Ainsi qu'il est dit d'emblée la fonction du symbole est de « mener l'esprit du matériel au spirituel, de lui faire outrepasser les limites de son monde ordinaire pour entrevoir une vérité seconde ».
Cette passionnante étude de vingt symboles en peinture, signée par une spécialiste de l'histoire de l'art, se développe à travers 68 œuvres présentées dans une double approche : « le répertoire de la nature » et « l'éloquence des objets ». Chaque symbole est approché généralement depuis une œuvre ancienne, le plus souvent de la Renaissance, avant d'aborder deux ou trois déclinaisons plus modernes. Chaque thème symbolique donne ensuite lieu à une double page de « repères » qui me semble constituer l'élément le plus instructif par ses analyses et utile par ses références.dans
Pour plus de clarté tenons-nous près de la Fenêtre — c'est l'un des thèmes retenus. L'auteure présente en premier une œuvre de Rembrandt, Tobie rendant la vue à son père, de Rembrandt, puis Femme à la fenêtre de Caspar David Friedrich, et La Salle à manger sur le jardin de Pierre Bonnard, et enfin Une fenêtre de Robert Delaunay. L'ensemble est suivi en double page de repères de six petites notices explicatives du symbole : l'ambivalence de la fenêtre, la fenêtre symbole du Christ, la fenêtre symbole de la Vierge, la fenêtre reflétée, la fenêtre entre vie et mort, le tableau fenêtre ouverte. Comme on le voit à cette énumération, l'auteure se place nettement dans « la tradition chrétienne » et « son héritage classique », comme elle le précise d'ailleurs dès l'introduction.
Allégorie, Karel Dujardin, 1663, Statens Museum for Kunst, Copenhague
Ce beau livre illustré révèle des choix très personnels tant pour les sujets abordés — on se laisse surprendre par le thème de l'Échelle — que pour les œuvres que l'on découvre — comme ci-dessus l'œuvre de Dujardin illustrant le thème du Coquillage — et surtout on sera enchanté ou désorienté par la subjectivité des commentaires qui les accompagnent. Qu'on en juge ! — c'est à propos d'Improvisation III de Kandinsky (1909, Centre Pompidou) pour illustrer le symbole du Cheval :
« Il lance son destrier au galop. Et ce qu'il laisse derrière lui se meurt de vieillesse : la minutie des anciennes images, les descriptions et les arguments des anciens théâtres, ne sont plus que les ombres fuyantes et bientôt effacées. Les princesses se sont endormies pour toujours et n'ont plus peur des dragons usés à la tâche...»
Pourtant rien ici n'évoque saint Georges terrassant le dragon pour sauver la princesse, mais un cavalier franchissant un pont. Comme si le sentiment personnel se confondait parfois avec un poème en prose.
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Tout, dans cet ouvrage, est fort gracieux, intelligent et instructif. Un seul bémol : les passionnantes doubles pages de repères sont imprimées en une police au corps bien subtil et sur un fond d'une franche couleur orangée ou bleue si bien que le lecteur est à la peine même sous une lumière blanche et crue. Accéder au savoir ne se fait pas sans effort...
• Françoise Barbe-Gall : Comprendre les symboles en peinture. Éditions du Chêne, 2009, 311 pages.