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Après quatre ans d'enquête au pays de la vieillesse, dans de nombreux Ephad et hôpitaux publics, Laure Adler s'attaque à un tabou : à l'heure du jeunisme, notre société invisibilise ses « vieux », ses séniors en terme moderne. C'est un livre de combat, dans la lignée de Simone de Beauvoir.

L'auteure fustige la stigmatisation que subissent les personnes âgées, ghettoïsées pour la plupart dans les maisons de « retraite », le mot le plus répugnant de la langue selon Hemingway. Elle dénonce également la tendance à faire de la jeunesse LE modèle, réduisant les personnes âgées au statut de « denrées périmées » et la vieillesse à un poids, une disgrâce, comme si les séniors n'avaient plus rien à transmettre.

 

L'âge est un sentiment souvent infligé par autrui, car on ne se voit pas vieillir tant que le corps tient bon. On peut « garder le goût du monde » même si la mémoire flanche et que la vue baisse. Pour Laure Adler, à soixante-dix ans, on peut rester dans le vif de la vie, avec plus de détachement et une certaine sérénité : vieillir sans se sentir vieux.

C'est la peur de notre finitude qui nous rend incapables d'affronter la vieillesse. Pourtant « mourir c'est la condition même de l'existence » comme le rappelait Jankélévitch. Le transhumanisme est comportement de lâches et quel sens aurait la vie si elle était illimitée ?

Depuis le début de la pandémie, l'âge est devenu un déficit qui autorise la ségrégation des plus de soixante-cinq ans et accentue encore la marginalisation des séniors.

Réintégrer les « vieux » dans la société devient une nécessité pour l'auteure ; non pas la minorité de séniors aisés qui se veulent encore jeunes mais les plus précaires dont les enfants s'endettent pour payer la pension mensuelle.

Cet essai très personnel nourri de nombreuses références littéraires mérite l'attention et nous confronte à l'essentiel : nous sommes mortels, quel que soit l'âge.

La pandémie est venue nous le rappeler.

 

Laure Adler : La voyageuse de nuit. Grasset, 2020, 223 pages.

 

Chroniqué par Kate

 

Tag(s) : #ESSAIS
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