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Dans ce roman, publié chez Albin Michel en 2005, Maxence Fermine élabore une intrigue riche en péripéties et rebondissements, un vrai roman d'aventure très visuel, facile à suivre, à l'écriture alerte et claire. C'est aussi une tragédie classiqueFermine-Tango dont le Héros, Tango, réalise le destin auquel il est voué dès l'adolescence : sa mort est d'emblée annoncée. C'est enfin un plaisant récit, où Maxence Fermine mêle habilement réalisme et merveilleux ; sa bonne connaissance du Tanganyika, devenu la Tanzanie à l'indépendance en 1961, confère authenticité à la coloration africaine... Fondé sur des ressorts convenus, ce roman reprend le thème éculé du Blanc, Tango, libérateur du peuple noir, les Massaï.

Alors que le Tanganyika subit la domination britannique, Tango doit se soumettre au service militaire. Rétif à toute discipline, il provoque le major Welton qui l'exile à Tabora, au service du sultan Sayid al Saada. "L'homme blanc en habit noir" conteste la politique du chef, indifférent à la misère de son peuple affamé.

Chassé de la ville ,Tango entame sept jours d'errance dans le désert, sans eau ni vivres et sort épuisé mais vivant de cette épreuve. De retour à Tabora quatre ans après, il pousse Sayid à signer son abdication et tente d'installer un conseil des sages : Tango n'est qu'un sultan intérimaire, il n'a nul appétit de pouvoir mais un objectif : "offrir à tous la liberté et la justice". Cependant les notables locaux qui tirent profit du passage des caravanes et du commerce de l'ivoire n'admettent guère de siéger aux côtés de simples pasteurs... L'intensité dramatique croît, la guerre civile éclate, Tango décide de se rendre aux Anglais...

L'intérêt du récit est ailleurs. Le père de Tango a consacré sa vie à l'extraction de la tanzanite, pierre bleue semi-précieuse aux reflets rouges et noirs, que l'on ne trouve qu'en Tanzanie. La légende locale veut qu'elle ait été donnée aux Massaï par leur dieu pour se protégér des grands félins... En fait, on n'a découvert la tanzanite qu'en 1967 à Arusha, bien après l'occupation britannique. Peu importe l'anachronisme : cette pierre constitue le moteur symbolique du roman. Elle fera la fortune paternelle, mais surtout elle  marque l'adolescent" au fer rouge de la tragédie" en le désignant comme l'outil du destin. 

Adopté , initié par Makondo le sorcier, nommé " Tango Massaï", il incarne Le Héros tragique qui se croit libre de ses choix, alors qu'il n'est qu' un instrument — ainsi s'éclaire le vers de Rimbaud en exergue : "Je mourrai où me jettera le destin".

On note le réalisme de la toponymie, des paysages et des traditions locales, tandis que le héros relève du surhumain. Seul contre tous, il combat pour la liberté avec un grand sens de l'équité ; son charisme magique fige ses ennemis... Sa mort couronne sa grandeur et le fait entrer dans la légende.

Une belle histoire sur fond d'impression d'Afrique qui pourrait s'implanter dans tous les pays victimes d'abus de pouvoir des chefs locaux... Un beau conte!

 Maxence FERMINE  - Tango Massaï  -  Albin Michel, 2005 et Le Livre de Poche, 2007, 189 pages. 

Tag(s) : #LITTERATURE FRANÇAISE
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