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Vous feuilletez Géo ou National Geographic, vous admirez les images édéniques des parcs naturels sur Ushuaia ou Voyage et vous croyez admirer une Nature naturellement vierge, parfaite et authentique... Quelle erreur ! Guillaume Blanc que passionnent l’Afrique et l’histoire de l’environnement vient tout démystifier...

 

Les parcs naturels africains attirent certes les trekkers, les documentaristes et les amateurs de safaris photos. Mais à quelles conditions pour les habitants du pays ? Un certain esprit colonialiste y a survécu aux indépendances en matière de gestion des parcs naturels. Même en Éthiopie qui n’a jamais été colonisée, l’État s’est plié aux directives des organisations internationales et des ONG dont les experts ont hérité des préjugés et certitudes des anciens fonctionnaires coloniaux qu'ils étaient : en Afrique la nature est d’une richesse exceptionnelle mais faune, flore et panoramas sont menacés de destruction par les habitants.

 

Cultures et pâturages auraient provoqué une déforestation effroyable sur les hauts-plateaux. Le Walia ibex, une sorte de bouquetin qui galope vers 3000 ou 4000 mètres, serait menacé de disparition dans le parc du Simien en Éthiopie : il faut en chasser tous les habitants et recruter des gardes pour tirer sur les habitants qualifiés de braconniers. Dès les années 60, là comme ailleurs en Afrique, l’UNESCO à recommandé, pour l'inscription des parcs naturels du Simien, d'Omo et d'Awash que les populations en soient expulsées. Et durant un demi-siècle de pressions répétées, dans une Ethiopie passée du pouvoir du Négus à celui d'une dictature marxiste puis à ses vainqueurs, le discours a été le même et les tentatives pour expulser les autochtones se sont multipliées.

 

Tandis qu'en réalité le parc du Simien abritait de plus en plus de Walia ibex en dépit du discours des experts qui les disaient menacés, et de plus en plus habitants, en juin 2016 les autorités ont fini par réussir à déplacer la plupart de la population, pasteurs et cultivateurs, vers une ville de périphérie où on leur conseille de se reconvertir dans d'autres activités. Guillaume Blanc est allé sur place voir les résultats ou plutôt constater les dégâts. Chassés vers les villes, les anciens du Simien sont devenus des pauvres sans ressources et ils ne pensent qu'à détruire l'administration du Parc naturel pour s'y réinstaller.

 

« Quels qu'ils soient, où qu'ils soient, les conservationnistes ressassent systématiquement la même injonction : pour sauver la nature africaine, il faut empêcher ses habitants d'y vivre » constate l'auteur pour qui le « développement durable » ne serait qu'un piège accompagné d'une fiction, car la gestion participative du parc avec la communauté des habitants est un leurre.

 

Très documenté, le travail de Guillaume Blanc ne peut que nous alerter sur le rêve d'un Éden factice, où la Nature serait conservée, alors qu'à l'extérieur de l'Afrique l'anthropisation destructrice sévit intensément.

 

• Guillaume Blanc. L'invention du colonialisme vert. Pour en finir avec le mythe de l'Éden africain. - Flammarion, 2020, 343 pages.

 

Tag(s) : #AFRIQUE, #ESSAIS
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