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Une plongée dans la Russie profonde loin des ors du Kremlin et des datchas des "nouveaux Russes". Une Russie de forêts, de lacs et de larges fleuves.
Le bourg de Neja se situe à 500 et quelques km au Nord-Est de Moscou, dans la province de Kostroma. C'est là qu'habitent et travaillent les protagonistes de ce film : le photographe Aist et son patron Miron, directeur d'une usine d'apparence extérieure très "rouille-land". Mais la question n'est pas là : la femme de Miron vient de mourir et Miron veut pour elle des obsèques conformes aux rites des Méria. Qu'est-ce, dites-vous ? J'ai lu une critique de film qui semblait, comme vous, douter des Méria et de leurs coutumes finno-ougriennes. Mais, non ! Prenez Alexis Sergueïevitch Ouvarov (1825-1884) : ce chercheur a été considéré comme le père fondateur de l'archéologie russe et en 1875 il publia une étude sur… les Mériens, autrement dit les Méria. Ce film évoque leurs traditions funéraires et Aleksei Fedorchenko, en adaptant une nouvelle de Denis Osokin, se fait ethnologue et interprète pour nous les rites qui sont à la base du film.
Tandis que Marion et Aist se mettent à préparer le corps de la défunte, le réalisateur nous invite à comparer ce rite funéraire avec celui du mariage méria. Ils parsèment son corps de fils de laine multicolores. Ils se lancent ensuite dans un bref voyage pour rejoindre le lieu magique qui inspire une célébration mortuaire qui n'est pas orthodoxe. Pas besoin de corbillard spécialisé, c'est le 4x4 de Marion qui assure le transport. Chemin faisant, Marion confesse à son ami l'amour que Tanya lui inspirait, sans éviter des détails intimes de leurs ébats amoureux — le bain de Tanya à la vodka est ainsi une scène qu'on n'oubliera pas de sitôt. Arrivés sur les rives du fleuve sacré, les deux hommes procèdent au dernier hommage dû à Tanya : un bûcher funéraire et la dispersion des cendres dans le fleuve. L'eau et le feu sont au rendez-vous. Un très grand moment de cinéma en pleine nature, à la fois simple et grandiose. Au retour, les deux hommes pourront-ils réintégrer indemnes la vie quotidienne ? Ou bien seront-ils attirés par les esprits aquatiques du monde disparu des Méria ?
Quel film mélancolique ! Fedorchenko filme avec simplicité et une lenteur bienvenue, aussi bien les acteurs en gros plan, que des paysages de manière panoramique, évitant tant que c'est possible les scènes violentes. A l'aller comme au retour, deux passereaux en cage accompagnent Miron et Aist de leur chant. Puis arrive le moment où les oiseaux ne chantent plus… Le conte pour adultes est alors tout près de la fin.
Le dernier voyage de Tanya
Film d'Aleksei Fedorchenko, 2010, 75 min.
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• Entretien avec le réalisateur
• Quelques photographies extraites du film
• Bande-annonce du film.