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Chiromancienne ou pas, la diseuse de bonne aventure prétend lire l'avenir dans les lignes de la main que lui tend une femme en présence de témoins – ou pas. Elle constitue le thème de nombreuses œuvres du XVIIe siècle à nos jours, mais les œuvres du XVIIe siècle sont particulièrement remarquables à la suite de l'œuvre du Caravage dont il existe deux versions très proches, à Paris au Louvre, et à Rome.

Le Caravage. La Diseuse de bonne aventure. Musée du Louvre.

Le Caravage. La Diseuse de bonne aventure (1595) - Pinacoteca Capitolina, Rome. La scène suggère la séduction qui cache le vol sous couvert de dire l'avenir au beau jeune homme. Le regard et le léger sourire de la fille l'amadouent alors qu'elle lui retire délicatement la bague qu'il porte à l'un de ses doigts. Le vêtement agrafé à l'épaule est une constante, ou peu s'en faut, dans la représentation de la bohémienne qui n'est pas forcément mal attifée...

Beaucoup de ces œuvres présentent un cadrage serré — car il faut voir et comprendre les détails —  et l'utilisation du clair-obscur pour ce qui est du XVIIe siècle.

Valentin de Boulogne (1591-1632). La Diseuse de bonne aventure (1620). Toledo Museum of Art, Ohio. La Guerre de Trente Ans vient de commencer en Europe. La scène se passe dans un cabaret où plusieurs soldats sont venus boire du vin blanc, l'un d'entre eux se fait lire l'avenir par une bohémienne. Le personnage de gauche semble vraiment chercher à délester la gitane !

 

Une même inspiration de Valentin de Boulogne : La diseuse de bonne aventure, dans la version du Louvre de 1628 environ. Le personnage de gauche, dans l'ombre, semble avoir la même mauvaise intention que dans le tableau précédent tandis qu'à droite une jeune fille joue du violon et l'homme situé à gauche de la harpe.

 

Simon Vouet. La diseuse de bonne aventure (1617). Galleria nazionale d'Arte antica, Palazzo Barberini, Rome. L'une est jeune et séduit le bonhomme, l'autre plus âgée montre un tout autre savoir-faire et ça l'amuse bien à en juger par son sourire complice tourné vers le spectateur.

Simon Vouet. La diseuse de bonne aventure (vers 1620). Ottawa, Musée des Beaux Arts du Canada. Le sujet est traité différemment, la courtisane se fait dire la bonne aventure pendant que son complice au chapeau noir à droite plonge la main gauche dans la besace de la gitane.

 

Lionello Spada. La buona ventura (1615). Galleria estense, Modena. Il ne s'agit pas que de lire l'avenir dans les lignes de la main ! Le personnage de gauche détourne l'attention de l'élégant seigneur : la femme regarde plus la bourse que la main, pendant qu'un enfant vide la poche du client. Ce thème se retrouve chez La Tour.

Georges de La Tour. La Diseuse de bonne aventure. (1635). Metropolitan Museum, New York. Cette toile est souvent considérée comme le plus grand chef-d'œuvre de La Tour. Pendant que le jeune homme se fait prédire l'avenir par la vieille gitane qu'il regarde fixement, les trois autres femmes, séduisantes et qui l'entourent, profitent de son inattention pour le voler. Le jeu des regards est remarquable ; la fille au fichu, qui est de face, s'empare d'un médaillon, de la main gauche et coupe la chaîne de la main droite ; l'autre qui porte une fine chemise de mousseline cherche à s'emparer de sa bourse dont elle tient déjà le cordon. Les regards des jeunes filles du second plan indique bien leur connivence. La vieille gitane tient la pièce de monnaie qui doit servir à l'opération de divination. Mais l'essentiel est le vol.

 

Jean Tassel. La diseuse de bonne aventure (1645-50). Musée Fabre, Montpellier. Un jeune couple paie pour savoir s'il sera heureux, sous les yeux d'un amour sous l'apparence d'un gamin en haillons, sans doute un enfant de la bohémienne qui s'occupe de prendre la bourse du jeune homme. Comme précédemment, une pièce d'argent frappée d'une croix sert à la gitane. Les contrastes d'ombres et de lumière font penser au style du Caravage.
 

Bartolomeo Manfredi. La buona ventura ou The Fortune Teller (1616-17). Detroit Institute of Art. - L'image a été légèrement éclaircie afin qu'on devine à droite et à gauche l'action de mains indiscrètes, tant au détriment de la bourse du jeune homme que de la besace de la bohémienne.

 

Puis ce sont plutôt de jolies femmes qui sont curieuses de leur avenir. La diseuse de bonne aventure n'est généralement représentée que de profil comme ci-dessus ou bien restée dans l'ombre, comme dans le tableau suivant.

Jean Ducamps. La buona ventura (1622-1637). Castello Sforzesca, Milano. À bien y regarder, encore une main indiscrète tout à gauche derrière le bras de le jolie femme : une bourse a été récupérée par la complice qui porte un fichu comme la diseuse de bonne aventure, l'index devant la bouche comme pour dire : chut, ça y est !

 

Nicolas Régnier (1588-1667). La diseuse de bonne aventure (1625). Musée du Louvre. - La belle ingénue, sans doute riche aristocrate au teint laiteux, contraste avec les bohémiennes au teint halé. Là encore il faut regarder la main de la complice… et la main de l'homme au chapeau à plumes derrière la diseuse de bonne aventure à qui il vole un coq. Le dupeur est dupé, telle est la moralité que semble nous dire l'homme au chapeau qui nous regarde d'un œil amusé.

 

Jean-François de Troy. Portrait d'une dame qui se fait dire la bonne aventure (1696). Musée des Beaux Arts de Tours. Ici pas question de malhonnêteté.

 

Jean BROC (1771-1850)  La Diseuse de bonne aventure - Musée d'Art de Béziers. - La cliente ne veut pas regarder la bohémienne et ce que dit la bohémienne semble davantage intriguer ses accompagnateurs comme si on voulait la tenir à distance d'un danger.

 

Jean-Victor SCHNETZ (1787-1870) La diseuse de bonne aventure. L'une est peinte de face, ce qui forme une exception, l'autre de dos, mais le contraste de la carnation est une donnée permanente dans ces sujets. Du moins jusqu'ici.

 

Rissanen JUHO (1873-1950) - The Fortune Teller (1899) - Athenaeum Art Museum Helsinki. - Le peintre finlandais a situé son œuvre dans un milieu populaire simplement vêtu au contraire des artistes du XVIIe siècle. Autre originalité, la gitane utilise un bâtonnet pour lire les lignes de la main. Aucune malhonnêteté ici… alors qu'ailleurs on hésite entre leçon de morale et lecture pessimiste des relations humaines.

 

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Tag(s) : #BEAUX ARTS
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