — était déjà dramatique : après la tragédie du 11 Septembre à Manhattan, les troupes américaines avaient entrepris en Afghanistan la traque des chefs d'Al-Qaida, tandis que le Hamas et le Djihad islamique lançaient contre Israël une seconde intifada marquée par des attentats-suicide. Vingt ans plus tard, ce roman reste complètement d'actualité car le contexte est toujours alarmant au Moyen-Orient (*) avec l'agression barbare du 7 Octobre contre Israël et l'hécatombe qui en résulte à Gaza. De plus, le même régime fanatique est toujours installé à Téhéran puisque les Iraniennes révoltées et dévoilées n'ont pas réussi à le démanteler, et l'on sait qu'il s'approche de la possession d'armes nucléaires. Quant aux objectifs économiques et écologiques de la NUN, ils ne sont en rien périmés.

• Daniel C. Suraqui : Après, - Diffusé par Amazon, 2022, 423 pages.

(*). On pourra lire sur le blog de l'auteur le discours où il imagine que Benjamin Nétanyahou annoncerait sa démission.