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Shimamura est un riche oisif et amateur de danse moderne venu de Tokyo où il a laissé femme et enfants. En traversant un tunnel, un train poussif l'a mené au Pays de neige, peut-être dans le Tohoku, assurément un lieu purificateur. Shimamura fait trois séjours consécutifs dans la station d'altitude à l'auberge de la source thermale : un été, un début d'hiver, un automne. Il y rencontre puis y retrouve Komako, une jeune geisha qui apprend seule à jouer du samisen. Lors de sa seconde venue, Shimamura a voyagé dans le même wagon que la belle Yôko, qui accompagnait un jeune homme souffrant, le fils de la maîtresse de musique, elle-même malade.
Komako s'est faite geisha pour les aider financièrement. Elle a prolongé son contrat après leur décès. Ses clients ne manquent pas, amateurs de sports d'hiver, amateurs de théâtre Nô, ou simplement des paysages pittoresques décrits par Kawabata à chaque chapitre, telles les forêts d'érables à l'automne. Tous lui font boire de l'alcool. Elle revient pompette dans la chambre de Shimamura pour se mettre au chaud dans le kokatsu, ou au contraire ouvrir les fenêtres pour se dégriser et boire de l'eau fraîche ou bien encore l'accompagner au bain (onsen). La nature est très présente : papillons, fleurs, arbres, profil des montagnes, firmament...
Mais tout cela pour quoi ? L'idée de vacuité se faufile notamment dans des conversations futiles. Shimamura ne cherche pas vraiment à séduire Komako — et réciproquement. L'indifférence de sa part est soulignée. Il n'est pas venu le Jour de la Chasse aux Oiseaux qui suit le Nouvel An, au début de février, alors que Komako l'attendait. Il ne répond pas à la sollicitation de Yôko qui lui demande de l'emmener à Tokyo. Dans ce roman à l'écriture délicate, l'essentiel serait-il dans le non-dit et le non-advenu ?
• Yasunari Kawabata : Pays de Neige. [Yukiguni, 1935 et 1947] Traduit par Bunkichi Fujimori et Armel Guerne. Albin Michel, 1960, et Livre de poche, coll. Biblio, 1971, 190 pages.
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Né en 1899, il est devenu après une jeunesse difficile et sombre, l'un des plus grands écrivains japonais du XXe siècle. Auteur de nouvelles (La Danseuse d'Izu) et de romans (Les Belles endormies, Kyôto...), Kawabata a reçu le Prix Nobel de littérature en 1968. Il s'est donné la mort en 1972, peu après le suicide de son ami et disciple Yukio Mishima.