Les "nkisi", ( "minkisi" au singulier), sont des statues magiques spécifiques de la République Démocratique du Congo où on en sculpte encore aujourd'hui. Les Kongo, les Yembé ou les Vili, par exemple, y ont recours pour guérir un malade ou résoudre des conflits.
Anthropomorphes et apparemment agressives avec le bras levé armé d'une lame – comme le "nkisi konde" (fig. 1) – ou de forme animale – tel le chien (fig. 2) –, elles représentent néanmoins des forces bénéfiques malgré leur aspect effrayant. Selon Hélène Joubert, (conservatrice du département Afrique au musée du Quai Branly) et J.P. Colleyn (anthropologue à l'EHESS), ces objets n'étaient pas réservés aux initiés ; installés dans une hutte sur la place du village, chacun pouvait venir les consulter.
Ces fétiches – non pas au sens péjoratif et stigmatisant de l'ethnocentrisme colonial – ne sont pas des objets d'art pour les populations mais des médiateurs. Ils participent de leur questionnement de la conscience humaine sur l'enfantement, la maladie, la mort ou les relations aux ancêtres et incarnent l'entité spirituelle soumise au contrôle humain.
En effet, sculpté par un artiste, l'objet-force ne fonctionne pas de lui-même : religieux, il relie l'homme au cosmos grâce au "nganga", le féticheur spécialiste du rituel. Ce dernier dote la statue de pouvoirs, la sacralise en l'armant de substances magiques, médicinales et organiques – le "bilongo"– souvent encapsulées derrière un miroir (cf. fig. 1 et 2) : il permet au devin de "voir" l'autre monde.
Il ne faut pas confondre ces "nkisi" avec les poupées vaudou : les clous ne correspondent pas au mal que l'on veut infliger à la victime (même si pour résoudre un problème l'objet-force peut parfois provoquer la mort). À chaque demande d'intercession, le "nanga" plante un clou dans la statue après l'avoir léché : la douleur éprouvée met alors en alerte l'esprit du " minkisi" et déclenche son pouvoir.
Ainsi sera rétablie l'harmonie sociale ou clanique initialement perturbée ; ainsi de l'harmonie d'un être humain avec l'environnement : la maladie n'est rien d'autre.