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Le commissaire De Luca — aucun rapport avec le romancier napolitain Erri De Luca — exerce son métier à Bologne à un moment où tout peut arriver, formule qui revient comme un refrain car il s’en passe des choses en Italie entre le 24 juillet et le 2 décembre 1943… une actualité précisée en tête de chaque chapitre par les titres d’un journal local, le Resto del Carlino. Et cette actualité vient fortement perturber et l’enquête et l’enquêteur.

 

Ça n’aurait dû être qu’une banale opération contre le marché noir, à la campagne, sur un domaine qui appartient au prince Morri della Valentina. Mais le commissaire De Luca découvre un corps sans tête et une tête sans corps — qui ne correspondent pas— tandis que ses équipiers arrêtent le trafiquant et son jeune assistant. Or, avant l’arrivée du juge d’instruction, une mystérieuse mallette a été subtilisée par Martina, un notable du parti fasciste.

 

Peu après, le Duce est destitué par le roi, la joie éclate en ville, les communistes manifestent, et la foule s’en prend aux représentants du pouvoir fasciste. Les bombardements alliés continuent sur Bologne. Après l’armistice obtenu d’Eisenhower par le maréchal Badoglio, le conflit ne s’arrête pas car l’armée allemande occupe l’Italie. Ces événements ont permis au trafiquant et à son aide de s’évader, ils sont retrouvés brûlés dans un village de la périphérie. De Luca manque mourir sous les bombes et la jeune suspecte qu’il avait arrêtée lui échappe. De Luca est même menacé physiquement par un homme mystérieux et son chef lui conseille, à plusieurs reprises, d’oublier son enquête, révélant ainsi la corruption qui gangrène une partie de la police. Mais rien n’arrête De Luca, même pas de devoir coopérer avec les services d’une police politique où il retrouve d’anciens collègues virés de la police criminelle.

 

« Quel sens ça a de donner la chasse aux assassins dans un monde d’assassins ? » se demande De Luca. Sa boussole, son mantra, c’est invariablement « Je suis policier. Je sers la loi » avec une complète indifférence au pouvoir. Il doit juste combattre et châtier ce gang qui trafique la cocaïne et qui s’est infiltré jusqu’au cœur d’une administration corrompue — au risque de perdre son amoureuse, Lorenza, employée dans l’officine d’un pharmacien israélite qui a dû la confier à un gérant « aryen », et dont les parents sont des opposants antifascistes.

 

Au-delà de l’intrigue policière, l’auteur montre avec brio la complexité de la situation politico-militaire, ses retombées sur la vie des gens, et l’arrivée de l’occupant allemand comme un coup de poing sur un pays déjà titubant. Son écriture colle toujours à l’action des personnages : force est de le constater dès le chapitre inaugural où le lecteur se trouve immergé avec De Luca dans l’obscurité à cause du black out. Il faut un peu de temps pour se repérer ! Même si Carlo Lucarelli est surtout connu pour des romans policiers, je conseille la lecture d’une œuvre également porteuse d’ambition historique, La huitième vibration.

 

 

Carlo Lucarelli : Péché mortel. - Traduit par Serge Quadruppani. Editions Métailié, 2023, 253 pages. [Einaudi, 2018, Peccato mortale].

 

Tag(s) : #LITTERATURE ITALIENNE
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