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Essayiste, romancière dont on a apprécié La maison du Bosphore, et surtout sociologue, Pinar Selek vit en exil en France depuis 2009 en raison d'un procès injustifié qui lui est fait en Turquie pour avoir prétendument soutenu des terroristes kurdes.

 

Dans ce bref essai elle développe d'abord sa lente découverte d'un sujet ignoré, passé sous silence ou carrément nié par la société turque : le génocide arménien et ses survivants, les «rebuts de l'épée ». Puis elle montre, en s'appuyant toujours sur son vécu et sans faire un cours académique sur le génocide, comment le pouvoir turc a tout fait pour rejeter les minorités. Hier les Arméniens, aujourd'hui les Kurdes et les Alévis sont par principe suspects de comploter contre la turcité. Adversaire militante de la dictature nationaliste, Pinar Selek a été arrêtée en 1998 et torturée. Elle s'est agrégée à des réseaux de résistants défenseurs de la mémoire de l'identité arménienne, tel Hrant Dink, fondateur de la revue Agos et abattu par des fanatiques turcs le 19 janvier 2007 avec des complicités de l'appareil d'Etat.

 

La haine anti-arménienne semble profondément incrustée dans la culture turque, elle est même encouragée par l'enseignement scolaire et Pinar Selek la débusque jusque dans une partie de l'opposition démocratique. Le bilan que l'on peut dresser est donc navrant, mais la sociologue n'oublie pas la formule de Gramsci : « Il faut allier le pessimisme de l'intelligence à l'optimisme de la volonté ». L'essor du mouvement féministe en Turquie lui semble justement correspondre à cette promesse.

 

Pinar Selek : Parce qu'ils sont arméniens. Traduit du turc par Ali Terzioglu. Liana Levi, nouvelle édition mars 2023, 93 pages. [2015].

 

 

Tag(s) : #TURQUIE, #ESSAIS
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