Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Pour son premier roman, Julie Héraclès s’est inspirée de l’histoire de Simone Touseau, la fameuse « tondue de Chartres », rendue célèbre grâce au cliché de Robert Capa. « J’ai pris des libertés avec la vérité. Ce qui m’intéressait c’était de remplir les blancs de la vie de cette femme ; dire que je la réhabilite m’atteint profondément » déclare l’autrice. En réalité elle a imaginé une Simone Grivise assez différente de la Simone historique : son personnage n’est pas une pronazie .

 

Ce n’est pas un roman à la gloire des collabos : l’autrice cherchait à comprendre comment on peut devenir collabo. Simone Grivise cette « fille au tempérament incandescent » a collaboré par opportunisme, pour se venger de sa situation sociale miséreuse. Toute jeune et pleine de ressentiment, elle aime la langue allemande, s’intéresse à l’Allemagne, pays d’ordre et de puissance, l’inverse de la France à ses yeux. Il lui en coûtera d’être violée par Pierre, le fils de son professeur d’Allemand et d’avorter avec l’aide de sa sœur Madeleine. C’est donc d’abord pour des raisons financières qu’elle travaille pour les Allemands. C’est ensuite par amour : elle fait la rencontre d’Otto, soldat allemand antinazi dont elle s’entiche. Il lui montre ce qu’est vraiment l’Allemagne hitlérienne et les risques qu’elle court : Simone déniaisée prend enfin conscience de la situation. Mais son cœur l’emporte au-delà de toute raison et « l’embochée » accouche d’une petite fille. Tondue sous prétexte d’avoir dénoncé trois voisins, elle n’est pas exécutée faute de preuves. « Je n’ai dénoncé personne. J’ai aimé Otto. J’ai eu Françoise avec lui. C’est tout ».

 

C’est une fiction mais l’auteur ne déforme en rien la vérité historique ; d’ailleurs celle-ci n’est-elle pas ambigüe comme le laisse à entendre la citation de Philippe Claudel en exergue : « Rien n’est ni tout noir ni tout blanc, c’est le gris qui gagne » ? Le titre lui-même invite le lecteur à ne pas juger sans savoir.

 

On apprécie le style fluide et puissant de l’autrice qui parvient à donner de l’épaisseur à son personnage en lui prêtant le langage familier voire vulgaire de son milieu. Quoi qu’en aient les historiens ce roman mérite de trouver son public.

 

• Julie Héraclès : Vous ne connaissez rien de moi.-  JC Lattès, 2023, 380 pages.

Chroniqué par Kate

 

 

 

Tag(s) : #LITTERATURE FRANÇAISE, #SECONDE GUERRE MONDIALE
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :