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Emmanuel Dongala dont on a apprécié les romans (Photo de groupe au bord du fleuve, La sonate à Bridgewater ou encore Le Feu des Origines) a également écrit des nouvelles à ses débuts. En plus de vanter l'alcool local et de célébrer le souvenir de John Coltrane, ce recueil Jazz et vin de palme contient des nouvelles fantaisistes principalement inspirées par le régime révolutionnaire marxiste qui a concerné le Congo-Brazza, alors République Populaire du Congo, de 1968 à 1991.

 

La première de ces cinq nouvelles voit un porte-parole du régime brouillé avec sa famille restée animiste. Les ennuis s'abattent sur lui. Il n'aurait pas du faire arrêter son oncle « pour actes occultes et sorcellerie » car ça s'est retourné contre lui. Chassé par le Parti, il est devenu alcoolique et il conte sa vie à un ami d'autrefois qui le retrouve errant à Pointe-Noire (L'étonnante et dialectique déchéance du camarade Kali Tchikati).

Une petite marchande qui fait du trafic entre Kinshasa et Brazzaville ne parvient pas à récupérer la carte d'identité qui lui est nécessaire pour continuer son activité d'une rive à l'autre du fait de la paresse d'un bureaucrate (Une journée dans la vie d'Augustine Amaya).

Au village, le vieux Likibi est un peu sorcier. Il a fait stopper la pluie pour permettre l'heureux déroulement du bal quand sa fille s'est mariée. Malheureusement, depuis lors la sécheresse sévit, ça dure depuis des mois. Les récoltes d'arachide sont fichues, et le bétail se meurt. Alors le chef du village en parle aux autorités supérieures et un procès spectaculaire est intenté au sorcier par le nouveau régime. Entre la langue de bois du président du tribunal révolutionnaire et le parler populaire du père Likibi la communication s'établit mal. Le père Likibi tombera victime de l'idéologie (Le procès du père Likibi).

Le président de la République, fondateur du régime révolutionnaire, a été assassiné dans sa résidence pourtant très sécurisée. La police et l'armée cherchent l'assassin, encore et encore  (L'Homme).

Enfin, voici l'histoire d'un « militant modeste » qui cherche à plaire et à s'élever dans le régime révolutionnaire. Comme il faut être rouge plutôt qu'expert, il s'habille en rouge et arrive au travail sur un vélo rouge. Puis il s'exerce, gauchement je dirais, au nouveau sabir des disciples de Marxengels. Mais il n'est pas promu! C'est un homme de la tribu du Président qui obtient la place. Tant pis, notre homme dévoué est présent bien avant l'arrivée du nouveau directeur et du Président. Il leur tend le micro car des discours sont attendus. Or voilà que retentit une explosion... (La Cérémonie).

 

L'écriture volontiers pince-sans-rire d'Emmanuel Dongala fait mouche. D'un côté, il fait entendre la langue populaire des gens simples et des paysans. D'un autre, il étale malicieusement le parler boursouflé des camarades élevés dans la propagande du régime idéocratique.

 

Emmanuel Dongala : Jazz et vin de palme. - Le Serpent à plumes, 2003, 205 pages. [Hatier International, Monde noir poche, 1982].

 

 

Tag(s) : #LITTERATURE AFRICAINE, #CONGO, #NOUVELLES
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