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Troisième roman de la jeune romancière italienne, L'eau du lac n'est jamais douce reprend le thème a priori banal du récit autobiographique mené jusqu'au début de l'âge adulte. La narratrice, Gaia, est l'unique fille d'une “Mère Courage” autoritaire : Antonia élève ses quatre enfants en faisant des ménages depuis que son mari, qui était maçon est devenu infirme à la suite d'un accident du travail qui ne lui a valu aucune pension car il n'était pas déclaré. Gaia a un frère aîné, Mariano, attiré par l'anarchisme, et dont elle est proche au contraire des deux petits frères qui n'occupent guère de place dans le roman.

 

Dans cette fiction au réalisme appuyé, la question du logement joue un rôle décisif. On le découvre dès l'incipit : Antonia bataille pour sortir d'un taudis, elle réussit à obtenir un logement social dans Rome, au milieu d'un beau quartier, puis l'échange avec l'occupante d'un autre appartement joliment situé au bord du lac de Bracciano, à Anguillara Sabazio, à une heure de train au nord de Rome. C'est ce qui oblige la collégienne, puis la lycéenne, puis l'étudiante à un fastidieux trajet pour se rendre dans ses établissements scolaires successifs. Un part de son agressivité en provient sans doute. Mais l'essentiel est déterminé par sa situation de misère économique : le foyer familial ignorera longtemps même la télévision avant qu'elle ne devienne la seule occupation de son père. Pour Gaia pas de vêtements neufs ni à la mode, ni de rendez-vous au salon de coiffure.

 

Ce genre de roman familial populaire et psychologique, au style incisif, semble s'engouffrer dans la voie ouverte par L'Amie prodigieuse d'Elena Ferrante... Certes, ce n'est pas la baie de Naples, c'est le lac de Bracciano qui attire les jeunes : on nage, on plonge, on drague sur ses rives. Gaia s'y rend avec ses amies Agata, Carlotta, ou Elena. Gaia noue des relations avec des garçons et des filles de sa génération mais on ne peut pas dire qu'elle s'entoure d'amitiés durables. Son caractère souvent irritable voire agressif prend le dessus et les trahisons de la meilleure amie ou du meilleur copain suscitent des actions violentes de la part de la narratrice. Au lecteur de les découvrir. Ce sont évidemment ces accès de violence qui fondent l'originalité de L'eau du lac n'est jamais douce. Travaillant d'arrache-pied pour réussir sa scolarité sous la pression de sa mère, Gaia connaît finalement l'amertume. La maladie a emporté Iris. Il est temps de rentrer vivre à Rome.

 

Giulia Caminito – L'eau du lac n'est jamais douce. - Traduit par Laura Brignon, Éditions Gallmeister, 2022, 349 pages. [L’acqua del lago non è mai dolce]. Prix Campiello 2021.

 

 

Tag(s) : #LITTERATURE ITALIENNE
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