
El Greco qui n'était pas seulement grec mais crétois et donc né sujet de Venise a fait carrière à Tolède. C'est là que Leonor de Récondo est venue passer une nuit au musée qui lui est consacré dans l'ancienne capitale de Castille. L'auteure est musicienne et aime les artistes. Son père était peintre et sculpteur. Elle a écrit sur Michel Ange (Pietra Viva) dont le Gréco aurait dit qu'il était « un honnête homme, mais ne savait pas peindre ». Or, justement, la manière d'El Greco séduit totalement Léonor de Récondo. Equipée de son violon, elle vient à sa rencontre en plein été caniculaire… comme à un rendez-vous amoureux.
Cet ouvrage de commande brille par sa composition qui mélange plusieurs thèmes : la chaleur de l'été, l'éducation artistique de l'auteure, la vie sentimentale du Gréco en Crète et à Tolède, et bien sûr l'évocation des tableaux du peintre. Ceux du musée castillan, notamment une Vue de Tolède, et ceux des églises locales. L'enterrement du comte d'Orgaz — mis au tombeau par les saints Etienne et Augustin ! — à la chapelle Santo Tomé, L'Espolio ou partage de la tunique du Christ à la cathédrale, le retable de Santo Domingo el Antiguo où selon certains reposerait ou aurait reposé le corps du peintre.

Son art pictural si différent des baroques d'Italie, qui ignore les ciels au pâle bleu azuréen, qui n'idéalise pas ses personnages, qui emploie beaucoup de couleurs pures sur des fonds sombres, et qui étire les visages, Léonor de Récondo l'a traqué à la lumière de son téléphone, dans les salles du musée.

Le titre de ce petit livre est un clin d'œil aux Leçons de ténèbres, genre musical qui accompagnait les offices de la Semaine sainte au XVIIe siècle, mais ici au singulier c'est plutôt une leçon particulière dans la nuit du musée, dans une belle écriture, à la fois simple et élégante.
• Léonor de Récondo : La Leçon de ténèbres. - Stock, coll. Ma nuit au musée, 2020, 148 pages.
(NB. L'ouvrage ne contient pas de reproductions de tableaux).