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Cyrulnik-Quand un enfantLe suicide des 5-12 ans reste un sujet tabou encore dans nos sociétés. En faisant paraître chez O.Jacob ce rapport demandé á Boris Cyrulnik, Jeannette Bougrab, secrétaire d'état à la jeunesse, espérait sensibiliser un maximum d'adultes.

À la différence des adolescents, les petits ne préméditent pas leur disparition, ils se donnent la mort sans en avoir l'intention : en raison de leur grande vulnérabilité émotionnelle, ils cèdent à une impulsion irrépressible. On dénombre 50 cas par an en France, et d'innombrables tentatives. Le suicide d'enfants est toujours multi-factoriel : à des déterminants génétiques s'associe le contexte familial et socio-culturel. Reste que, même quand tous ces indicateurs sont au rouge, tous les enfants ne se donnent pas la mort : il n'y a pas de fatalité de destin et la résilience demeure toujours possible.

Les dernières semaines de grossesse d'une mère dépressive constituent un facteur de risque : souvent victime alors de négligence affective et d'isolement sensoriel, le nouveau-né développe des carences ; la précarité économique ou sociale des parents, le douloureux secret de suicidés dans la lignée familiale, les diverses maltraitances infligées au nourrisson y contribuent également ; enfin, le tout petit auquel on ne parle pas ne peut apprendre à gérer ses émotions : pire, il développe un sentiment d'abandon parental et donc une image négative de lui-même : anxiété, mal au ventre ou à la tête signalent son mal-être. À l'école il évite l'échange avec ses camarades, devient violent et instable. Dès lors, une mauvaise note, une vexation suffiront à déclencher le passage à l'acte.

C'est le manque d'attachement, de niche affective, qui induit le suicide des petits. C'est pourquoi il peut survenir si des parents aisés mais débordés consacrent peu de temps à leur enfant. En revanche il peut également se produire dans des familles fusionnelles où le petit trop aimé, souvent de sa mère, ne peut s'exprimer. Même si ses parents satisfont ses besoins matériels, un enfant se sent mal aimé s'il n'est pas écouté : Cyrulnik à raison de souligner les risque des nouvelles technologies : confier le petit à la télévision, à la console de jeux ou au portable l'éloigne plus encore des figures parentales d'attachement.

Si la niche familiale manque de solidité, la personnalité de l'enfant se structure mal : pour se prouver à lui-même qu'il existe, il va "jouer" à feinter la mort car la peur surmontée renforcera son moi ... ou lui ôtera le souffle vital : le jeu du foulard n'en est pas un. En Europe, les petits garçons se suicident plus que les petites filles, à l'inverse de l'Asie ; par pendaison, noyade, les filles par défénestration ou en ingérant les médicaments de la pharmacie familiale.

Certes, comme le suggère l'auteur,la prévention reste possible.Toutefois il semble bien difficile de détecter les signes qui vont pousser un enfant au geste tragique, car ils restent plus invisibles encore que chez les adolescents. Il tombe sous le sens que l'affection et l'attachement à un adulte, même étranger au cercle familial, sauvent chaque jour la vie de bien des petits.

• Boris Cyrulnik - Quand un enfant se donne "la mort". Odile Jacob, 2011, 158 pages. Préface de Jeannette Bougrab. 

Lu et chroniqué par Kate

 

Tag(s) : #SCIENCES SOCIALES, #PSYCHOLOGIE
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