❖ C'est un drôle de petit roman, original et grave aussi, apte à susciter la réflexion du lecteur. Pour instruire son procès, un ancien guide de musée, anonyme, incarcéré pour meurtre, rencontre alternativement le juge, son avocat, l'infirmier et le docteur de la prison. Il raconte ses souvenirs et l'on ne devine qu'à la dernière page le crime qu'il a commis.
❖ C'est un drôle de looser, son autoportrait l'atteste. À l'Abbaye de Port-Royal, il s'est mis en tête d'éduquer ses visiteurs : insatiable lecteur de Pascal, il tient à leur faire prendre conscience de leur inanité et de leur finitude. C'est drôle, car le personnage détourne le sens de ce qu'il lit, invente des rapprochements incongrus, prend même à parti l'infirmier qui n'en peut mais : « Faut-il considérer la lecture de Pascal comme un divertissement ? » !! De paradoxe en sarcasme, d'humour en dérision, son ignorance et sa mise en scène de lui-même amusent, d'autant plus que le détenu tient à s'exprimer en langage soutenu, usant même à l'excès, de termes rares.
❖ En réalité, la logorrhée dont il inonde les touristes comme le personnel pénitentiaire libère, plus qu'elle n'occulte, son "néant" (pascalien) intérieur et la haine – haine de lui-même, haine d'autrui – qui le harcèle. « Savez-vous que lorsque la haine vous atteint elle s'empare de votre être ? et l'infeste. Et le mange (...) Elle a la puissance des mouches. (...) La haine aime la merde (...), sa parenté avec les mouches réside encore dans ce trait (...) Elle est ce qui me rend différent des autres.» C'est la haine éprouvée dès l'enfance pour son père, terrassier ivrogne et stalinien, monstre qui battait sa mère, au point qu'elle était déjà morte bien avant de décéder. L'horreur qu'affronte le narrateur, c'est de ressembler en tous points à ce père, jusqu'à ce qu'il le tue et réalise un vieux rêve d'enfance. Son crime est "un geste de pure logique".
❖ Drôle mais fondé sur des notions de philosophie et de psychanalyse, ce petit roman porte à s'interroger. Comment se construire un avenir quand on a vécu une enfance de misère, entre un père violent et une mère soumise ? Comment chaque être humain parvient-il à donner du sens à son existence dès lors qu'il se sait fragile, impuissant, né pour mourir ? À moins de parier, comme Pascal, sur l'existence de Dieu ?
❖ C'est un drôle de looser, son autoportrait l'atteste. À l'Abbaye de Port-Royal, il s'est mis en tête d'éduquer ses visiteurs : insatiable lecteur de Pascal, il tient à leur faire prendre conscience de leur inanité et de leur finitude. C'est drôle, car le personnage détourne le sens de ce qu'il lit, invente des rapprochements incongrus, prend même à parti l'infirmier qui n'en peut mais : « Faut-il considérer la lecture de Pascal comme un divertissement ? » !! De paradoxe en sarcasme, d'humour en dérision, son ignorance et sa mise en scène de lui-même amusent, d'autant plus que le détenu tient à s'exprimer en langage soutenu, usant même à l'excès, de termes rares.
❖ En réalité, la logorrhée dont il inonde les touristes comme le personnel pénitentiaire libère, plus qu'elle n'occulte, son "néant" (pascalien) intérieur et la haine – haine de lui-même, haine d'autrui – qui le harcèle. « Savez-vous que lorsque la haine vous atteint elle s'empare de votre être ? et l'infeste. Et le mange (...) Elle a la puissance des mouches. (...) La haine aime la merde (...), sa parenté avec les mouches réside encore dans ce trait (...) Elle est ce qui me rend différent des autres.» C'est la haine éprouvée dès l'enfance pour son père, terrassier ivrogne et stalinien, monstre qui battait sa mère, au point qu'elle était déjà morte bien avant de décéder. L'horreur qu'affronte le narrateur, c'est de ressembler en tous points à ce père, jusqu'à ce qu'il le tue et réalise un vieux rêve d'enfance. Son crime est "un geste de pure logique".
❖ Drôle mais fondé sur des notions de philosophie et de psychanalyse, ce petit roman porte à s'interroger. Comment se construire un avenir quand on a vécu une enfance de misère, entre un père violent et une mère soumise ? Comment chaque être humain parvient-il à donner du sens à son existence dès lors qu'il se sait fragile, impuissant, né pour mourir ? À moins de parier, comme Pascal, sur l'existence de Dieu ?
Lu et chroniqué par Kate
Lydie SALVAYRE
La puissance des mouches. Le Seuil, 1995, "Points", 175 pages.
La puissance des mouches. Le Seuil, 1995, "Points", 175 pages.