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Dans cet essai polémique le philosophe Pascal Bruckner alerte sur les conséquences psychologiques de la pandémie qui nous a astreints à vivre confinés pendant deux ans.

Désormais, alors que déclinistes et catastrophistes prédisent l’effondrement du monde occidental, cette vie cloîtrée devient un choix. Il nous faut désormais moins consommer, moins voyager, moins sortir. Greta Thunberg « entrepreneuse en affolement collectif » répand la peur et invite à une vie calfeutrée : on assiste au triomphe du « rabougrissement », de l’auto-confinement volontaire. Cette tendance n’est pas nouvelle. L’auteur en convoque pour preuve la vie monacale, les peintres flamands ou Hopper, mais aussi Oblomov ce héros russe qui vécut couché et ne quitta jamais son lit. En pantoufles, entre écrans et canapé, hyperconnectés et protégés du dehors dangereux on se sent libre. Selon l’auteur nous devenons des corps rassis, livrés au « hold up des cerveaux » par le numérique ; or, nourris de réalité augmentée l’homme s’amenuise ; son malheur sera, à l’inverse de ce que pensait Pascal, de ne plus pouvoir quitter sa chambre. Pascal Bruckner pointe les risques de ce cocooning, de cette vie sur canapé sans consistance, livrée à la banalité et à l’ennui. La fatigue naît de cette routine. Or l’homme ne se réalise que par l’action et le travail, grâce à la rencontre et l’échange avec autrui. Dans le monde d’avant, sortir c’était s’apprêter, soigner sa mise ; désormais l’homme avachi sur son canapé sort en débraillé : ce négligé c’est, selon Bruckner, le signe d’une démocratie malade : la distinction dehors - dedans a disparu.

La pandémie nous a contraints à renoncer à l’inconnu, à l ’imprévu ; à présent c’est la « tyrannie sédentaire » qui nous menace. Tout faire depuis chez soi, avoir l’illusion d’agir grâce aux réseaux sociaux, vivre dans la peur du dehors, c’est s’autodétruire. Car la seule existence qui fasse sens a besoin de rencontrer autrui comme de voir le monde.

Les pantoufles seraient-elles l’emblème du monde d’après ?

Certes Bruckner grossit le trait mais ce petit ouvrage incite à une prise de conscience et résonne comme une mise en garde.

 

     • Pascal Bruckner : Le Sacre des pantoufles. Grasset, 2022, 155 pages.

Chroniqué par Kate

Tag(s) : #LITTERATURE FRANÇAISE, #ESSAIS
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