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"Imposture", un des premiers titres de Vila-Matas, révèle déjà, malgré sa brièveté, deux thèmes annonciateurs de ce qui suivra dans l'œuvre de cet auteur : le séjour en clinique psychiatrique et le jeu du changement d'identité. En revanche, le lecteur n'y trouvera pas encore l'immersion dans le monde de la fiction et des écrivains.

 

Nous sommes en 1952 en pleine dictature franquiste, peu après le choc de la guerre civile. « C'étaient des jours, c'étaient des années où personne n'acceptait d'être soi, où tout le monde fuyait en silence jusqu'à son propre nom et se démenait coûte que coûte, quitte à en vendre son âme au diable, pour endosser la peau d'un autre, pour changer de lit, changer de maladie en ce gigantesque hôpital qu'était Barcelone.» L'action s'enracine dans l'hôpital psychiatrique dirigé par le vieux docteur Vigil et son jeune secrétaire Barnaola. Les deux hommes sont plus soucieux de se retrouver au café La Luna pour bavarder en sirotant un anis que de s'inquiéter de leurs patients. Pourtant, leur attention va se focaliser sur l'un d'eux, que la police a fait admettre un an auparavant, qui est totalement amnésique et dont ils ignorent l'identité.

 

À la suite de la publication dans la presse d'une photo de l'inconnu, le notaire Bruch est persuadé de reconnaître son propre frère, Ramon, disparu sur le front russe où l'avait expédié la division Azul. Sa "veuve" qui le croyait mort est plus catégorique encore et projette de recommencer leur voyage de noces sur la côte basque. Mais les empreintes digitales de l'inconnu indiquent une tout autre piste, une autre "veuve" — pas éplorée celle-ci — se présente aux autorités. La justice et ses experts en graphologie devront trancher ! L'inconnu est-il le professeur Bruch ou le repris de justice Claudio Nart, ouvrier typographe de son état ?

 

Si cette affaire n'ébranle guère le docteur Vigil qui attend benoitement l'heure de la retraite, elle tourmente davantage son secrétaire célibataire inquiet du vide de ses nuits. Celui-ci, qui se verrait bien en serviteur zélé d'un riche personnage, se met en tête d'enquêter par lui-même sur cet inconnu qui pourrait n'être qu'un imposteur. Le suspense ne durera pas longtemps et la solution trouvée par le romancier ironique sera assez peu réaliste, mais ce bref roman offre un plaisir de lecture tout simple qu'on aurait tort de mépriser.

 

Enrique VILA-MATAS - Imposture - Traduit par Eric Beaumartin - Christian Bourgois éditeur, 1996 [1984], 108 pages.

 

 

 

 

Tag(s) : #LITTERATURE ESPAGNOLE
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