La jeune fille à la perle de Vermeer aurait pu servir d'introduction à ce panorama des bijoux dans la peinture occidentale... mais une simple perle serait loin d'annoncer la diversité, la richesse, que siècle après siècle les œuvres picturales révèlent. Il ne s'agit pas d'illustrer une histoire du bijou (pour cela on consultera par exemple le site du Musée des Arts Décoratifs) mais d'illustrer dans leur diversité la présence des bijoux dans les tableaux tant des grands maîtres que d'artistes plus confidentiels.
A chaque époque sa mode et son goût : de la Renaissance au 17ème siècle on aime les lourdes bagues, les bijoux de tête, les ornements de corsage cousus au vêtement. Le bijou marque l'appartenance à un groupe social ; il rehausse la beauté de la femme.
Les bijoux du Quattrocento florentin
• Les bijoux apparaissent dans les portraits de profil avant que ne s'impose la pose de 3/4 durant la Renaissance. Il s'agit de l'antique tradition numismatique où le visage reste neutre, sans trace d'émotion, comme pour une photo d'identité. Les perles sont signes de pureté et le rubis symbolise l'amour.
Piero della Francesca : « Portrait de Battista Sforza » (1446-1472). Tempera sur bois. Galerie des Offices, Florence. Ce portrait accompagne habituellement celui de son époux Federico da Montefeltro, duc d'Urbino qu'elle regarde, les deux œuvres formant diptyque. L'œuvre est livrée l'année des 26 ans de la duchesse, qui est aussi l'année de sa mort. Les perles abondent : collier et sautoir, et au bijou sur la tête répond le camée qui se détache sur sa robe noire. Battista Sforza est issue d'une riche famille de condottiere, alors maîtres de Milan.
Domenico Ghirlandaio : « Portrait de Giovanna Tornabuoni, 1488, Musée Thyssen-Bornemisza, Madrid. - Giovanna Tornuabuoni, née degli Albizzi, qui figure également dans des œuvres de Botticelli, est décédée suite à une deuxième grossesse en 1488, alors qu'elle n'a que vingt ans. Elle porte une alliance à l'auriculaire gauche. L'œuvre aurait été réalisée post-mortem, comme un portrait souvenir. Elle est vêtue de la même robe précieuse à la mode florentine dite gamurra sur les fresques que Ghirlandajo a réalisées pour la Chapelle Tornabuoni à Santa Maria Novella (Visitation et Naissance de la Vierge), à Florence, où est aussi son tombeau. Elle porte un pendentif avec perles et rubis : une broche similaire est posée dans la niche. Au-dessus de son livre de prières est suspendu un collier de corail rouge. La citation qu'on peut traduire ainsi : Art, si tu étais capable de dépeindre le comportement et l'âme, il n'y aurait pas de plus beau tableau sur terre, renverrait au poète romain Martial.
Piero Pollaiuolo : « Portrait de femme », vers 1475. Galerie des Offices, Florence. Huile et tempera sur panneau de bois de 55 x 34 cm. Piero Pollaiuolo, dont le frère Antonio était orfèvre comme son père, a réalisé une série de portraits de ce type. Des perles enserrent sa coiffure dite vespaio en forme de chignon : au sommet quelques pierres précieuses, au cou, perles et pendentif . Un rubis éclaire une lourde broche, très mode à l'époque, piquée au décolleté.
Piero Pollaiuolo : « Portrait de femme ». Vers 1470. Museo poldi Pezzoli, Milan. Huile et tempera sur panneau de bois. La richesse de la robe et des bijoux de tête, très à la mode à l'époque, — perles et rubis — suggèrent une aristocrate florentine.
Sandro Botticelli : « Portrait de Simonetta Vespucci ». Vers 1480. Gemäldegalerie, Berlin. Précieuse chevelure que les perles magnifient! Ici point de bijou de poitrine, rare à la Renaissance.
Sandro Botticelli : « Portrait de Simonetta Vespucci ». Vers 1485. Städel Museum, Francfort. Depuis le "bijou de tête"-peut-être un rubis?- le ruissellement des pierres vient embrasser une intaille copiant un bijou appartenant à la collection de Laurent le Magnifique. Cette intaille représente "Apollon et Marsyas" et montre le châtiment du satyre phrygien Marsyas, écorché pour avoir défié le dieu Apollon dans une joute musicale. La scène est mieux visible par l'empreinte du sceau de Laurent sur la plaquette de bronze du Musée des Beaux-Arts de Lyon.
Apollon, nu et tenant sa lyre, refuse au petit Olympus qui le supplie agenouillé la grâce de Marsyas ligoté à un arbre. Cette scène a aussi été reprise sur des pendentifs en cornaline.
Les lourds bijoux de la Renaissance
flamande et rhénane
De lourds colliers caractérisent bien des portraits de cette époque : d'abord avec Petrus Christus, Memling, puis avec Cranach l'Ancien au début du siècle suivant.
Petrus Christus : « Portrait d'une jeune fille ». 1470. Gemäldegalerie Berlin. Devenu citoyen de la ville de Bruges en 1444, Petrus Christus, entra dans la Confrérie Notre-Dame de l'Arbre Sec où il côtoya Hans Memling.
Hans Memling : « Portrait de Maria Portinari ». Vers 1475. Metropolitan Museum New York. Huile sur panneau de bois de 44 x 33 cm. Née en 1456, Maria Maddalena Baroncelli a épousé à l'âge de 14 ans le banquier italien Tommaso Portinari, 42 ans, installé à Bruges où il dirigea la filiale des Médicis de 1465 à 1478. Memling a représenté le couple en diptyque (ou triptyque dont la partie centrale, sujet à dévotion, aurait disparu). Dans un autre triptyque, à peine plus tardif, peinte par Hugo van der Goes et conservée aux Offices à Florence, Maria Portinari semble porter le même lourd collier et le même hennin.
Détail.
Cranach l'Ancien : « Les trois Grâces ». 1530. Musée du Louvre. Détail du tableau acquis en 2011 représentant en pied Aglaé, Euphrosine et Thalie — qui portent de lourdes chaînes de cou comme celles peintes par Raphaël vers 1505— alors que Rubens peindra les Trois Grâces en 1639 totalement nues. On remarque l'absence de pierres précieuses : leur seule beauté illumine.
Cranach l'Ancien : « Vénus et Amour ». 1530. Gemäldegalerie. Berlin.
Cranach l'Ancien. Détail de « Vénus et Amour ». Quelques pierres enchâssées sur le tour de cou et le bracelet rehaussent la beauté de Vénus.
Cranach l'Ancien. Détail du tableau « Vénus avec Cupidon voleur de miel » dans la version de 1529 à la National Gallery de Londres. Cranach a peint plusieurs versions de scènes de Vénus avec Cupidon. De fines perles enserrent la chevelure et soulignent le ras du cou rehaussé de saphyr et rubis. On retrouve un collier semblable dans l'œuvre suivante :
Cranach l'Ancien : « La mort d'Holopherne ». 1530. Kunsthistorisches Museum, Vienne. Ici, Judith porte en plus deux impressionnants colliers à grande chaîne .
Cranach l'Ancien : « Portrait d'une femme ». Vers 1525. Musée de l'Hermitage, Saint-Pétersbourg. Il s'agirait de Bona Sforza, fille de Gian Galeazzo Sforza, duc de Milan, et d'Isabelle de Naples dont Raphaël fit le portrait. Elle épousa à Naples en 1518 Sigismond Ier Jagellon roi de Pologne, qui réside à Cracovie d'où le paysage d'arrière-plan. Tour de cou, pectoral, bracelet et nombreuses bagues : sur le buste féminin s'expose une position sociale.
Jan Gossaert (1478-1532) : « Portrait de Marie Madeleine » (?). 1525-30. Museum of Fine Arts, Boston. - L'artiste a paré la sainte de discrets bijoux de perles et de pierres.
Alessandro Araldi (1460-1529) : « Portrait de Barbara Pallavicino » (ou de Béatrice d'Este). 1490-1510. Tempera sur bois 46 x 35 cm. Galerie des Offices. Le choix du profil met en valeur le bijou de tête repris en pendentif : les sautoirs en compensent la lourdeur.
Léonard de Vinci : « La belle Ferronnière ». 1495. Musée du Louvre. - Lucrezia Crivelli est connue pour avoir été la maîtresse de Ludovico Sforza. De discrets bijoux ; seule la pierre au front suffit à accentuer l' incarnat du visage.
La diversité des bijoux de la Renaissance
Léonard de Vinci. « La Dame à l'hermine ». 1490. C'est le portrait de Cecilia Gallerani. Musée National de Cracovie. Peu de bijoux : la beauté de la Dame n'en nécessite pas.
Titien : « Isabelle d'Este marquise de Mantoue ». 1534-36. Kunsthistorisches Museum, Vienne.
Titien. « Eleonora Gonzague ». 1538. Galerie des Offices.- Une broche en sautoir, quelques perles et bagues suffisent à la noblesse du portrait.
Hans Holbein le Jeune : « Portrait d'Anne de Clèves ». 1539. Louvre.- Bijou de tête, tour de cou, bagues et sautoir se fondent dans la monochromie du tableau.
Angelo di Cosimo dit Bronzino. « Lucrezia Panciatichi ». 1540. Galerie des Offices. - De discrets bijoux : le noble port du modèle n'a nul besoin d'ostentation.
Paolo Calieri dit Véronèse. « Portrait d'une Vénitienne dite la Belle Nani ». Vers 1560. Musée du Louvre. Quelques discrets bijoux soulignent la séduction de la Belle.
Véronèse. Portrait de la Belle Nani. Détail.
Alonso Sanchez Coello. « La Dame à l'éventail ». 1570. Musée du Prado. - L'esquisse d'un sourire et quelques discrets bijoux ne rendent guère le portrait moins austère.
Bijoux de peintures bibliques et mythologiques
Jan Massys [ou Matsys ou Metsys] : « Bethsabée observée par le roi David ». Collection privée. Huile sur bois, 110 x 76 cm. L'épouse d'Urias est regardée à son bain par le roi David depuis son balcon.
Jan Massys (1509-1575) : « David et Bethsabée ». 1562. Musée du Louvre. Peinture sur bois 197 x 162 cm.
Détail.
L'Anonyme de l’École de Fontainebleau. « Femme à sa toilette », vers 1580. Déjà parée d'un bijou de tête et d'un "je-ne-baise-plus", ruban d'étoffe à son cou , la femme hésite entre les broches suspendues à son miroir et les bagues de sa boîte à bijoux.
Détail 1.
Détail 2. On distingue une paire de bracelets de perles.
Dirck de Quade van Ravesteyn (c.1570-c.1620) : « Vénus, Adonis et l'Amour ». 1600-1625. Musée du Louvre. Des pierres en sautoir soulignent le buste de Vénus et la rondeur de ses seins.
Dirck de Quade van Ravesteyn : « Vénus endormie ». 1608. Musée des Beaux-Arts de Dijon. Mêmes bijoux dans son Repos de Vénus du Kunsthistorisches Museum de Vienne.
Portraits de princesses et de reines
XVI°-XVII° siècles
Bronzino : « Portrait de Bia de Médicis ». 1542. La fillette porte les bijoux de sa classe sociale : perles, cabochon en sautoir et en ceinture.
Bronzino : « Eleonora de Tolède avec son fils Giovanni ». 1545. Galerie des Offices. - La femme n'a de perle qu'à une oreille, l'autre est suspendue au cabochon, intaille ou camée ?
Anonyme. Marie Manuelle de Portugal. Vers 1545. Musée du Prado, Madrid. - Aux perles s'ajoutent de lourdes pierres précieuses suspendues au tour de cou et cousues sur le pectoral, peut-être des rubis. Il émane de ce portrait une impression de puissance et d'austère autorité.
Alessandro Allori : « Lucrezia de Medici » (1545-1561). Vers 1560. North Carolina Museum of Art, Raleigh. D'un regard quelque peu provocateur la femme semble attirer l'attention du spectateur sur le pendentif
cousu à sa robe: un rubis signe de puissance et une émeraude signe de sagesse
François Clouet : « Portrait d’Élisabeth d'Autriche », 1571. Musée du Louvre. L'épouse de Charles IX. Le port altier de la femme, les nombreuses perles , saphirs et rubis suggèrent la noblesse du modèle.
François Clouet (détail)
François Clouet : autre « Portrait d’Élisabeth d'Autriche ». 1571. Château de Chantilly.
François Clouet (détail)
Anonyme : « Anne Boleyn ». 1590. De discrets bijoux, un sourire malicieux : la beauté d'Anne n'a nul besoin des lourdes parures de l'époque.
Sofonisba Anguissola : « Portrait d'Élisabeth de Valois «. 1561-65. 206 x 23 cm. Musée du Prado - Invitée à la cour d'Espagne, l'artiste italienne a assisté au mariage d’Élisabeth de Valois, alors âgée de 15 ans, avec Philippe II d'Espagne ; elle est devenue dame d'honneur de la jeune reine qui mourut en 1568 à 23 ans. Élisabeth de Valois est la fille de Henri II, la sœur des trois derniers rois Valois. Dans ce portrait l'artiste a représenté des bijoux de tête, de cou et de taille constitués de pierres précieuses : une discrète parure.
Juan Pantoja de la Cruz : Détail du portrait d' « Élisabeth de Valois » (1545-1568). Musée du Prado. Portrait peint en 1605 d'après l'œuvre de Sofonisba Anguissola conservée au Kunsthistorisches Museum à Vienne voire d'après l'œuvre précédente du Prado. - On note le changement de mode : la parure comprend de lourds bijoux de tête, des perles, rubis et saphirs, et une perle en goutte d'eau.
Frans Pourbus le Jeune (1569-1622). « Portrait de Marie de Médicis ». 1610. Musée du Louvre. - La plupart des bijoux sont cousus sur la robe, la femme n'est qu'un support à la mise en scène du pouvoir.
Frans Pourbus le Jeune. « Portrait de Marie de Médicis » 1613. Galerie des Offices, Florence.
Entre 1622 et 1625, Rubens a peint une série de portraits de la reine Anne d'Autriche, l'épouse de Louis XIII.
Pierre Paul Rubens : « Anne d'Autriche ». 1622. Musée du Prado. Mariée à quatorze ans au futur roi Louis XIII la reine est peinte ici au Louvre par Rubens à l'âge de 21 ans. Rubens réalise aussi à cette époque la série consacrée à Marie de Médicis. Dans cette représentation austère, la reine porte seulement quelques perles...
Le « Portrait d'Anne d'Autriche » par Rubens conservé au Louvre est la copie d'un original perdu qui serait de 1625. 105 x 93 cm. C'est sans doute ce portrait qui a inspiré Alfred de Vigny quand, dans Cinq-Mars, il décrit la coiffure de la reine « entremêlée de perles tressées avec ses cheveux blonds » ... « De grosses perles pendaient à ses oreilles, et un bouquet d'autres perles plus grandes se balançait sur sa poitrine et se rattachait à sa ceinture.»
Rubens : « Anne d'Autriche ». Portrait de 1622-25. Norton Simon Museum, Pasadena, Californie. 120 x 97 cm.
Les biloux des portraits de Van Dyck
Portraitiste mondain réputé, notamment durant ses séjours en Angleterre, Antoine van Dyck avait été l'élève de Rubens.
Antoine van Dyck. « Portrait de Marie Louise de Tassis » (1611-1638), fille du chanoine Antoine de Tassis. Fürstliche Sammlung Lichtenstein, Vaduz. Deux croix parent le buste de la jeune femme: sa parure reste discrète ...
Antoine van Dyck : « La reine Henriette Marie de France ». 1632. Musée d'Art de San Diego, Californie. Fille cadette du roi Henri IV, elle a épousé le roi Charles Ier Stuart.
Antoine van Dyck : « La reine Henriette Marie enceinte ». Portrait peint pour le cardinal Barberini. 1636. Metropolitan Museum, New York.
Antoine van Dyck. « Deux dames de l'entourage de la reine Henriette Marie ». Vers 1630. Musée de l'Ermitage, Saint-Pétersbourg. Les bijoux restent discrets ; perles et ornements de corsage
Antoine van Dyck. « Portrait de Lady Elizabeth Thimbleby et de sa sœur Dorothy ». (détail) c.1635. National Gallery, Londres. On note les paires de doubles perles pendantes.
Antoine van Dyck : « Portrait de Mary Hill Lady Killigrew ». 1638. Tate Gallery, Londres.
Antoine van Dyck : « Portrait de Lady Dorothy Dacre ». 1639. Fondation Bemberg, Toulouse. En 1625 à vingt ans Dorothy North épousa Lord Dacre qui était veuf.
Antoine van Dyck : « Portrait de Lady Mary Ruthven ». 1640. Musée du Prado. - Dame de compagnie de la reine Henriette-Marie, elle a épousé van Dyck le 27 février 1640, pour cette circonstance elle a revêtu une robe de satin bleu et nous montre ostensiblement l'extrémité du rosaire qu'elle porte en bracelet à son bras gauche, en signe de dévotion.
De Rembrandt aux Lumières
Entre le milieu du XVIIe siècle et la fin du XVIIIe siècle, les peintures représentant des bijoux se font plus rares. D'autres moyens ont représenté la richesse au Grand Siècle. Et passé 1725, l'intimité qui se développe dans l'art répugne à l'étalage des bijoux.
Rembrandt van Rijn : « Junon ».1662-56. Collection Armand Hammer, UCLA, Los Angeles. - Un lourd pectoral souligne le buste de Junon.
Rembrandt van Rijn : « La Fiancée juive ». c.1665. Rijkmuseum.
Vermeer : La Foi. Détail du tableau « Allégorie de la foi ». 1670. Metropolitan Museum, New York. Un collier de perles dont la blancheur symbolise la pureté et quelques pierres précieuses au décolleté : cette pieuse figure n'est pas dans le monde réel, c'est une allégorie.
Miguel Jacinto Melendez : « Allégorie de l'Asie ». c.1720. Musée des Beaux Arts d'Oviedo.
Rosalba Carriera (1673-1757). « Portrait d'une dame vénitienne : Caterina Sagredo Barbarigo ». 1735-40. Gemäldegalerie Dresde.
Rosalba Carriera : « Africa ». Peinture en pastel. 1720 env. - Gemäldegalerie Ate Meister Dresde. Elle a réalisé des séries, comme Les Quatre Continents. Outre les perles en goutte et les bijoux du turban, l'Africaine porte un collier de corail assorti d'un scorpion ; dans sa main des serpents : une femme de pouvoir, voire dangereuse ?
Nicolas de Largillière : « Portrait d'une femme. » 1739. Ce pourrait être sa fille Marguerite (1701-56) dont le Palais des Beaux-arts de Lille possède un portrait fort ressemblant mais un peu plus jeune.
William Hogarth : « Miss Mary Edwards ». 1742. Frick collection, New York.
Détail.
Charles-Antoine Coypel : « François et Marie Elisabeth de Jullienne ». c.1743.
Lorenzo Baldissera Tiepolo : « Portrait de sa mère, Cecilia Guardi ». 1757. Ca'Rezzonico, salle des pastels, Venise. Noter la croix badine catalane.
L.B. Tiepolo : « L'infante Maria Josefa de Borbon » (1744-1801). Pastel de 1763. Prado.
Anton Parhaël Mengs : « L'Infante Marie-Louise d'Espagne » (1745-1792). Épouse de Léopold II, portrait peint vers 1765. Kunsthistorisches Museum, Vienne. Peu de perles, une cannetille d'or, un camée que la femme caresse d'un air rêveur...
Thomas Frye : « Augusta-Charlotte de Hanovre, duchesse de Brunswick-Wolfenbutte » (1737-1813). Vers 1760. Petite-fille de George II, elle se marie en 1764. En bijou de tête un noeud "à la Sévigné"; des camées incrustés dans les bracelets.
Angelica Kaufmann : « Portrait d'Augusta-Charlotte ». Détail. 1767. Royal Collection, Londres. Pas d'autre bijou qu'une couronne ducale ? ou un bijou de tête avec perle ?
Fragonard : « Portrait d’Émilie Coignet de Courson » (1716-1806). Metropolitan Museum, New York.
Thomas Gainsborough : « The Honourable Mrs Graham » 1776. Scottish National Gallery , Édimbourg. Un rubis suffit à sublimer la beauté de cette dame au port altier.
Johann Heinrich Wilhelm Tischbein : « La princesse Natalia Vladimirovna Saltykova ». (1780). L'Ermitage, Saint-Pétersbourg. Elle arbore une broche ornée d'un portrait miniature,l'autre d'une croix: aucun autre bijou. La fin du XVIII° siècle aime le naturel et la simplicité.
Johann-Baptist von Lampi aîné (1751-1830). « Portrait de Catherine II » d'après Alexander Roslin, le peintre suédois de l'aristocratie européenne. 1780. Kunsthistorisches Museum, Vienne. Point de perles mais des cannetilles signent puissance et pouvoir.
J.H. von Lambi : « Portrait de la grande-duchesse Andexandra Pavlova », fille du tsar Paul Ier. 1790.
Du Romantisme au Réalisme
Francisco Goya : « La Duchesse d'Albe ». 1795. Palais de Liria, Madrid. Un bijou de bras et un bracelet du même côté, rien à l'autre bras...
Élisabeth Vigée-Lebrun : « Portrait de la princesse Radziwill. » 1802. Outre le sautoir et le pendentif on remarque un bijou de bras.
Josef-Karl Stieler : « A Lady of the Petre Family playing the Guitar ». 1820. Originalité du collier constitué de rubis et d'améthystes : joaillerie (ou bijou de jour) qui se popularise au XIX° siècle dans la bourgeoisie.
Josef-Karl Stieler : « Amalia von Schintling ». 1831. Nymphenburg Palace, Munich. Cette jolie personne, dont on admire le diadème, mourut de la tuberculose cette même année à l'âge de dix-neuf ans.
Elizabeth Vigée-Lebrun : « La duchesse de Berry en robe de velours bleu ». 1824. Collection particulière.
Alexei Tyranov : « Portrait de femme », c.1832. Musée Russe, Saint-Pétersbourg.
Apollon Mokritsky Zhensky (1810-1870) : « Portrait de femme ». 1841. Le saphir symbole de pureté et le rubis gage d'amour rehaussent la beauté de la femme.
Vassili Tropinine (1776-1857) : « Portrait de E.A. Sisalina ». 1845. Galerie Tretiakov, Moscou. On remarque un bijou peu répandu : un rubis serti dans un sautoir de perles.
Gavril Ivanovitch Yakovlev (1819-1862) : « Julia Vassilievna Telyakovskaya ». 1848. Musée de l'Hermitage, Amsterdam (Le musée a rompu ses liens avec l'Ermitage de Saint-Pétersbourg en 2022 suite à l'invasion russe de l'Ukraine et s'est rebaptisé H'Art Museum).
Détail. La mode est aux bijoux de bras décorés de précieuses pierres et, en émail incrusté, le portrait d'un beau militaire...
Ingres : « Madame Moitessier ». 1851. National Gallery of Art de Washington. En 1842, Marie-Clotilde Inès de Foucauld avait épousé Pierre-Sigisbert Moitessier, un riche banquier qui avait deux fois son âge. Les fleurs remplacent les bijoux dans les cheveux : la sensibilité de l'époque célèbre la Nature et le naturel.
Détail.
Franz Winterhalter (1805-1873) : « Portrait de la princesse Tatiana Alexandrovna Youssoupova », née Ribaupierre (1829-1879). 1858, Musée de l'Ermitage. De lourds bijoux attestent là encore de la position sociale .
Frans Verhas (1827-1897) : « Le bijou préféré ». Vers 1890. Ce bracelet au portrait enchâssé rend la femme songeuse tandis que son coffret recèle bien d'autre parures.
Edgar Manet : « Olympia ». (détail). 1863. Un bracelet et un "je-ne -baise-plus", simple ruban autour du cou, suffisent à parer l'Olympia.
Edgar Manet : « Le Balcon » (détail). 1869. A gauche, Berthe Morisot sa future belle-sœur, porte un camée au cou.
Edgar Manet : « Un bar aux Folies Bergère », 1882. The Courtauld Institute of Art, Londres. On note un médaillon tenu par un ruban noir, comme précédemment.
Camille Corot : « Agostina, l'Italienne », 1866, National Gallery of Art, Washington D.C.
Edgar Degas : « La Femme à la potiche ». (1872) Musée d'Orsay. Des bijoux sont simplement posés sur la table.
Edgar Degas : « Madame Jeantaud au miroir ». (1875). Musée d'Orsay. Son mari fut le compagnon d'armes de Degas pendant la Guerre franco-prussienne de 1870. Quelques joailleries éclairent la tenue sombre d'une bourgeoise.
Les bijoux entre Orientalisme et Symbolisme
Ingres : « Odalisque ». 1815. Louvre. Dans l'imaginaire orientaliste, l'odalisque n'est pas une simple servante du sérail turc, au service des dames de la Cour, c'est une vision idéalisée et érotisée. Elle n'en porte pas moins quelques bijoux, perles dans le foulard, bracelet, et un bijou de ceinture est posé à son côté.
Eugène Deveria : « Odalisque ». 1841 environ. Le romantisme attire le peintre vers un Orient rêvé auquel l'abondance des bijoux donne consistance et vraisemblance.
Anonyme. 1840. « Mademoiselle Rachel dans le rôle de Roxanne » pour Bajazet de Racine, donné au Théâtre Français en 1838, ce qui a lancé sa carrière. Élisa-Rachel Félix (1821-1858) dite Rachel a été l'une des grandes tragédiennes de son temps.
Anonyme. 1850. « Mademoiselle Rachel » Peu de perles : les émeraudes, symbole de printemps, magnifient la jeunesse du modèle.
Émile Vernet Lecomte : « Dihya reine berbère des Aurès », 1870. Quelques pierres et surtout une lourde parure de métal ouvragé illustrent la puissance de la reine.
Émile Vernet Lecomte : « Joueuse de tambourin », 1870.
Émile Vernet Lecomte : « Jeune Égyptienne », 1869. Parisien de naissance en 1821, le peintre, descendant de Claude-Koseph Vernet, s'est spécialisé dans l'orientalisme. Parée de sequins la femme tient un petit brûle-parfum.
Achille Mollica (1832-1885) : « En signe d'amour », 1898 (?). Inspiration orientaliste du peintre napolitain : les sequins et le reflet doré...
William Bouguereau : « La jeune fille à la grenade ». 1875.
Détail du bijou. Une boucle d'oreille à breloques. Le métal enchâsse les pierres précieuses.
Franz von Stuck : « Salomé ». 1906. Le peintre né en 1863 est un membre fondateur de la Sécession de Munich. Le cadrage choisi ici exclut la tête coupée de Jean-Baptiste emportée par un domestique.
Gustave Moreau : « Salomé dansant devant Hérode ». 1875. (Détail). Collection Armand Hammer, Los Angeles. Les peintres orientalistes semblent privilégier les bijoux en métal à l'inverse de la joaillerie européenne.
Gustav Klimt : « Judith et Holopherne », 1901. Belvédère, Vienne. Avec ce collier doré qui lui serre la gorge, le modèle de Klimt est assez comparable à une femme-girafe de Birmanie.
Gustav-Adolf Mossa (1883-1971). « Elle ». 1906. Musée des Beaux-Arts Jules Chéret, Nice. Le peintre symboliste niçois Mossa peint un monstre féminin allégorie de la mort couvert de bijoux... un collier dont les pendeloques sont des armes.
Les bijoux peints de 1900 à nos jours
William Mc Gregor Paxton : « The String of Pearls ». 1908, collection particulière. Peintre américain né en 1869 à Baltimore. Cette personne est vraiment fascinée par les perles !
Frederick Carl Frieseke : « La robe impressionniste ». 1915. Détail. Né dans le Michigan en 1874, le peintre a passé une grande partie de sa vie en France, notamment à Giverny. Des bijoux bleus... comme la robe.
Frieseke : « Le collier de corail ». 1917.
Frieseke : « Close Blinds ou Volets fermés ». 1924.
Giulio de Blaas (1888-1936). « Portrait de Marjorie Merriweather et sa fille ». Vers 1930. Marjorie Merriweather Post est alors propriétaire de General Foods, philanthrope et mécène. Connue pour avoir fait construire la somptueuse résidence de Mar-a-Lago en Floride... Elle porte ici une broche de la maison Cartier avec émeraudes et diamants.
Philip Alexius de László (1869-1937). « Mrs Philip Leyland Kindersley » en 1931. Une riche héritière, née Oonagh Guinness en 1910, après son premier mariage à l'âge de dix-neuf ans. Collection privée.
Pierre Bonnard : « Portrait de Mademoiselle Renée Terrasse ». 1916. Elle est une nièce du peintre qui a représenté le collier du même ton que le corsage.
Kees van Dongen : « Portrait de Madame de Plagny », dit aussi « La femme à l'éventail », 1920. Musée de Grenoble. Les pierres précieuses, assorties à l'émeraude des yeux, soulignent la beauté fragile du modèle.
Félix Vallotton : « La Liseuse ». 1922. Collection privée.
Marcel Gromaire (1892-1971) : « Femme d'Asie ». 1927, Musée d'Art moderne de Paris. Le tour de cou et le bracelet sont simplement esquissés.
Jan de Sluijters (1881-1957) : « Odalisque ». 1930.
Jan de Sluijters. (1881-1957) : « Portrait de Marie Claire van der Vuurst de Vries ». (1928), Centraal Museum Utrecht. On remarque le long sautoir et les pendants d'oreille très à la mode à l'époque.
Maxa Nordau (1897-1993) : « La Cartomancienne ». 1969. La fille du sociologue Max Nordau, cofondateur de l'Organisation sioniste mondiale, est une artiste peintre parisienne liée à l’École de Paris.
Alexandre Zinoview (1889-1977) : « Deux Amies ». Vers 1960 ? Le peintre originaire de Russie a émigré en France avant 1914 comme tant d'autres représentants de l’École de Paris. La perle s'est enfin démocratisée !
Igor Samsonov : « Lolita ». 2000, Orda Gallery, Dallas, Texas. Le peintre né à Voronej en 1963 reconstitue des scènes où l'imaginaire se conjugue avec une atmosphère d'un temps passé où les bijoux participent à la préciosité de la peinture.
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La peinture moderne a souvent réduit le bijou à une forme symbolique, une simple tache de couleur, au contraire de l'art des siècles précédents. Le bijou a perdu sa fonction de marqueur social quand la peinture s'est éloignée du réalisme.