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Le Caucase tient une large part dans la littérature russe du XIXe siècle. Au siècle de l'Orientalisme et de l'expansion coloniale cette région montagneuse tient lieu d'orient, quand de nombreux écrivains se retrouvèrent officiers durant la conquête de la région entre 1816 et 1864. Après Griboïedov, ce sont Lermontov, Pouchkine, Tolstoï ou encore Tynianov qui produisirent des textes sur le Caucase.

À l'incipit, un officier en route vers une garnison au Caucase a partagé un séjour de quelque jours avec Maxime Maximytch, capitaine des forts de la Ligne et vétéran de l'occupation de la Tchétchénie, qui l'entretient d'une aventure récente de Piétchorine avec une jeune tcherkesse dénommée Bella, aventure qui finit mal puisque celle-ci a été poignardée par un rival à cause d'une histoire de cheval et pour être tombée amoureuse d'un homme d'une autre religion. « Ces Asiatiques sont d'affreuses canailles » avait averti le capitaine dès sa rencontre avec Lermontov.

 

Le prétendu « héros de notre temps » c'est lui, Gregori Alexandrovitch Piétchorine, l'officier fortuné qui s'ennuie dans la vie. Il l'avoue lui-même à maintes reprises, son ennui l'a poursuivi jusqu'aux pieds du Caucase, dans les stations thermales comme Piatigorsk, où la société aristocratique croise les officiers venus combattre la résistance des Tcherkesses et autres Montagnards hostiles à la conquête russe.

 

Cet ennui semble consubstantiel à la génération qui n'a pas fait la Grande guerre patriotique contre Napoléon, non plus que participé à la révolte décembriste de 1825 contre un tsar réactionnaire. Elle est, en quelque sorte, née trop tard dans un siècle trop vieux, comme suggérait Musset dans ses Confessions d'un enfant du siècle. Mais l'ennui de Piétchorine est un ennui supérieur, qui se lasse autant qu'il se garde des sentiments qu'il pourrait éprouver envers un ami ou envers des jeunes femmes, préférant raisonner plutôt que s'attendrir, et rompre pour ne pas s'attacher. Il évitera donc le mariage avec la jeune Mary venue aux thermes avec sa mère la princesse Ligovskaïa, comme il a pris ses distances à l'égard de Bella, ou avait renoncé à épouser Viera, son amante d'autrefois, retrouvée à la station thermale où elle tient compagnie à un mari qu'elle n'aime pas.

 

À Piatigorsk, Piétchorine a d'abord retrouvé Grouchnitski un jeune enseigne de cavalerie venu soigner une blessure. Les deux hommes dansent et flirtent avec Mary et celle-ci semble rapidement délaisser Grouchnitski qui, devenu jaloux, fait courir le bruit que Piétchorine prétend épouser la jeune princesse qui, d'ailleurs, lui a déclaré sa flemme. L'affaire conduit à un duel organisé de manière confuse mais remporté par Piétchorine. Apprenant la mort violente de Grouchinski, Mary déclarera à Piétchorine qu'elle le hait. Il l'en remerciera : pas de mariage donc. Mais Piétchorine est devenu suspect d'assassinat et ses supérieurs l'envoient dans une autre affectation et plus tard vers la Perse. C'est en s'y rendant qu'il a connu Maxime Maximytch, et lui a laissé son journal, celui-là même que le narrateur du début, autrement dit Lermontov, porte à notre connaissance, journal qui s'achève sur l'assassinat d'un officier fataliste la nuit même où il avait échappé à la roulette russe.

 

On voit que les morts violentes se succèdent dans ce récit qui a connu un succès foudroyant dès 1840. Ironie de l'histoire, à vingt-six ans Lermontov perd la vie l'année suivante dans un duel provoqué par un homme jaloux peut-être de son succès littéraire...et cela s'est passé également tout près de Piatigorsk.

 

Mikhaïl Lermontov. Un héros de notre temps. Environ 150 pages.

Différentes éditions sont disponibles. Outre l'édition bilingue de Garnier-Flammarion, on peut charger les fichiers pdf suivants : Bella, Maxime Maximytch, Taman, Princesse Mary, et le Fataliste.

 

Tag(s) : #LITTERATURE RUSSE
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