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Publié en allemand en 1995 sous le titre Der Vorleser ce roman est devenu en France l'un des plus célèbres de la littérature allemande contemporaine. Celle-ci a dû affronter la question de la culpabilité des générations actives dans le nazisme et plus particulièrement dans le génocide des juifs, en la recoupant avec le problème de l'attitude des générations plus jeunes qui découvrent leur histoire. Pour traiter de ce sujet, le romancier Bernhard Schlink — qui a une formation de juriste — a imaginé partir de l'aventure d'un lycéen avec une femme du double de son âge. Fils d'intellectuel, Michaël Berg devient à quinze ans l'amant de Hanna Schmitz, simple employée du tramway. Curieusement elle refuse de lui parler de son passé, mais elle obtient de lui qu'avant l'amour il lui fasse la lecture, généralement de grands classiques allemands et étrangers.

 

La seconde partie change complètement la donne : on saute d'un roman initialement centré sur l'initiation amoureuse d'un lycéen par une femme accommodante à un austère roman de prétoire. Ayant perdu de vue Hanna et devenu étudiant, Michaël suit, à l'instigation de son professeur de droit, le procès de plusieurs gardiennes SS du camp d'Auschwitz, de surcroit responsables de la mort de trois cents déportées dans l'incendie de l'église où elles avaient été enfermées à une étape d'une “marche de la mort”. Michaël a alors vécu le choc de comprendre que Hanna Schmitz s'est engagée à vingt ans dans la SS mais que l'instruction n'a pas mis en relation ce recrutement avec son analphabétisme qui l'avait amenée à refuser un emploi de bureau chez Siemens. Vu la paperasserie bien connue du Reich, on s'étonne que la SS ait recruté des illettrées même pour un emploi subalterne, et l'on s'étonne plus encore que Michaël ne se soit pas aperçu du secret de son amie... mais le fait est que cela lui saute aux yeux seulement à la cour d'assises. Et comme Hanna est accusée d'avoir été en pratique la cheffe de ce groupe de salopes qui a maintenu fermées les portes de l'église au nom de l'ordre, et qu'elle avoue finalement avoir rédigé pour ses supérieurs le rapport sur la mort des déportées dans l'incendie fatal, tout conduit au prononcer d'une peine de prison à vie.

 

Par la suite, après un mariage raté, Michaël se sentira coupable de n'avoir pas communiqué à la cour d'assises cet analphabétisme qui aurait pu valoir une moindre condamnation à Hanna. C'est ce qui conduit au bout de quelques années Michaël à redevenir « le liseur » : il lui fournit un magnétophone et lui envoie régulièrement des cassettes ; il s'enregistre lisant de longues séries d'ouvrages pour le plaisir de son ancienne amie. On peut admirer l'effort de réalisation de ces cassettes, mais sans doute la prisonnière aurait-elle préféré qu'il lui écrive ou qu'il lui rende visite au parloir ! C'est en devenant narrateur qu'il paie sa dette, étrange façon de payer de sa personne. Ce roman, best-seller mondial, a connu aussi le succès au cinéma, avec Kate Winslett dans le rôle de Hanna Schmitz.

 

Bernhard Schlink : Le Liseur. - Traduit par Bernard Lortholary, Gallimard, 1996. Folio n°3158, 1999, 242 pages.

 

Tag(s) : #LITTERATURE ALLEMANDE
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