Les fresques toscanes que l'on présente ici sont dues à de nombreux artistes du Trecento, du Quattrocento surtout et enfin du Cinquecento. Citons-les : Giotto, Simone Martini, Ambrogio Lorenzetti, Lorenzo Vecchietta, Fra Angelico, Pïero della Francesca, Taddeo Gaddi, Lippo Memmi, Sodoma, Luca Signorelli, Matteo Lambertini, Masaccio, Masolino, Ghirlandaio, Lorenzo Monaco, Bartolo di Fredi, Pinturicchio, Jacopo de Pontormo, Benozzo Gozzoli...
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1. AREZZO
2. PISE : le Campo Santo
3. FLORENCE : San Marco, Santa Croce, Santa Maria Novelle, Santa Maria del Carmine, Santa Trinità, Chartreuse de Galluzzo
5. SIENNE : Duomo, Baptistère
6. SIENNE : Palazzo Publico
C'est à Arezzo que fut tourné le début de la "La vie est belle" de Roberto Benigni. On y voit la "Piazza Grande" :
Arezzo - Piazza Grande
(L'église que l'on voit ici est la Pieve di S. Maria)
Arezzo, sur son acropole à l'Est de la Toscane, quasiment en Ombrie, est traditionnellement connue pour les fresques qu'y peignit Piero della Francesca (1420-1492) sur le thème de la "L'Invention de la Vraie Croix" d'après la"Légende Dorée" de Jacques de Voragine.
La Chapelle Bacci à Arezzo
Les fresques de Piero della Francesca se trouvent dans la chapelle Bacci —du nom d'une famille de marchands d'Arezzo—qui est dans le chœur de l'église San Francesco, dont la façade est restée brute. Le chantier avait été commencé par Bicci di Lorenzo, mais il mourut aussitôt, en 1452. Piero della Francesca prit alors le relais et y travailla sans doute jusqu'en 1458 date à laquelle il partit pour Rome. Un séisme et des dommages survenus au XVIè siècle, des infiltrations d'eau, avaient endommagé certaines fresques, comme la Mort d'Adam. Les fresques ont été restaurées en 2000. En voici la vue générale :
Vue générale de la chapelle Bacci
Disposées autour d'une croix du XIIIè siècle, les fresques n'y sont pas disposées selon l'ordre chronologique de l'histoire de la Croix. Les épisodes sont réunis par paire : exemple C et E (scènes peintes sur les côtés de la fenêtre derrière la grande croix du XIIIè s.), ou encore F et I, les deux scènes de batailles, et les deux lunettes : alpha et omega de cette histoire.
L'ordre logique et chronologique —que l'on suit ici— devrait être le suivant :
A - Mort et sépulture d'Adam
B - La reine de Saba rend visite au roi Salomon
C - La poutre sacrée sauvée du pont du Siloé
D - L'Annonciation
E - Le rêve de Constantin
F - La bataille du pont Milvius
G - La Torture du Juif
H - Hélène et l'Invention de la vraie Croix
I - La victoire d'Héraclius sur Chosroès
J - Héraclius rapporte la Croix à Jérusalem
Les panneaux de la fresque
A - La Mort d'Adam
La fresque de la lunette du côté droit, sur plus de 7 mètres de large, montre à droite Adam mourant avec Ève et leur fils Seth près de lui. Âgé de 930 ans, Adam prie son fils de se rendre à la porte du paradis terrestre afin de demander à l'ange gardien l'huile de la miséricorde qui le ramènerait à la vie.
À l'arrière-plan, Seth parle donc avec l'ange qui refuse l'huile mais remet un rameau de l'arbre du Bien et du Mal avec ordre de le planter aussitôt Adam décédé. L'arbre qui en poussera fournira le bois de la Croix sur laquelle Jésus subira la Passion.
Au centre on voit les descendants en foule autour de la dépouille d'Adam où est planté le rameau de l'arbre en question. Et cet arbre occupe le centre de la fresque.
À l'extrême gauche, un couple enlacé. Hercule, qui prend dans ses bras Alceste, était considérée en cette époque de fusion entre christianisme et culture grecque antique, comme une préfiguration du Christ pour avoir ramené à la vie une femme en la sauvant des enfers.
B- La reine de Saba rend visite au roi Salomon
L'arbre qui a poussé sur le tombeau d'Adam est abattu sur ordre du roi Salomon pour servir de bois d'œuvre. Destiné d'abord à la construction du Temple il est finalement affecté à celle d'un pont. Bientôt Salomon l'en fera retirer.
Alors la Reine de Saba arrive et s'agenouille devant cette poutre de bois, avec la prémonition qu'il servira à fabriquer la croix de la passion de Jésus. Autour d'elle, ses dames d'honneur sont évidemment vêtues à la mode du Quattrocento. Puis, à droite la Reine rend visite à Salomon en son palais.
On retrouve ainsi un bel alignement de personnages, encore plus nettement alignés que dans la frise précédente. Les scènes de Piero della Francesca sont conçues comme des travellings ! Séparant les deux parties de cet épisode, une colonne à chapiteau corinthien, comme dans l'Annonciation (voir ci-dessous figure D) ou comme dans la Flagellation du Christ (1469). S'il faut y voir une allusion à l'actualité du temps dès lors que ces fresques sont datées de 1452 à 1458, ce serait allusion à la tentative d'union des Églises d'Orient et d'Occident (=grecque et latine)…
Détails : le roi Salomon et la reine de Saba
La reine serre la main du roi et ne le regarde pas, impressionnée qu'elle est par ce souverain et par la prémonition qu'elle vient d'avoir. La tête de la reine est représentée symétriquement et exactement avec la même inclinaison à gauche comme à droite de la fresque.
C - La poutre sacrée sauvée du pont du Siloé
Après le passage de la reine de Saba, touché par sa prémonition, le roi ordonne aux ouvriers de retirer le bois sacré du pont sur le Siloé. On voit ici que les nœuds du bois forment comme une auréole sur la tête de l'un d'eux, manière d'indiquer la destination finale de ce morceau de bois.
Cette fresque et celle de "la Torture du Juif" viennent sans doute de cartons dessinées par Piero della Francesca, mais ce n'est lui qui les a peintes. Il s'agirait de son collaborateur Giovanni da Piemonte.
D- L'Annonciation
L'épisode de l'Annonciation ne fait pas partie en principe de la Légende de la Vraie Croix. Mais ça permet au peintre de mieux la faire comprendre puisque c'est l'Incarnation du Christ qui donne son sens à l'ensemble du récit.
Comme dans de nombreuses autres figurations de l'Annonciation, on a séparation entre Marie et l'ange Gabriel constituée par la colonne centrale, symbolique. Dieu, par ses mains, émet des rayons obliques vers Marie. Dans l'autre Annonciationpeinte par Piero della Francesca, celle du polyptyque de saint Antoine à Pérouse, réalisée dans les années 1440, on retrouve ces mêmes rayons dorés obliques et un décor architectural, où des colonnes jouent le même rôle qu'ici, mais Dieu fait place à la colombe de l'Esprit saint.
Détail : Marie
Imposante, plus grande que l'ange Gabriel, Marie est vêtue de la manière habituelle : robe rouge et manteau bleu. Elle tient le Livre de la main gauche.
E - Le rêve de Constantin
Organisé en Tétrarchie depuis la réforme institutionnelle de Dioclétien, l'empire est gouverné par deux Augustes et deux Césars, réforme qui était censée améliorer la gouvernance et la paix. Or, Constantin, avec le titre d'Auguste, est sur le point d'aller livrer bataille contre son collègue et rival du fait de leur différence de politique religieuse.
Dans son sommeil, sous la tente, Constantin voit un ange qui lui apporte la Croix qui lui donnera la victoire.
F - La bataille du pont Milvius
Cette fresque est très endommagée sur la partie droite où figure l'armée de Maxence, mise en déroute par la croix brandie par Constantin. La cavalerie est représentée d'une façon qui met bien en valeur les chevaux; ce qui permet de comparer cette fresque (et celle de l'autre bataille contre Chosroès) à l'œuvre de Paolo Uccello dont la Bataille de San Romanodaterait de 1456.
L'empereur est représenté sous les traits de l'empereur Jean VIII Paléologue mort en 1448. Piero della Francesca avait pu le voir à Florence à l'occasion du concile organisé pour réunifier les Églises d'Orient et d'Occident.
Détail : Constantin tient la croix à la main face à l'ennemi
C'est la victoire de Constantin sur Maxence. On voit ici l'empereur (l'Auguste) brandissant la Croix. Constantin s'étant converti au christianisme et l'ayant légalisé par l'édit de Milan, il dépêche sa mère Hélène en Palestine pour retrouver la Vraie Croix afin de l'installer dans son palais de Constantinople.
G - Le supplice du Juif
Une fois à Jérusalem, Hélène apprend que le Juif Judas connaît l'endroit où la Vraie Croix est enterrée, sur le Golgotha, ainsi que les deux croix du supplice des larrons. Afin d'avouer son secret, Judas est descendu dans un puits. On voit ici un juge procédant à l'interrogatoire tandis que deux personnages actionnnent un treuil reposant sur un portique de bois.
H - Hélène et l'Invention de la vraie Croix
Judas a parlé. On trouve les croix. Laquelle est la bonne ? À gauche, Hélène assiste, avec ses accompagnatrices, à la présentation des croix qui viennent d'être déterrées de leur cache. Un ouvrier tient encore une bêche à la main. À droite, devant un bâtiment aux allures de construction de l'architecte Alberti, à cause des incisions de marbres polychromes, se produit un miracle qui permet d'identifier la Vrai Croix. Celle-ci, posée sur un cercueil, provoque la résurrection du jeune mort. Plus à droite, certains pensent voir une évocation de la ville natale de l'artiste : Sansepolcro en Toscane.
Détail : le paysage urbain de Jérusalem
En fait de Jérusalem, la ville fortifiée qui est représentée serait davantage Arezzo avec le Duomo dans le quartier le plus élevé et la Pieve plus bas.
Trois siècles plus tard :
I - La victoire d'Héraclius sur Chosroès
Cette scène de bataille fait pendant à la celle du Pont Milvius. À l'issue de la bataille, le roi persan Chosroès, qui avait pris Jérusalem en 614 et dérobé la croix, est vaincu. En réalité il y eut une série de bataille et Chosroès ne fut définitivement vaincu qu'en 628.
La bataille est représentée comme une spectaculaire mêlée humaine avec du sang qu coule et des têtes tranchées. Dans la partie haute de la fresque, les oriflammes des troupes chrétiennes victorieuses. À droite, Chosroès est agenouillé et écoute Héraclius qui prononce sa condamnation à mort (puisque le vol de la croix est tenu pour un blasphème). Il sera décapité.
On rapporte que les membres de la famille Bacci, commanditaire de ces fresques, figurent parmi les personnages. Ceux-ci ont d'ailleurs tous des traits spécifiques.
Détail : le cavalier du premier plan.
J - Héraclius rapporte la Croix à Jérusalem
Face à la Mort d'Adam, cette fresque montre Héraclius pieds-nus et portant la croix, c'est-à-dire faisant preuve d'humilité pour être autorisé à entrer dans Jérusalem. C'est le 14 septembre qui célèbre cet événement dans la liturgie.
Détail : les notables de Jérusalem
Ce groupe illustre la maîtrise de Piero della Francesca pour réprésenter les tissus et les vêtements et pas seulement les extraordinaires chapeaux des personnages. L'alignement de plusieurs têtes est également typique de sa manière où l'horizontalité est fortement marquée.
Pise !? Il n'y a pas que la Tour penchée, le Duomo et le Baptistère ! Le Campo Santo est certes beaucoup moins visité que ces monuments.
En 1203, à l'initiative de l'évêque Ubaldo, une cinquantaine de navires avaient ramené de Palestine la Terre Sainte du Golgotha pour aménager ce "Champ des Miracles" : on lui prêtait la vertu de transformer les morts en squelettes en 24 heures. À l'intérieur d'un espace organisé comme un vaste cloître gothique, les Pisans avaient édifié vers la fin du XIIIè siècle un cimetière rectangulaire grandiose pour regrouper les tombes au lieu de les disperser autour du Duomo comme c'était le cas depuis le siècle précédent, ainsi que des sarcophages antiques et des sépultures de notables pisans. Pour orner les galeries construites par Giovanni di Simone, les Pisans commandèrent des fresques sur les murs extérieurs. Des statues y ont aussi été regroupées, comme celle du célèbre mathématicien Fibonacci.
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État actuel du Campo Santo
Les bombardements alliés de l'été 1944 ont détruit une partie du monument en provoquant l'incendie de la toiture recouverte de plomb.
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Photographies prises par des officiers de l'armée américaine en 1945
lors de l'estimation des dégâts collatéraux (Base de données de l'université de Yale)
L'image de gauche montre la structure du Campo Santo.
Celle de droite montre le début de reconstruction du toit.
De nombreuses fresques, célèbres ou non, ont disparu, particulièrement celles de Benozzo Gozzoli. On sait aussi que Spinello Aretino (1330-1410 env.) y peignait six fresques, dont restent des fragments sur le Mur Sud du Campo Santo, représentant les miracles de Potitus et d'Ephesus — pour ces travaux il reçut 270 florins.
Mais les plus importantes fresques rescapées de cet incendie de 1944 forment le célèbre ensemble appelé "le Triomphe de la Mort".
• LES FRESQUES DISPERSÉES DANS LES GALERIES
Des fresques dues à Benozzo Gozzoli (1420-1497) ornent la Galerie méridionale. Il est surtout connu pour les œuvres commandées par les Médicis (Palazzo Medici-Picciardi à Florence), par les fresques du chœur de Sant'Agostino à San Gimignano où il a aussi participé aux fresques de la “Collegiata”.
Ici, le cycle de fresques s'inspire de l'Ancien testament, depuis la Genèse jusqu'à la visite de la reine de Saba. L'incendie de 1944 a épargné peu de choses. J'ai photographié ce qui m'a paru le plus important. J'en ai légèrement accentué le contraste et la saturation des couleurs.
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Fresque de Benozzo Gozzoli
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Fresque de Benozzo Gozzoli.
• LE "TRIOMPHE DE LA MORT"
La Grande Peste s'abattit sur la Toscane en 1348 et une grande partie de la population périt. Épidémies, famines et guerres ont également sévi à cette époque. Le "Triomphe de la Mort" est l'appellation que l'on a donnée à cet ensemble de fresques aujourd'hui disposé sur trois murs d'une vaste salle. Le choc de la peste serait la raison de cette commande pour le Campo Santo.
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Mais l'auteur de ces fresques est, semble-t-il, encore inconnu. On a sans doute travaillé à ces vastes fresques dans les années 1350-1360. Les spécialistes ont cherché à attribuer ces œuvres à divers peintres. D'abord à Francesco Traini qui a été actif à Pise dans ces années. Toutefois depuis un essai de Luciano Bellosi publié en 1974 on considère plutôt que leur auteur serait Buonamico Buffalmacco dont on connaît l'activité à Pise dans la période 1315-1336 ; en conséquence cela pourrait signifier que "Le Triomphe de la Mort" aurait été réalisé avant 1348 alors que l'interprétation habituelle consiste à y voir une conséquence artistique de la Grande Peste. Par ailleurs le Jugement Dernier a été attribué à Andrea di Cione dit l'Orcagna, artiste actif entre 1344 et 1368.
Vue d'ensemble des fresques
Mur de gauche :
Le Triomphe de la Mort -proprement dit- est constitué par un groupe d'une dizaine de cavaliers dont quelques femmes, qui regarde trois cercueils ouverts avec leurs morts. «Les uns manifestent de l'effroi, d'autres de la sérénité ; les sentiments des personnes sont parfaitement exprimés, sans emphase mais avec un sens du tragique d'une grande puissance » dit le Guide bleu "Toscane". Le Triomphe de la Mort est complété (en haut à gauche) par la Vie des Pères dans le Désert, et par le Combat des Anges et des Démons, enfin en bas à droite un groupe de jeunes seigneurs insouciants avec des musiciens.
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Mur de gauche
Mur du fond - Mur de droite:
Au fond, le Jugement dernier est bien mieux conservé que la partie droite, peu utilisable.
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Mur du fond (Le jugement dernier) et Mur de droite (Ascension, etc)
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Le Jugement dernier
Quelques détails
Un groupe de cavaliers devant les tombes ouvertes
Zoom sur les cavaliers
L'Enfer
Les Damnés
Un groupe insouciant : jeunes seigneurs et musiciens
Dieu et Diable
Un Ange très exterminateur
(détail du Jugement Dernier)
Et enfin des ermites
La fresque la plus connue est probablement ce Cortège des Mages de Benozzo Gozzoli au Palais Medicis à Florence et date de 1429.
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Tournons nous maintenant vers les fresques des principales églises, abbayes et couvents de Florence.
San Marco
Ce couvent du nord de la ville est connu pour abriter les fresques de Fra Angelico, ce moine dominicain qui y vécut au Quattrocento. Il y réalisa de multiples peintures sur bois exposées au rez-de-chaussée (Hospice). Du côté des fresques, c'est d'abord la grande CRUCIFIXION datant de 1442 dans la Salle du Chapitre (5,5 m x 9,5 m).
Plus étonnant est l'ensemble des fresques réalisées au premier étage avec d'abord, en haut de l'escalier, une grande ANNONCIATION (2,5 x 3m) d'où se dirigent les deux couloirs desservant les cellules.
Chacune des cellules est décorée d'une fresque illustrant la vie du Christ et quelques unes sont plus particulièrement intéressantes. Leur taille est en général de l'ordre de 1,5 m sur 1,8 m.
Dans la cellule n°7 : le Christ bafoué
La fresque de cette cellule montre au premier plan la Vierge et saint Dominique ; ils méditent sur le Christ trônant derrière eux, les yeux bandés. Il tient en main le sceptre et le globe qui symbolisent des pouvoirs que les gardes lui offrent par raillerie. Sur un fond vert irréel, le Christ est entouré d'autres symboles de la dérision, utilisés dans l'iconographie médiévale : ce sont des mains qui le giflent, et la tête d'un personnage qui crache sur lui.
Au bout d'un premier couloir se trouve la cellule où Cosme l'Ancien, le détenteur du pouvoir florentin, venait faire des retraites.
Et à l'opposé la cellule du prieur qui fut aussi celle de Fra Girolamo, c'est-à-dire de Savonarole, qui sur brûlé sur la place de la Seigneurie le 23 mai 1498. (Sur Savonarole, voir le livre de Pierre Antonetti).
Santa Croce
À l'est du centre-ville, précédée d'une place animée où se joue chaque année le "calcio" historique, Santa Croce, l'église des Franciscains, abrite les tombeaux de Florentins célèbres tels Michel-Ange ou Machiavel. Deux chapelles proches du chœur montrent les scènes de la vie de saint François par Giotto ainsi que de la vie de saint Jean-Baptiste. Une Assomption du même artiste voisine avec elles.
Chapelle Baroncelli : la Vie de la Vierge
Fresques de Taddeo Gaddi (1332-1338)
Toujours à Santa Croce, le "museo dell'Opera" (ex-Réfectoire) abrite, entre autres chefs-d'œuvre, l'Arbre de la Vie également de Taddeo Gaddi.
Taddeo Gaddi - L'abre de vie - Santa Croce
Santa Maria Novella
L'église est connue pour sa façade (restauration en cours en 2006). Dans la nef, le visiteur est accueilli par la Sainte Trinité de Masaccio (1425) célèbre par son effet de trompe-l'œil. Les chapelles du chœur sont ornées de plusieurs fresques.
Cette Trinité de 1425 ou 1526 a de particulier d'avoir été réalisée selon les nouvelles règles mathématiques de la perspective. Selon Vasari, cela donne l'impression que la voûte "troue le mur". L'autre choc, à l'époque- c'était que tous les personnages sont également humains.
La Vie de la Vierge
Les fresques de la chapelle Tornabuoni sont dues à Ghirlandaio. Elles ont été réalisées dans les années 1485-1490.
Le banquier Tornabuoni
La naissance de Marie
On considère que dans cette série de fresque de nombreux personnages figurent des membres de la famille Tornabuoni, notamment, ici, sa fille au premier rang du groupe de gauche.
La mariage de Marie
La Visitation
La Vie de saint Jean Baptiste
Les fresques sont également de Ghirlandaio. Voici la "naissance" avec en détail la servante qui vient offrir des fruits.
Naissance de saint Jean Baptiste
Juste à côté, la chapelle Filippo Strozzi est ornée de la Vie de saint Philippe et de la Vie de saint Jean l'Évangéliste par Filippino Lippi qui les acheva en 1502 ou 1503.
Santa Maria Novella abrite aussi, dans le cloître Vert, la chapelle des Espagnols connue pour les fresques d'Andra da Firenze (Bonaiuti).
Santa Maria del Carmine
Franchissons l'Arno. Ici, notre attention est attirée par la façade inachevée (comme à San Lorenzo) de Santa Maria del Carmine. Au XVIIIè siècle, l'église a été reconstruite dans le styme baroque, mais on conserva la chapelle Brancacci où ont œuvré Masalino et Masaccio. Leurs fresques relatant la vie de saint Pierre ont été peintes en 1425-1428. Leur commanditaire, Felice Brancacci fut exilé en 1435, déclaré rebelle, ce qui provoqua l'effacement d'une partie de leur travail. Puis, entre 1481 et 1485, Filippino Lippi, le fils de Fra Filippo, vint restaurer et compléter ces fresques. La restauration de cet ensemble a été sponsorisée par la société Olivetti.
Chapelle Brancacci - côté gauche - Photo Fabrice R.
Chapelle Brancacci - côté droit - photo Fabrice R.
Les sujets bibliques : Adam et Ève
Le thème du Paradis terrestre et du Paradis perdu appartient au cycle de fresques du Carmine. La Tentation d'Adam et Ève œuvre de Masolino est en haut du pilier droit. La fresque a perdu une trentaine de centimètres de haut avec les aménagements de l'église au XVIIIè siècle. Adam et Ève chassés du paradis terrestre est dû Masaccio et est situé sur le pilier d'en face. L'œuvre de Masolino est considérée comme relevant encore de l'influence du gothique international, Adam et Ève étant assez hiératiques et figés, mais d'une beauté remarquable.
Masolino - Adam et Ève et la Tentation
Celle de Masaccio serait plus moderne : elle montre avec force la conscience du péché, la perte de l'innocence, le poids de la honte. Le couple est expulsé par la porte du Paradis —une porte dont l'étroitesse est accetuée par la perspective— porte qui figure à gauche et d'où jaillissent des rayons solaires dont l'or n'a pas été restauré.
Saint Pierre et les premiers chrétiens
Les fresques de la Chapelle Brancacci exposent plusieurs scènes importantes de la vie de saint Pierre en s'appuyant sur les Évangiles et sur la "Légende Dorée".
Masaccio - Le paiement du Tribut
On a écrit que cette peinture de Masaccio, "tel un schisme, a provoqué une scissure dans l'histoire de la peinture italienne" (L.Berti). Datable de 1425, elle fut réalisée en 28 jours. Il y a une narration de la scène des Évangiles en trois temps.
1. Obéissant à la demande du gabeleur vu de dos, Jésus entouré des Apôtres, ordonne à Pierre de trouver une monnaie dans la bouche d'un poisson.
2. À gauche, Pierre, "dans sa stentative de retirer l'argent du ventre du poisson, a le visage en feu à force d'être courbé" (Vasari).
3. À droite, Pierre paie le tribut c'est-à-dire l'impôt pour le Temple au receveur romain.
Masolino - Le sermon de saint Pierre
Dans cette œuvre, on note le geste solennel du saint et l'attitude de l'assistance, très attentive. Au premier plan à droite, un Carme presque surdimensionné.
Masaccio - Le baptême des néophytes
Masaccio - La Guérison de l'infirme et la Résurrection de Tabita
Masaccio et Filippino Lippi
La Résurrection du fils de Théophile et - à droite - Saint Pierre assis en chaire.
Observons les trois personnages à l'extrémité droite de la scène. Masaccio s'est représenté, le regard tourné vers nous, avec à sa droite, Masolino, plus petit, et derrière Leon Battista Alberti et Brunelleschi.
Masaccio - Saint Pierre guérit les malades avec son ombre
Je suis fasciné par cette œuvre qui dans la chapelle Brancacci est coincée entre l'angle du mur et un autel moderne. Je ne suis pas le seul. Victor Stoichita a consacré plusieurs pages à l'expliquer («Brève histoire de l'ombre», Droz, Genève, 2000. Pages 54 et suivantes). Le premier est déjà debout et rend grâce au saint. Le second se relève. Le troisième est encore à terre, infirme, la jambe droite atrophiée. Leurs regards convergent vers Pierre. Ni Pierre ni Jean ne les regardent. La scène est conçue d'une manière très vivante : c'est l'effet produit par la marche des apôtres dans cette rue tracée en oblique sous nos yeux ; ils viennent vers nous. On peut y voir le triomphe du réalisme du Quattrocento.
Masaccio - La distribution des biens et la mort d'Anania
L'épisode est tité des Actes des Apôtres. Saint Pierre et saint Jean faisaient la charité, distribuant des biens aux premiers chrétiens qui vivaient en communauté d'hommes pauvres et égaux, où l'on proscrivait l'accumulation personnelle de biens et l'enrichissement de l'individu. Alors pourquoi cette scène? Anania a menti au sujet du prix de vente de ses terres et en a conservé une partie. Le mensonge fait qu'il tombe foudroyé aux pieds de saint Pierre. Sa femme Saffira (Saphir) tient leur enfant dans ses bras et écoute saint Pierre.
Filippino Lippi - Paul rend visite à Pierre en prison
Filipino Lippi - L'Ange libère saint Pierre de sa prison
Filippino LIPPI - À droite : Saint Pierre et le Mage Simon devant Néron
À gauche : le Martyre de saint Pierre
Dans la partie de droite, on voit une statuette tombée à terre. Dans la "Légende Dorée" Jacques de Voragine expose de manière détaillée l'histoire du mage Simon (édition Points poche "sagesse", pages 312-318). En voici un extrait où il est question de statue :
« Cependant le magicien Simon était si aimé de Néron qu'on savait qu'il tenait entre ses mains les destinées de la ville entière. Un jour, comme il se trouvait en présence de Néron, il avait su changer son visage de telle sorte que tantôt il paraissait un vieillard, et tantôt un adolescent : ce que voyant, Néron avait cru qu'il était vraiment le fils de Dieu. Un autre jour, le magicien dit à l'empereur : « Pour te convaincre que je suis le fils de Dieu, fais-moi trancher la tête; et, le troisième jour, je ressusciterai!» Néron ordonna à son bourreau de lui trancher la tête. Mais Simon, par un artifice magique, fit en sorte que le bourreau, croyant le décapiter, décapita un bélier; après quoi, il cacha les membres du bélier, laissa sur le pavé les traces de sang et se cacha lui-même pendant trois jours. Le troisième jour il comparut devant Néron et lui dit : « Fais effacer les traces de mon sang sur le pavé, car voici que je suis ressuscité, comme je te l'ai promis!» Et Néron ne douta plus de sa divinité. Un autre jour encore, pendant que Simon était auprès de Néron dans un chambre, un diable qui avait revêtu sa figura parla au peuple sur le Forum. Enfin il sut inspirer aux Romains un tel respect qu'ils lui élevèrent une statue, sur laquelle fut placée l'inscription : « Au saint dieu Simon.» Or Pierre et Paul, s'étant introduits auprès de Néron, dévoilaient tous les maléfices du magicien; et Pierre, notamment, disait que, de même qu'il y a dans le Christ deux substances, la divine et l'humaine, de même il avait en Simon deux substances, à savoir l'humaine et la diabolique.»
À gauche, le martyre de saint Pierre, supplice de la croix en sa qualité d'étranger, alors qu'à la même époque Paul qui était citoyen romain fut condamné à avoir la tête coupée.
FLORENCE : Santa Trinità
La Chapelle Sassetti, un banquier local, est connue pour ses fresques de Domenico Ghirlandajo qui figurent l'histoire de saint François. Le couple Sassetti est représenté en bas de l'œuvre de part et d'autre du retable.
La vie de saint François. Vue d'ensemble.
Retable. L'adoration des bergers (1495)
Toujours à la basilique Santa Trinita, la chapelle Bartolini a été décorée par Lorenzo Monaco.
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Lorenzo Monaco. Le mariage de la Vierge (1420-24)
Chartreuse de Galluzzo
A la sortie sud de Florence, la chartreuse San Lorenzo de Galluzzo abrite un cycle de cinq fresques des Scènes de la Passion, dans la loggia du cloître, réalisées en 1623-25 par Jacopo de Pontormo (1494-1557).
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Le Christ devant Pilate
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La Montée au Calvaire.
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La Déposition de Croix
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La Prière au jardin des Oliviers
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La Résurrection
San Gimignano est connue pour être une petite ville fortifiée dans le Val d'Elsa en Toscane, et plus encore pour ses tours médiévales.
Le Duomo, c'est-à-dire la Collegiata de Santa Maria Assunta présente sur le mur gauche de la nef des fresques de Bartolo di Fredi peintes en 1367 sur le thème de l'Ancien Testament.
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La Tentation de Job.
Sur le mur droit, les fresques sur le Nouveau Testament sont l'œuvre de Lippo Memmi entre 1338 et 1340. Elles forment un ensemble de 25 scènes.
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Quelques scènes de la vie du Christ par Lippo Memmi.
Benozzo Gozzoli a œuvré à l'église Saint Augustin avec un cycle des fresques situées dans le chœur. C'est l'histoire de saint Augustin —évidemment— qui figure ici en peintures de grande dimension, très détaillée et d'une rare clarté.
Le jeune Augustin est confié par ses parents au Maître de Tagaste
Augustin débarque à Ostie.
Saint Augustin quitte Rome pour Milan
Le personnage à droite serait l'autoportrait de B. Gozzoli
Saint Augustin donne aux moines leur règle (à droite) et
parle avec l'enfant Jésus à gauche
La comparaison de ces fresques avec d'autres du même B. Gozzoli vient aussitôt à l'esprit. On pense bien sûr à celle du Palazzo Riccardo-Medici à Florence, où figure la fresque très célèbre des Mages où figurent en fait des portraits de famille des Médicis, placée ici pour rappel.
Dans la chapelle de sainte Fine, Ghirlandaio a peint les Funérailles de la sainte.
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Funérailles de sainte Fina, 1475. Une œuvre d'une grande finesse.
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Le Duomo. La Libreria Piccolomini
Il ne s'agit pas du Palazzo Piccolomini : la Libreria est une annexe du Duomo, fondée en 1495 par le cardinal Francesco Piccolomini Todeschini, le futur PIE III (qui régna 25 jours en 1503), pour conserver la bibliothèque de son oncle PIE II. La famille siennoise Piccolomini fut aussi illustrée par des humanistes au XVIè siècle, Alessandro et Francesco.
Les fresques qui décorent cette grande salle rectangulaire et lumineuse, joie des photographes et des amateurs de Renaissance, ont été réalisées dans les années 1505-1505 par le Pinturicchio.
L'extrordinaire plafond de la bibliothèque
Qui était donc Pie II ?
Ces fresques sont très colorées et pleines d'intérêt documentaire. Elles narrent la vie du pape Pie II, alias Eneas Silvio Piccolomini (1405-1464). Ce poète et humaniste (Enée !) entra dans les ordres en 1446 après avoir été au service, en Italie et hors d'Italie, d'un poignée d'évêques, d'un antipape et d'un empereur. Devenu Pie II en 1458 il prêcha à Mantoue une croisade contre les Turcs. Sa ville natale, non pas Sienne mais Corsignano, fut son son pontificat remaniée en ville-modèle et rebaptisée : Pienza.
Revenons en 1431. À cette date, un cardinal le prit comme secrétaire pour aller au concile de Bâle. Félix V lui donna le même emploi. En 1442 il passa au service de l'empereur Frédéric qui l'envoya ambassadeur à Rome, à Naples, à Milan, en Bohême. Le pape Eugène IV le prit à son service. Nicolas V lui conféra l'évêché de Trieste puis celui de Sienne. Calixte III en fit un cardinal. Puis le 14 août 1458 il fut élu pape dans un contexte religieux apaisé par la fin du Grand Schisme d'Occident. Mais, dix ans après la prise de Constantinople par les Turcs, il lança l'appel à une nouvelle croisade dont il voulait prendre la tête. Il avait réuni pour cette expédition 50.000 écus d'or. Arrivé à Ancône, atteint par une "fièvre", il y mourut le 14 août 1464.
L'Italie recevait à cette époque de nombreux érudits venus de Grèce, fuyant les Turcs. Lui-même, outre des ouvrages religieux, commit une "Histoire des Bohémiens", des "Mémoires" et un roman en vers, Euryale et Lucrèce, traduit et publié à Paris, vers 1500, par Octavien de Saint-Gelais et caractérisé —paraît-il— par l'abus des allusions mythologiques.
Les fresques du Pinturicchio
Suite à un premier contrat avec le cardinal Francesco Piccolomini, Bernardino di Betto dit le "Pinturicchio", né à Pérouse en 1454, a conçu le décor du plafond en 1502 et ses élèves l'ont réalisé. Après la mort de Pie III en novembre 1503, un nouveau contrat fut conclu, avec un frère du défunt pape et le Pinturicchio réalisa ainsi entre 1505 et 1507 les dix épisodes de ces fresques murales. Les fresques démarrent avec l'arrivée d'Énée Silvio Piccolomini au concile de Bâle jusqu'au moment où, devenu Pie II, il reçoit au port d'Ancône les galères des croisés.
Vue du côté gauche
1 - Le départ pour le concile de Bâle
Embauché comme secrétaire du cardinal Domenico Capranica, qu'on reconnaît à la couleur de sa tenue, Énée entame ici sa carrière diplomatique en allant participer au concile de Bâle. On admire le cheval blanc du premier plan qui porte notre héros. La scène se passe sans doute au petit port de Talamone, au large on aperçoit l'île de Giglio.
2 - Enée Piccolomini et le concile de Bâle
Piccolomini est chargé d'organiser le concile de Bâle, il se rend auprès de Jacques Ier, roi d'Écosse, pour obtenir son soutien contre le roi de France Charles VII. Pour le Pinturicchio, ce n'est pas un sujet folichon : aussi le paysage arboré en arrière-plan est-il particulièrement soigné.
3 - Énée Piccolomoni est couronné poète par Frédéric III
À cette époque Énée Silvio Piccolomini est officiellement le légat de l'antipape Félix V auprès de l'empereur Frédéric III.
La scène est marquée par l'opposition entre l'étrange palais vide à l'arrière-plan et l'assistance de la cérémonie. On note les beaux pages du premier plan !
4 - Il fait acte de soumission à Eugène IV
L'empereur a chargé Piccolomini de rétablir de bonnes relations entre l'Empire et le Saint-Siège ; aussi la scène montre Piccolomini reçu par Eugène IV et lui baisant les pieds. L'épisode n'est pas très intéressant du point de vue esthétique ; l'image est alourdie par la perspective, notamment avec cette espèce de plafond à caissons.
5 - La rencontre de Frédéric III et d'Éléonore d'Aragon
Jusqu'à présent, dans ces fresques, on pouvait noter un lourd déficit d'images féminines. En voici une relative compensation. Le mariage princier a été préparé par Énée Piccolomini. La rencontre a lieu Porte Camollia par où l'on arrivait à Sienne en venant de Florence. Le peintre en fait le prétexte à une "veduta" où l'on peut reconnaître le Duomo, avec sa tour et sa coupole :
Au centre la colonne commémorative représente les armoiries des époux.
6 - Énée Piccolomini reçoit le chapeau de cardinal
Entre nous, il l'a bien mérité ! On est en 1456, c'est le pape Calixte III qui est le successeur de Pierre. Dans cette fresque, le fond à dominante foncée contribue à mettre en valeur les nombreux personnages. Et, art subtil, le tableau dans le tableau ! Une madonne entre deux saints.
7 - Énéo Piccolomini est couronné Pape sous le nom de Pie II
Le nouveau pape est sous le baldaquin aux armes de la famille Piccolomini. La foule est compacte. La scène doit se passer à la basilique du Latran.
8 - L'assemblée de Mantoue où Pie II prêche la croisade
La scène de Mantoue est très intéressante : avec cette assemblée sous des arcades, en vue d'un beau paysage, c'est presque une partie de campagne. On peut admirer la diversité des attitudes des personnages présents. On ne dirait pas que l'heure est grave car le Turc menace la chrétienté (des nuages dans le ciel aussi).
Au premier plan, les secrétaires chargés des documents administratifs constituent une remarquable série de têtes.
9 - La canonisation de Catherine de Sienne
La scène date du 29 juin 1461. On voit la dépouille de la sainte dont la maison natale est toujours visible à Sienne. Selon certaine légende, le personnage en bas à gauche serait Raphaël Sanzio...
10 - Pie II à Ancône pour le départ de la croisade
Selon les spécialistes, le personnage agenouillé à gauche est le doge Cristoforo Moro, en face de lui figure le prince de Samos, Hassan Zaccaria. À droite, Calepino Bajazet, dit "il Turchetto", élégant otage du Pape.
Le scène se tient donc à Ancône, qu'on voit au loin. Pie II y arrive le 18 juin, il tombe malade et meurt peu après, le 15 août 1464.
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Outre ces dix tableaux représentant "les faits les plus mémorables de la vie de Pie II", le Pinturicchio en fit un onzième, Le Couronnement de Pie III, situé à l'extérieur de la Libreria.
Le Pinturicchio mourut à Sienne le 11 décembre 1513. Il y avait réalisé son chef-d'œuvre, malgré l'absence de ces beaux portraits féminins qui sont si souvent la base de la notoriété des artistes du Cinquecento !
Le Baptistère Saint Jean
Vues des voûtes peintes par Lorenzo Vecchietta au milieu du Quattrocento inspirées par les douze articles du Credo formant le Symbole des Apôtres.
En bas des voûtes, les fresques absidiales :
La flagellation du Christ, par Lorenzo Vecchietta
Pièta. Œuvre de Michele di Matteo Lambertini.
SIENNE : LE PALAZZO PUBLICO |
Les fresques politiques du Museo Civico de Sienne
Par fresques "politiques" j'entends celles qui ornent des bâtiments publics, tels que les palais du pouvoir des cités toscanes que furent le Palazzo Vecchio à Florence, le Museo Civico à Sienne. C'est de ce dernier qu'il s'agira ici.
GUIDORICCIO DA FOGLIANO
« On ne peut avoir plus grand air.
À cheval, il ne fait qu'un avec sa monture :
il est l'homme qui veut et qui agit, celui qui commande et qui conduit.
D'or clair et de sinople en brocart, il va à l'amble aux couleurs de Sienne,
sous le soleil noir, de l'azur le plus sombre.»
André Suarès, Voyage du Condottière.
PORTRAIT ET PAYSAGE : LA FRESQUE DE 1328
Le Palazzo Pubblico a été décoré par Simone Martini (1284-1344), le plus illustre artiste siennois du Trecento avec Duccio di Buoninsegna et Ambrogio Lorenzetti. Sur le mur ouest de la Salle de la Mappemonde, Simone Martini a représenté un épisode de la conquête des châteaux de la Maremme et de l'Amiata, dont nous parlent après précision les archives de la République siennoise.
Même si, dans notre dos, la "Maestà" du même Simone Martini (1315) attire davantage les regards, faisons bien attention à cette première fresque "militaire" qui glorifie un condottiere, chef de guerre des Siennois, habillé aux couleurs de la ville. Le tableau aurait été réalisé en 7 ou 8 jours (Marco Pierini, L'Art à Sienne, éd. Scala). Les manuels scolaires et les livres d'art ont popularisé cette fresque datée de 1328 représentant Guidoriccio da Fogliano au moment du siège de Montemassi, le château situé à gauche, tandis qu'une bastide est au milieu et un camp militaire tout à droite, l'un et l'autre avec les couleurs de Sienne, noir et blanc en bandes verticales.
À cheval au milieu du paysage désolé qui englobe les deux places fortes aux tours crénelées bien visibles, le condottiere passe devant nous, comme une statue équestre. Mais regardons maintenant l'ensemble du mur :
Si nous regardons en dessous, entre les deux œuvres du SODOMA (1529) —représentant les saints patrons de Sienne— une autre fresque apparaît partiellement. Elle a été mise au jour par hasard en 1980 lors de travaux de restauration. Elle a été peinte sur l'intonaco d'une mappemonde.
• Que représente la "nouvelle" fresque ?
La découverte révèle deux personnages, l'un avec une épée, qui semble avoir été gratté puis recouvert d'une étrange couche de bleu azur, l'autre un châtelain qui semble soumis au premier. La "nouvelle" cité avec fortifications, tour, église et habitations, serait Arcidosso, une ennemie vaincue par Sienne au temps de sa splendeur sous le Gouvernement guelfe des Neuf (1287-1355). En 1330, Guidoriccio fut effectivement envoyé par Sienne avec 4000 fantassins pour attaquer le comte de Santa Fiora c'est-à-dire les Aldobrandeschi qui, sous la menace, acceptèrent la paix. Laissant Santa Fiora aux Siennois, les Aldobrandeschi se replièrent sur leur place-forte d'Arcidosso. Mais en avril 1331 — et non pas en 1328 date portée sur la fresque— Guidoriccio vint l'attaquer et la prit après un siège de 4 mois grâce à un tunnel creusé sous les fondations. Les Aldobrandeschi se soumirent et conclurent un accord avec le condottiere. L'accord monétaire passé entre eux et Guidoriccio fut peu après dénoncé par Sienne. En septembre 1333 ce fut la rupture entre la République et son chef de guerre. Guidoriccio, considéré comme traître au Gouvernement de Neuf, s'exila en Emilie où en 1337 il devint podestat de Padoue.
Cette "nouvelle fresque" montrerait bien Guidoriccio et ses exploits guerriers. Ce serait elle la première représentation "photographique" d'un paysage et non la fresque de la "pontate" supérieure. Alors pourquoi fut-elle recouverte ? Il suffit de reprendre ce qu'on vient de dire. À Sienne, le Gouvernement des Neuf aurait mal accepté la représentation d'un condottiere désormais expulsé de Sienne pour commander des troupes ennemies. D'où la couche de bleu pour camoufler le héros devenu traître. Puis d'autres peintures… comme celle antidatée 1328 et qui, seule, est restée visible des siècles durant. Le subterfuge ne déplut sans doute pas aux Aldobrandeschi dont la défaite fut effacée. Surtout la gloire de Sienne était satisfaite par l'immensité de la fresque, la taille imposante du Cavalier, le déploiement de la puissance militaire. Et puis en 1348 ce fut la Grande Peste et seulement un Siennois sur trois lui survécut. Alors on pouvait bien appeler le Cavalier Guidoriccio et le château investi celui de Montemassi. On s'y habitua. Jusqu'en 1980.
Aujourd'hui c'est un choc culturel pour Sienne si, comme le pense Mauro Aurigi, le Cavalier n'est pas une œuvre de Simone Martini et s'il ne représente pas Guidoriccio. Devenu traître à Sienne il fut victime d'une "damnation memoriae" sur la fresque inférieure, avec les traces de défiguration et le camouflage sous le bleu azur. Le Gouvernement des Neuf avait procédé à un meurtre symbolique. Quant au vrai Guido Riccio da Fogliano, il mourut en 1352.
• Attributions toujours incertaines
Qui est l'auteur de la fresque inférieure ? et supérieure ? En 2003, une exposition locale sur Duccio di Buoninsegna lui attribua la fresque inférieure. Mais cet artiste a-t-il jamais peint des fresques ? et a-t-il jamais peint des sujets autres que religieux? (De plus il serait mort en 1315 ou 1318).
Simone Martini ? Lui, on sait au moins qu'il a été payé 23 livres pour peindre les châteaux conquis par Guidoriccio ! Et qu'il a passé une semaine sur le terrain pour en faire le dessin. Mais depuis un siècle les historiens de l'art doutent que Simone Martini —qui n'a réalisé que des tableaux religieux et les a exécutés de manière très fine— ait pu être l'auteur de ce "Guidoriccio…", ce cavalier qui monte un destrier assez gauchement représenté. Tout visiteur peut constater la distorsion entre la technique picturale de la fresque datée 1328 et celle, délicate, de la "Vierge en majesté" exposée à l'autre bout de la Salle de la Mappemonde. Les doutes furent exprimés dès 1907 par Venturi dans son "Histoire de l'art italien". Ils ont été repris par Federico Zeri. Enfin les universitaires américains Gordon Moran et Michael Mallory ont considéré que le Cavalier n'était qu'une superposition tardive et médiocre exécutée sur le panorama déjà commandé à Martini entre 1320 et 1331.
La grande fresque de près de dix mètres de large ne date peut-être pas du Trecento… La bataille entre historiens d'art perdure. Comme perdure la fonction de symbole de Sienne qu'est cette œuvre.
LE BON ET LE MAUVAIS GOUVERNEMENT
C'est l'ensemble de fresques le plus célèbre de Sienne. L’«Allégorie du Bon et du Mauvais gouvernement» d'Ambrogio Lorenzetti est un cycle de fresques réalisé entre 1337 et 1340 dans la Salle des Neuf (dite également Salle de la Paix) du Palazzo Publico de Sienne. Ce cycle est une des premières œuvres laïques dans l'art de cette époque. Le pouvoir du temps voulut que l'artiste représentât d'un côté l'Allégorie du Mauvais Gouvernement avec les effets qu'il produit (famine, assassinats, pillage, violence, pauvreté…) et de l'autre le Bon Gouvernement avec ses effets (prospérité de la cité, bien-être, richesse, joie, etc). L'intention est bien claire : c'est seulement si le pouvoir repose sur la justice sociale que la population en tire bénéfice.
LE BON GOUVERNEMENT
Vue d'ensemble
De gauche à droite : l'Allégorie du Bon Gouvernement, les Effets du Bon Gouvernement à la Ville puis à la Campagne
• L' Allégorie du Bon Gouvernement

Vue d'ensemble de l'Allégorie du Bon Gouvernement
En haut de la fresque quatre figures allégoriques : Sapientia, Fides, Caritas et Spes. La Sagesse tient à la main le livre biblique du même nom. Il en part une corde qui domine la Justice qui tient dans ses mains les plateaux de la balance.
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Par le biais de deux anges, la Justice distribue à chacun selon les mérites de chacun : à gauche un homme reçoit un bâton de commandement, tandis qu'un autre va être décapité; à droite un coffre est remis à un personnage agenouillé.
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Ensuite la corde passe dans les mains de la Concorde avec un rabot sur les genoux, comme pour aplanir disputes et controverses. Puis la corde arrive aux mains de vingt-quatre citoyens habillés et coiffés selon la mode du Trecento : ils symbolisent l'ancien gouvernement de Sienne que l'on appelait alors le Gouvernement des Vingt-Quatre. Enfin cette corde finit entre les mains d'un vieillard imposant comme un empereur, vêtu de blanc et de noir, couleurs de la ville. Il représente la Commune, donc aussi le Bien Commun.
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Au centre, l'autorité et la légitimation de sa régence sont exprimés par les conseillères qui se tiennent à ses côtés pour le guider. A droite, Un groupe de prisonniers liés montre ce qui arrive aux rebelles et aux hors-la-loi. Aux pieds du vieillard, les deux enfants qui selon le mythe ont fondé Sienne...
Les Vertus Théologales (Foi, Charité et Espérance) planent au dessus de lui et les quatre Vertus Cardinales (Force, Prudence, Tempérance et Justice) sont assises à côté de lui avec la Magnanimité et la Paix. En bas à droite des hommes d'armes veillent à la sécurité des citoyens. Les conséquences de cette parfaite administration sont illustrées par la suite de la fresque.
• Les effets du Bon Gouvernement
Le "bon gouvernement" a, on l'imagine aisément, le "mauvais gouvernement" comme voisin, sinon l'effet pédagogique de la leçon d'instruction civique aurait été réduite. La plus belle fresque de l'ensemble c'est sans doute les Effets du Bon Gouvernement à la Ville et à la Campagne. C'est une visite à Sienne au milieu du Trecento, une vue perspective de la cité et de ses campagnes. Le bon gouvernement garantit la sécurité au citoyen, à la Ville et ici à la Campagne :
Dès lors, la vie quotidienne se déroule en toute harmonie dans une magnifique ville de pierres et de briques, remplie de tours, de palais, d'habitations privées, d'églises et de boutiques. Encore aujourd'hui, l'effet d'entassement est typique du centre historique. Des détails maintenant :
Ici un cortège nuptial, on remarque particulièrement les cavaliers. On constate l'absence du luxe ostentatoire dans la Commune de Sienne. La scène des effets du Bon Gouvernement en ville détaille aussi des activités de production et de commerce.
À gauche, la danse de dix jeunes filles revêtues d'étoffes précieuses doit être interprétée non comme une scène réaliste mais comme une allégorie. En effet les statuts de la Commune interdisaient généralement ces manifestations. Le nombre dix fait allusion aux vertus évoquées auparavant. Neuf d'entre elles exécutent des pas de danse tandis que la dixième (Justice ou Concorde) bat la mesure avec la cymbale et chante.
La vue détaillée ci-dessus montre certaines boutiques d'artisans (comme le bottier à gauche) et une école où se donne un cours ex cathedra. Dans le même immeuble, à une fenêtre remarquer l'oiseau en cage.
Hors des murs, Lorenzetti peint un puissant personnage accompagné de son fauconnier qui sort pour aller à la chasse.
En cours de route, ils croisent des paysans qui reviennent d'une ferme et transportent jusqu'au marché urbain des sacs de céréales.
Les sacs de grain sont portés par des ânes ou des mulets. Un cochon aussi est destiné à la consommation urbaine. Derrière, un paysan porte un chapeau à larges bords qui diffère des autres couvre-chefs. À l'arrière-plan, autour de la ferme, d'autres animaux sont chargés de récoltes, tandis que le battage est en cours et que la moisson continue.
Tandis que le fauconnier part à la chasse, d'autre personnages sont déjà sur le terrain, apparamment équipés d'arbalètes, prêts à tirer sur quelque gibier qui se cache dans le verger ou la vigne.
LE MAUVAIS GOUVERNEMENT
• L'Allégorie du Mauvais Gouvernement
Le dirigeant démoniaque de la cour maléfique s'appelle Tyrannie. Il tient prisonnière à ses pieds la Justice enchaînée. Le tyran est représenté comme un homme vêtu de noir, cornu (donc personnification du Diable). Il est entouré par la Cruauté, la Discorde, la Guerre, la Perfidie, la Fraude, la Colère, l'Avarice et Vaine gloire. À chaque Vertu du Bon Gouvernement correspond ici un Vice.
• Les effets du mauvais gouvernement
Les effets qui dérivent du Mauvais Gouvernement : la misère, les abus, la destruction et la famine dans une ville où le seul artisan au travail est le forgeron qui fait les armes.
Pendant ce temps, à la campagne dominent des champs en jachère, une ferme en ruines, une autres en flammes, des scènes de violence.
L'INVENTION DU PAYSAGE
Dans la fresque de Simone Martini, dans celle de Duccio, comme danc l'ensemble peint par Ambrogio Lorenzetti, on atteint un haut niveau d'originalité : c'est l'invention du paysage. Au Trecento, c'est réellement le premier moment du paysage dans la peinture italienne, même s'il faut attendre le Seicento pour que le paysage devienne un genre autonome.
Le paysage rural. Il est montré dans les deux parties, Bon comme Mauvais gouvernement (supra). Le paysage toscan reste typique des "crete" qui s'étendent principalement au sud de Sienne. Des champs ouverts (openfield accentué par l'agriculture moderne) caractérisent cet espace où les arbres sont beaucoup plus rares que dans la Maremme (sud-ouest de l'actuelle région du Chianti).
Le paysage rural siennois dans le "Bon Gouvernement"
Le paysage des "crete" entre Sienne et Asciano
Le paysage urbain a souvent été utilisé comme arrière-plan de scènes religieuses (en particulier dans les tableaux ayant pour thème la Crucifixion où l'on représente Jérusalem). Ici, à propos de fresques politiques On le retrouve ici avec une précision encore inégalée.
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L'abbaye de Monte Oliveto Maggiore, située au sud de Sienne en Toscane, abrite dans le Grand Cloître, un ensemble de fresques commencé par Luca Signorelli (1497-1498), poursuivi et terminé par le Sodoma (1505).
Vue d'une galerie
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Luca Signorelli : Comment Benoît dit aux moines où et quand ils ont mangé en dehors du monastère.
Sodoma : Comment Benoît abandonne l'école de Rome.
Sodoma : Comment Benoît à la demande des moines fait jaillir l'eau au sommet de la colline.
Sodoma : Comment Benoît libère un moine possédé par le démon en le fouettant.
Sodoma : Comment Benoît mène à bien l'édification de douze monastères.
Sodoma : Comment Benoît reçoit les deux jeunes Romains nommés Mauro et Placide. C'est l'une des plus grandioses œuvres de Sodoma.
Sodoma : Comment Benoît remet sur son manche une serpe qui était tombée au fond du lac.
Sodoma : Comment Benoît excommunie deux religieuses puis les absout après leur mort.
Sodoma : Comment Benoît libère par son seul regard un paysan qui était attaché.
Sodoma : Comment Florent envoie de mauvaises femmes au monastère (détail).