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Pour que la Rentrée ne soit pas triste, voici un drôle de roman biographique !

Connu depuis ''Elémentaire ma chère Sarah !'' l'écrivain brésilien Jô Soares a imaginé l'histoire picaresque d'un tyrannicide qui rate ses victimes mais fait rire ses lecteurs. Il est d'une incroyable maladresse additionnée d'un manque de chance à toute épreuve qui se vérifie aussi bien lors de tentatives terroristes que dans sa vie de tous les jours. Le héros improbable de Jô Soares va parcourir l'Europe et l'Amérique –et finalement justifier le titre du vrai-faux roman historique– en multipliant les aventures tragi-comiques et les échecs personnels qui les ponctuent.

Est-il prédestiné pour échouer ? Peut-être. « C'était un bébé parfaitement formé, à un détail près : il avait un deuxième index à chaque main ». L'anti-héros, Dimitri Borja Korozec, est né en Bosnie d'un anarchiste serbe et d'une mère brésilienne descendante d'esclave et fille naturelle du général Manuel Vargas qui s'était illustré dans la guerre contre le Paraguay. Dimitri a promis à sa mère de visiter sa terre natale. Mais en attendant...

Le roman se déroule sur la période de 1914 à 1954. À l'âge où d'autres passent leur bac, Dimitri, alias Dimo, se retrouve embrigadé dans une mouvance révolutionnaire. Entraîné par la Main noire, il rate l'héritier des Habsbourg en visite à Sarajevo le 28 juin 1914, mais son rival Gavrilo Prinzip était prêt. Fuyant Belgrade par l'Orient Express, il tombe sous le charme de Mata Hari qu'escorte un nain jaloux et terrible : ce dernier, membre de la société secrète des Thugs, le poursuivra jusqu'en Amérique. Après n'avoir pu assassiner Jaurès par la faute de Raoul Villain, Dimitri est chauffeur de taxi à Paris alors que Galliéni décide d'apporter des renforts par taxi vers la Marne. Mais Dimitri confond Meaux et Melun... Décidé à se rendre au Brésil en 1917, son cargo est torpillé par un U-Boote. Miraculeusement sauvé par des pêcheurs portugais, il contracte la grippe espagnole et survit. Mais dans l'affaire il a raté la révolution russe, lui le grand lecteur de Bakounine et de Kropotkine. En Amérique le voici aux studios de Hollywood dans un rôle de figurant puis porte-flingue d'Al Capone qui lui a été recommandé comme adversaire des banques qui dirigent le monde : de quoi séduire un anarchiste comme lui.

Après avoir raté sa participation au massacre de la Saint-Valentin puis une audacieuse tentative pour éviter la prison à Al Capone, Dimitri quitte Miami en hydravion et débarque à Rio de Janeiro avec un faux passeport français. Le général Getúlio Vargas, qui ne connaît pas son cousin Dimitri, vient d'y prendre le pouvoir, tout en réprimant une insurrection de gauche. Renversé en 1945, Vargas est démocratiquement revenu à la présidence en 1951 avant de trouver la mort en 1954. Or, quelques semaines plus tôt, Dimitri a été recruté dans sa garde personnelle...

En promenant son personnage dans la première moitié du XX° siècle, l'humoriste Jô Soares fait joyeusement réviser l'histoire car Dimitri croise un grand nombre de célébrités. Outre Mata-Hari, voici Marie Curie, Picasso, Apollinaire, et j'en passe, notamment pour la partie brésilienne du récit où l'on retrouve Papillon évadé du bagne de Cayenne. Par l'utilisation de ''documents'' comme dans un manuel d'histoire –photographies, fac-similés, cartes et schémas, tous sépia– une réjouissante allure d'authenticité est donnée au livre (dans sa version originale) bien que les trucages abondent. L'auteur est d'ailleurs très bien documenté (avec bibliographie en fin de volume comme dans un livre universitaire) et apporte même au lecteur français une introduction à l'histoire du Brésil jusqu'en 1954. Ce livre, au titre en clin-d'œil à un célèbre western, est également publié dans la collection Pocket.

• Jô Soares : L'Homme qui tua Getúlio Vargas. Calmann-Lévy, 2000, 329 pages.

 

Tag(s) : #BRESIL
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