Une femme libre
Dans un Mexique encore perturbé par les années de guerre civile, Nahui se retrouvait du côté des anticléricaux au temps où le général Obregon, amateur de danseuses et président du Mexique, fut assassiné en 1928 par un Cristero exalté qui habitait dans le même immeuble qu'elle ! Scandaleuse selon les normes de la "bonne société" de l'époque, — comme s'afficher les cheveux rasés ! — sa vie privée s'est constituée de liaisons retentissantes, de l'étalage de ses ruptures, et de la publicité de sa nudité. Narcissique et exhibitionniste sans doute, elle n'est représentative qu'à la marge de l'évolution des moeurs du Mexico des années vingt-trente. De son vrai nom Maria del Carmen Mondragón Valseca (1893-1978) elle était la fille préférée d'un général putschiste de la "Décennie tragique" et qui porta Huerta au pouvoir. Suivant son père spécialiste en armements, elle fit deux séjours en Europe, en France puis à San Sebastian, où il s'établit. Carmen Mondragón fut à la fois une artiste et un personnage hors norme. En 1913, pour prendre ses distances du clan familial, elle épousa Manuel Rodriguez Lozano, un diplomate éphémère qui s'avéra homosexuel et devint un peintre réputé. Ils se séparèrent sans divorcer. Elle collectionna ensuite les relations amoureuses et vécut en fuyant les préjugés. Après la mort du capitaine Eugenio Agacino, son dernier grand amour, elle se replia dans la maison familiale du quartier de Tacubaya — et dans un long oubli qu'est venu rompre la magnifique biographie de Pino Cacucci.
Nahui et les beaux arts
Nahui composait et jouait du piano, et s'adonnait à la poésie, publiant trois recueils dans les années vingt. Aujourd'hui, plus que ses photos de nus, c'est surtout sa peinture — massivement entre des mains privées — qui attire l'attention sur Nahui. Le livre de Pino Cacucci n'est pas un livre d'art mais on trouve facilement sur le web des reproductions des œuvres de Nahui Olin. Sa technique picturale essaie de marier l'imagerie populaire et l'art naïf. Elle ne se représentait pas uniquement nue entre les bras de ses amants. Tel ce Matías Santoyo qui avait fait partie de ses admirateurs en 1927 et avec qui elle fit le voyage de Hollywood. Mais elle refusa les rôles que la MGM lui proposa : « Hollywood es une mierda…»
• Pino CACUCCI : N a h u i. Traduit de l'italien par Benito Merlino. Christian Bourgois éditeur, 2008 [Feltrinelli, 2005], 299 pages.
Pour en savoir plus :
• Sur le site de l'éditeur Feltrinelli, Pino Cacucci présente une galerie photographique sur Nahui Olin
• Sur Nahui Olin (textes en espagnol et en anglais)
• Des œuvres de Gerardo Murillo / Dr Atl
• Des photos dues à Edward Weston
• Des œuvres de Diego Rivera