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L'Arminuta — « celle qui est de retour » dans le dialecte local. On ne saura jamais son prénom. Elle a treize ans. Le film commence quand la protagoniste descend d'une voiture qui l'a déposée dans un village perdu des Abruzzes, frappe à la porte d'une pauvre maison et tombe sur Adriana, une gamine mal attifée, mais au regard vif, puis découvre une famille inhospitalière et qu'elle ne connaît pas : la sienne ! D'un coup elle a tout perdu de sa vie précédente : une maison confortable dans une cité au bord de la mer, des parents qui la gâtaient, des voisines et amies. Le choc est rude pour l'Arminuta, la revenante ! Surtout quand on lui demande de plumer et vider un poulet...

 

C'est évidemment contre son gré qu'elle subit l'échange d'un ménage à l'autre, « comme un paquet » dit-elle dans un moment de colère. On apprendra que sa mère, manquant de ressources, s'en était déchargée auprès d'une parente éloignée, Adalgisa, alors qu'elle n'avait que quelques mois. Cette femme qui n'avait pas d'enfant l'avait élevée comme si c'était sa fille. Mais le vent tourne, Adalgisa vit désormais dans une nouvelle maison, avec un autre homme — qui lui a fait un bébé. L'Arminuta n'est pas au courant de ces événements. Sa mère biologique retrouvée lui parle peu et lui cache ce qu'elle sait. Son père qui travaille dans une carrière est un taiseux qui a tout d'un abruti violent. Seul le frère aîné, Vincenzo, la regarde déjà comme une femme, lui parle et cherche à la distraire voire à la séduire. Quand il trouve la mort dans un accident de moto, l'Arminuta voit croître son désir de quitter cette maison désespérante et arriérée, et peut-être même de fuir avec la petite Adriana.

 

La tension psychologique est bien présente, dès le début du film et jusqu'à la fin, ce qui n'exclut de rares scènes qui provoquent le sourire, car Adriana est fort spontanée dans son attitude et ses répliques. L'Arminuta est donc tiraillée entre ses deux mères et tout le suspense du film repose sur cette incertitude : y a-t-il moyen de retrouver la mère « adoptive », y a-t-il espoir de trouver un sentiment maternel chez sa mère selon l'état-civil ? Le village ou la ville ? En attendant une issue, l'Arminuta entasse les succès scolaires. Très beau film, âpre comme les paysages des Abruzzes, avec une habileté certaine pour traiter des différences sociales des deux familles, et dans une distribution très réussie.

 

 

L'Arminuta, film de Giuseppe Bonito, 2021, 1h 55 mn. D'après le roman homonyme de Donatella di Pietrantonio qui a reçu le prix Campiello en 2017, roman dont la traduction de Nathalie Bauer est parue au Seuil en 2018 sous le titre La Revenue.

 

Tag(s) : #AU CINEMA, #ITALIE
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