Bente est romancière. Elle vient de traverser une période de dépression qui s'est traduite par une panne d'inspiration. Elle a quitté Bjørnvig et l'appartement, seulement équipée d'une grosse valise à roulettes. Elle a traversé en bus une bonne partie du Danemark pour se retrouver au bord de l'océan dans une bourgade quelconque en plein hiver. C'est là qu'elle fait la connaissance d'un couple sympathique, Johnny et Cocotte, qui la recueillent dans leur modeste maison sans jardin. Et Bente se sent bien parmi ces gens sans prétention qui vivent de petits boulots. « On est coincés ici depuis qu'on a eus le coup du lapin » lui dit Cocotte comme pour s'en excuser. On ne dira rien de cette histoire d'accident que seule la fin du roman éclaircira. Bente fait connaissance avec les rares personnes avec qui Johnny et Cocotte ont des relations, de voisinage, de parenté ou de travail.
Peu à peu se devinent les raisons pour lesquelles Bente a voulu fuir. Bjørnvig son compagnon exerce dans une clinique qui emploie Anja et Gitte, deux célibataires de vingt-neuf ans. « Elles appartiennent à une culture où le passage à la trentaine se fête par l'installation, devant la maison, de bidons d'essence remplis de poivre...» À l'annonce qu'Anja et le psychologue scolaire allaient s'épouser avant ce terme fatal et que Bjørnvig et Gitte préparaient ensemble un livre, c'en a été trop pour Bente qui s'est sentie doublement trahie. « Le psychologue scolaire m'avait suggéré de contacter de vieilles amies pour me distraire. Il m'avait dit cela en se laissant tomber du canapé avant de remettre sa montre. Ses bras et sa poitrine sont extrêmement velus.» Le lecteur ou la lectrice faisant preuve de patience saura par qui Bente le remplacera.
Rien pourtant de très émoustillant dans ce récit refroidi par le vent et la neige, où l'on se chauffe surtout au bois et où on apprécie les couettes et les sacs de couchage Ajungilak qui permettent de résister à -35°C. Le tout est raconté avec réalisme par Helle Helle — c'est vraiment son nom ! — dans une écriture strictement minimaliste. Un livre de chevet garanti sans cauchemar.
Helle HELLE - Chienne de vie
Traduit du danois par Catherine Lise Dubost. Le serpent à plumes, 2011, 230 pages.