Dilnur Reyhan : Comment la Chine enterre l’intelligentsia ouïghoure

Dilnur Reyhan, chercheuse à l’Inalco d’origine ouïghoure a subi dans sa jeunesse les discriminations raciales et sexistes du pouvoir chinois. Dans ce bref  fascicule elle laisse libre cours à sa colère et à son indignation.

Dans la région autonome ouïghoure du Xinjiang la sinisation s’intensifie avec l’installation d’une population Han. Les Ouïghours sont interdits de pratique religieuse, discriminés à l’emploi. Leur langue ne s’enseigne plus à l’école. Depuis avril 2017 Xi Jin-Ping a ouvert des « centres de rééducation », en réalité des camps, où sont détenus sans procès des intellectuels, des journalistes, des artistes, des présidents d’université glorifiés jadis par le pouvoir chinois mais désormais soupçonnés d’avoir « une double face » : dévoués au pouvoir mais fidèles à leur culture. L’auteure rapporte trois cas d’écrivains décédés dans ces camps dont N. Tohti, professeur d’économie qui n’a cessé d’alerter l’état chinois sur les discriminations des Ouïghours. Diabétique et privé de son traitement il est décédé en détention.

Quelles que soient les suppliques, le pouvoir chinois est déterminé à éradiquer le peuple ouïghour, son élite et sa culture,  et ce « dans le silence complice du monde » bien que huit pays dont la France aient reconnu ces crimes comme génocide.

Pire est « l’indifférence du monde, de celles et ceux qui se prétendent féministes » devant le traitement des femmes ouïghoures : avortement et stérilisation forcés, conditions de vie carcérale dégradante, viols, exploitation des ouvrières des usines qui travaillent pour 83 grandes marques internationales. « Ce silence m’est insupportable » s’écrie l’auteure ; « En Occident les féministes restent occupées par leur propre activisme » et ne manifestent aucune solidarité .

Dilnur Reyhan à son tour alerte sur le génocide de son peuple, en particulier des intellectuels symboles de sa culture. Ce petit opuscule ne peut laisser indifférent.

• Dilnur Reyhan : Comment la Chine enterre l’intelligentsia ouïghoure. Éditions Zulma / Les apuléennes. 2022, 26 pages.

Chroniqué par Kate