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Un an avant de recevoir le Prix Nobel, l'écrivain bordelais a donné aux lecteurs cette histoire familiale affligeante, mais écrite de main de maître, et qui se situe peu après la fin de la Grande guerre.

 

Soit un pauvre hobereau du Sud-Ouest, genre maladif et un tantinet dégénéré, soumis à sa mère qui pourtant lui préfère sa sœur plus soucieuse de mondanités. Il a épousé une roturière proche d'un ancien maire radical. Paule, devenue par ambition baronne Galéas de Cernès a eu, suite à un unique et triste rapport sexuel, un fils prénommé Guillaume – hélas à l'image de son père. « Ça ne devait pas être très fréquent qu'un malade [fasse] un enfant à sa garde-malade...» note Fräulein, la servante réaliste plus que cynique, qui poursuit : «… l'enfant n'était pas prévu au programme. »

 

Haïssant sa belle-mère et détestant son mari, Paule a une mauvaise réputation qui la suit depuis des années. Selon les ragots qui circulent au village, elle aurait compromis un curé. L'évêque le muta au loin et interdit qu'on dise désormais la messe dans la chapelle du château de Cernès — ce dont Paule se contrefiche. Sous-doué, maladroit et souffreteux, le petit Guillaume a déjà été mis à la porte de trois collèges. Paule tente néanmoins d'assurer une formation à son fils. Malgré son insistance, Bordas, l'instituteur admirateur de Jaurès, refuse finalement de coacher le gamin, — le sagouin — après la classe.

 

« Va t'en où tu voudras, mais que je ne te voie plus » : Paule repousse désormais son fils, en plus de détester son mari, sa belle-mère et leur servante; elle se réfugie dans sa chambre et dans l'alcool. La mécanique de la tragédie court alors vers une issue fatale. Un jour, tandis que Galéas, comme souvent, se consacrait à l'entretien du cimetière, Guillaume « contourna la tombe des Cernès, enjamba le parapet, prit un sentier en pente raide qui descendait vers le Ciron…»

 

Par comparaison avec d'autres romans de Mauriac, il est ici bien peu question de vignes et de forêts de pins, pas question de l'ardeur du soleil des Landes, pas question d'amour, mais au contraire de froideur du cœur et d'une avalanche de sentiments négatifs. La noirceur est conjuguée à tous les temps : c'est le plus noir des romans de Mauriac – avec une étonnante économie de moyens.

 

• François Mauriac : Le Sagouin. Plon, 1951. -  139 pages.

 

 

=> Consulter une étude plus détaillée.

 

 

 

 

Tag(s) : #LITTERATURE FRANÇAISE
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