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Tout au long de ce roman tragique et bouleversant Sandrine Collette questionne la paternité. On suit le flux de pensées de Liam, des plus touchantes aux plus honteuses.

Peu de ponctuation, aucun guillemet : dans sa logorrhée le personnage mêle dialogues et récit, instinct et raison.

 

Élevé « à la trique et à l’alcool » il avait fui à vingt ans la violence parentale pour s’installer dans la montagne, loin de tout. Chasseur il  vendait les peaux pour survivre. Ava partageait sa vie. Un garçon était né, Aru, que Liam ne désirait pas. « Ce gosse je n’en voulais pas vraiment » avoue-t-il. Un soir il a trouvé Ava tuée par un ours : sous elle l’enfant vivait encore...

 

Sidéré, dévoré de chagrin, Liam fait face à un dilemme : garder près de lui l’enfant ou le confier à l’oncle et la tante qui, eux, sauront l’aimer. Car Liam porte en lui la haine et reste incapable de tendresse vis à vis d’Aru. Ses « tripes », son égoïsme le poussent à l’abandonner : asocial, rustre et colérique, Liam rejette cet enfant pour conserver sa liberté : Liam est un homme-loup comme tous à l’origine du monde dans cette nature inhospitalière et indifférente : « c’est comme si elle nous détestait la nature ; elle nous bouffe ». Mais sa raison toujours freine ses pulsions, le sentiment de sa culpabilité le taraude : « il y a quelque chose de mauvais en moi » admet-il effrayé par ses idées criminelles. Il n’est à ses propres yeux qu’une « crevure ».


 

Liam entreprend alors un long voyage, essuie le refus de l’oncle et retourne chez lui avec Aru après un interminable et tragique détour. Hantés par le souvenir d’Ava, Liam et Aru ne se parlent guère... Auteure de romans policiers Sandrine Collette sait décupler l’intensité dramatique lors d’une mauvaise rencontre où Liam est menacé de mort. Aru qui n’a pu protéger sa mère du loup tire sur l’agresseur de son père et le sauve. « C’est le môme qui a fait de moi un homme » reconnaît-il. « Je suis devenu le père de mon fils ». Grâce à ce petit homme de cinq ans, le chasseur solitaire qui chantait avec les loups a découvert son humanité.

Devenir père ne va pas de soi. Entre instinct et conscience, entre passion et raison la paternité se mérite. Aucun père ne peut rester indifférent à ce roman sublime chargé de violence et d’amour.


 

• Sandrine Collette. On était des loups. JC Lattès, 2022, 197 pages.


 

Chroniqué par Kate

Tag(s) : #LITTERATURE FRANÇAISE
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