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Un mot, un souvenir de chanson, un surnom bizarre qu'il aurait retrouvé, et Jean Bosmans irait encore une fois se confronter à son passé. Le mot c'est Chevreuse. Il déclencherait la magie du souvenir : « Et s'il tenait le fil qui permettait de ramener à soi toute une bobine ? »

 

Il n'en faudrait pas davantage au Jean Bosmans d'aujourd'hui, qui déjà dans L'Horizon notait dans son carnet des « fragments de souvenirs », pour se remémorer par petites touches les temps lointains de son enfance de petit garçon à Chevreuse.

 

Il y aurait dans la rue du Docteur-Kurzenne, à Chevreuse, cette maison où Bosmans habita vers l'âge de cinq ans, et que, quinze ans plus tard, il serait surpris de retrouver en accompagnant deux femmes venues la visiter. Là, sans doute, s'était dite une phrase « qui le poursuivrait toute sa vie » : « Guy vient de sortir de prison. » Et dans cette maison le jeune Jean, à qui l'on avait offert une boussole gravée à son nom, avait bien noté dans quel mur on avait pratiqué une cachette.

 

Il y aurait aussi, non loin de Montmartre, de la place de Clichy ou de la brasserie Wepler, cet hôtel tranquille dont Michel de Gama prétendrait être le gérant, et dont Camille aurait travaillé à la comptabilité sur un bureau dont un tiroir contiendrait un carnet de cuir vert, un agenda qui citait son nom ! « Mais, curieusement il manquait la page qui aurait indiqué l'année ».

 

Il se souviendrait ainsi de ses vingt ans en compagnie de « Tête de mort », quand il l'accompagnait du côté de la gare Saint-Lazare et qu'ils fréquentaient des gens qu'elle traitait d' « imbéciles » et de « peu recommandables ». Il y aurait aussi cet appartement du quartier d'Auteuil où un vieil ascenseur poussif le hissait au second étage pour bavarder avec Kim, nounou d'un gamin dont le père recevrait le soir venu ces mêmes visiteurs « peu recommandables ». Avec tous ces souvenirs un peu instables dans la mémoire de Bosmans, le lecteur peut s'imaginer une histoire louche en des temps troubles comme l'auteur les suggère à merveille.

 

Ce Paris de 1950, ce Paris de 1965, Jean Bosmans l'arpente dans le passé comme dans le présent. Dans la chaleur du mois d'août les souvenirs s'échappent mais Bosmans revenu du Midi a réussi à en faire un roman. Les noms de rue servent d'ancrages aux souvenirs pour le marcheur solitaire. On retrouve là le procédé cher à Patrick Modiano, mais le procédé justement paraît un peu usé au lecteur.

 

Patrick Modiano : Chevreuse. Gallimard, 2021, 158 pages.

 

 

 

 

 

 

 

Tag(s) : #LITTERATURE FRANÇAISE
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