Bien qu'il ait reçu le Grand Prix de l'Académie française, ce roman paru en 2020 n'est rien d'autre qu'une réécriture de l'attentat terroriste qui en juillet 2016 s'est soldé par l'assassinat d'un prêtre, le père Hamel, à Saint-Étienne du Rouvray.
Naturellement les personnages sont modifiés. Les deux terroristes du roman, Hicham et Daoud, se sont rencontrés sur le Darknet au moyen de réseaux voués à l'islamisme radical. Le premier, venu de banlieue parisienne, est issu d'une famille d'origine algérienne : c'est un mauvais sujet qui contraste avec ses sœurs qui réussissent leurs études ; il s'est mis en tête que son père était un moins que rien humilié par des emplois modestes. Le second est un fils de la bourgeoisie d'une ville du midi. Il a été adopté sous le prénom de David et à l'adolescence s'est fait charrié par ses pairs comme étant arabe et musulman. De là, un copain du rugby l'amène à la mosquée et, après avoir rompu avec une femme dont il était le gigolo, il se laisse entraîner dans le djihad terroriste par pur esprit de révolte contre la société bourgeoise, satisfaite et occidentale ; symboliquement il décide de se faire appeler Daoud. Un autre personnage a voulu rompre avec la société capitaliste c'est Agnès mais elle est devenue nonne au service des plus démunis, en Afrique, avant de revenir dans sa région natale.
La victime c'est Georges Tellier, un prêtre desservant l'une des paroisses de Brandes, la ville imaginaire où le drame se déroule. Il a découvert la foi et est devenu prêtre après avoir servi en Algérie dans les SAS. Arrivé à la cinquantaine, une de ses paroissiennes, l'animatrice enjouée de la chorale, était sur le point de le faire douter de sa vocation, mais il s'est repris et désormais en plus de sa paroisse il officie auprès des grands malades. Il représente le christianisme dans une France de moins en moins pratiquante, comme le lui fait remarquer le maire, lui même communiste en mal de militants et d'électeurs. C'est à se demander si l'islam ne concurrencerait pas avec succès ces deux églises installées dans la tradition française. Mais l'extrémisme d'Hicham et de Daoud vise à poignarder sauvagement des innocents et ça n'a pas grand chose à voir avec une vraie pratique religieuse. Aux personnages qu'on vient d'évoquer il convient d'ajouter le policier, Frédéric Nguyen, appelé à intervenir sur le lieu du drame, et qui, comme le père Tellier représente un exemple de rectitude professionnelle, au service de la République. Bref, tous voulaient donner un sens à leur vie...
L'écriture d’Étienne de Montéty n'a rien de révolutionnaire. Il a choisi la simplicité et l'efficacité, proches d'un journalisme grand public. Les chapitres passent simplement, d'un personnage à un autre, avec une contextualisation correcte de l'époque de l'affaire, à preuve l'agitation médiatique à propos du burkini d'autant que Brandes est au bord de la mer et que c'est l'été. Bref c'est un honnête marqueur de l'époque, et de ses interrogations idéologiques, plus qu'un titre marquant de la littérature française du début du XXIe siècle.
• Étienne de Montéty : La grand épreuve. - Stock, 2020, 299 pages.