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En quittant le tankiste Kostia à la fin du XXe siècle, l’auteur de La Soif a trouvé un nouveau héros en plein XIXe siècle et c'est le marin Guennadi Ivanovitch Nevelskoï, personnage qui a réellement existé comme il s'en trouve dans tout bon roman historique.
 

Navigation

La Rose des vents s’ouvre à l’opéra de Lisbonne sur un spectacle auquel assistent le grand duc Konstantin, fils de Nicolas Ier, âgé de bientôt vingt ans, et le lieutenant de vaisseau Nevelskoï qui lui sert de précepteur, de chaperon et parfois même de garde du corps. Les deux hommes sont à bord du vaisseau amiral d'une escadre qui vient de croiser en Méditerranée et que commande le vice-amiral Lütke, fondateur de la Société russe de géographie après avoir accompli un tour du monde à bord de la corvette Séniavine. Naviguer de Kronstadt au Pacifique nord, en passant par le détroit de Magellan, côtoyer des personnages aussi variés qu’un grand-duc et des demoiselles de l’aristocratie à l'Institut Smolny, des bagnards en fuite et des indigènes belliqueux sur les rives de la mer d’Okhotsk, telles sont les raisons d'être de ce roman nourri de faits véridiques.

 

Géopolitique

Le lecteur apprécie d'être transporté à ce moment de l'histoire, vers 1848, quand le contrôle de certaines terres lointaines met en compétition Russes et Britanniques. Ils appellent ça le Grand Jeu. Dans ce roman il s'agit spécialement du bassin de l'Amour et de l'île Sakhaline. Cent cinquante ans plus tôt, par le traité de Nertchinsk, l'empire russe en avait reconnu la souveraineté chinoise. Or le déclin de la Chine avec la guerre de l'opium et l'insurrection des Taiping invite le gouvernement du tsar à réviser ses prétentions. À cette époque, la Russie possède encore l'Alaska et s'intéresse au commerce des fourrures, et le seul port de Petropavlosvk, en baie d'Avatcha au sud du Kamtchatka sert d'escale au trafic de la zibeline en route vers Moscou ou vers la Chine. Or, il se pourrait que les Britanniques s'y aventurent à la faveur de la faiblesse chinoise et de la quasi-absence russe. Le patriotisme russe commande donc d'intervenir !
 

Intrigues

Avant de se voir confier une mission d'importance — sonder les côtes, reconnaître l'estuaire de l'Amour, confirmer que Sakhaline est une île... — Nevelskoï est pris en main par un agent du ministre de l'Intérieur Perovski. Venu le contacter à Lisbonne, le mystérieux et efficace Semenov débarque avec lui à Portsmouth et le conduit à Londres de manière à mieux le jauger avant de regagner Saint-Petersbourg alors centre du pouvoir. Là, chez la grande duchesse Elena, Nevelskoï est mis en relation avec Zarine et Mouraviov qui auront bientôt la responsabilité civile et militaire de la Sibérie orientale. Les conflits entre ministères russes et le choix d'un chantier naval sont susceptibles de retarder l'expédition. Il en va de même avec les rumeurs sur la personnalité de Nevelskoï. Suite à une vilaine affaire de meurtre d'une domestique serve qui a conduit à l'inculpation de sa mère et de son beau-frère certaines personnes influentes se demandent si l'on peut-on faire confiance à cet officier célibataire — qui vient certes de passer dix années à servir le grand-duc Konstantin. Mais puisqu'il est célibataire, Zarina se demandera s'il ne conviendrait pas de lui faire épouse sa nièce Katia, encore pensionnaire de l'Institut Smolny, surtout que celle-ci attire le regard de Tiouttsev, un proche du ministre des affaires étrangères Nesselrode, lui-même davantage soucieux des intérêts de la Compagnie Russo-américaine qu'intéressé par l'extension de l'empire vers l'Extrême-Orient au détriment de la Chine. C'est ainsi que la rivalité s'étend de la sphère privée au monde politique...

 

Influences

Lecture faite, impossible de ce pas penser à ce roman si célèbre en Russie qui s'intitule Michel Strogoff et qui conduit notamment de Nijni Novgorod — où Jules Verne a aujourd'hui sa statue — à Irkoutsk ville natale d'Andreï Guelassimov. Dans chacun de ces romans d'aventures en plein XIXe siècle, le héros côtoie à la fois la haute société tsariste et des bandits en Extrême-Orient et c'est là évidemment que Guennadi Ivanovitch Nevelskoï va risquer sa vie. 

 

Andreï Guelassimov : La Rose des vents. Traduit par Raphaëlle Pache. Editions des Syrtes, août 2021, 431 pages.

 

Tag(s) : #LITTERATURE RUSSE
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