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Dans cet autre ouvrage de la collection “Raconter la vie”, Anthony, décrocheur de Seconde générale en 2003, retrace ses dix années de galère, ce qu’il lui a fallu de volonté personnelle pour trouver de petits boulots dans des secteurs divers mais surtout comme cariste dans les entrepôts de la banlieue lyonnaise. Son récit révèle la solitude de ces jeunes sans qualification ni diplôme, l’incertitude d’emplois souvent précaires ; plus encore le manque d’humanité, la pression des chefs, les arnaques de certaines entreprises. Cette nouvelle condition ouvrière ne peut compter, comme jadis le grand-père d’Antony, sur la solidarité syndicale ou l’action collective. À la mission locale comme dans les entreprises on n’apprécie pas ceux qui contestent les conditions de travail. Partout c’est « Couche-toi ou fous le camp ». Or Anthony n’a jamais été « docile » et n’a jamais accepté de « s’habituer ».

Fils d’une comptable et d’un éducateur spécialisé, il n’a jamais connu de conflits avec sa famille qui à l’occasion le soutient financièrement. « C’est vraiment l’école qui m’a cassé » déplore-t-il, « je regrette maintenant car je le paie cher ». Dès le collège Anthony a détesté les professeurs et les contraintes scolaires ; son handicap en Maths et en Français l’a obligé à renoncer à la préparation d’un bac pro. Il a cependant obtenu le Certificat d’Aptitude à la Conduite En Sécurité –C.A.C.E.S.– et son permis de conduire. Mais, rebelle à tout autoritarisme des patrons comme à toute exploitation au rendement, Anthony a abandonné très vite la plupart de ses emplois : « Je suis un humain, pas un esclave ».

Anthony donne à penser l’avenir de ces 150 000 jeunes qui quittent chaque année le système scolaire sans diplôme. Ils subissent aujourd’hui la double peine car s’y ajoute le chômage. Pourtant patrons comme employés de la mission locale l’ont garanti à Anthony : certains secteurs manquent réellement de main-d’oeuvre ; c’est à « chacun de se démerder » à dénicher le poste, surtout à « se coucher » pour le conserver même si les conditions de travail ou de rémunération en sont inacceptables. Sinon, si on a sa fierté, « no future ».

Alors Anthony va tenter le Diplôme d’Accès aux Etudes Supérieures… Il a vécu la vraie vie des sans emplois et cette expérience stigmatisante constitue la meilleure motivation. On lui souhaite bonne chance!

 

Moi, Anthony, ouvrier d'aujourd'hui. Seuil, “Raconter la vie”, 2014, 72 pages.

Chroniqué par Kate

 

Tag(s) : #SCIENCES SOCIALES, #BIOGRAPHIES, #RACONTER LA VIE
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