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C'est par petites touches, par fragments, parce que « les choses se ressentent plus qu'elles ne se montrent » que Fatima Daas suggère, en de brèves phrases dépouillées, sa difficulté à trouver son identité, son combat contre elle-même et face au regard des autres.
« Je m 'appelle Fatima » : cette réitération à l'ouverture de la plupart des courts chapitres marque l'angoisse identitaire de « la petite dernière », qui porte le nom de la plus jeune fille du prophète, « un nom qu'il ne faut pas salir ». Troisième fille de la fratrie elle ne connut guère l'affection parentale. Son père espérait un garçon ; sa mère ne voulait pas de nouvel enfant et l'a portée comme le coup du mektoub, du destin. La fillette développa très jeune un fort sentiment de culpabilité : « Je suis une erreur, un accident. Je m'en veux d'être née » déplore-t-elle. Dès l'âge de douze ans, gamine « perturbée et inadaptée », elle provoquait les professeurs et cherchait la bagarre avec tous, ne se sentant ni fille ni garçon. Banlieusarde de Clichy-sous-Bois elle entama des études supérieures qu'elle abandonna pour devenir écrivain.
L'amour de Gabrielle et Cassandra l'apaisait mais c'est avec Nina son inspiratrice, qu'elle connut un moment la plénitude. Coupable de « salir son prénom », anxieuse de n'être pas « une bonne, une vraie musulmane » elle chercha des réponses dans le Coran et auprès des imams. Peine perdue. La petite dernière était harcelée par son « âme », son double qui « l'incite au mal » et hantée par la crainte de faire honte à ses parents.
Fatima a finalement trouvé dans l'écriture cette stabilité tant recherchée pour s'assumer : « Ça raconte l'histoire d'une fille qui n'est pas vraiment une fille, qui n'est ni algérienne ni française, ni clichoise ni parisienne, une musulmane je crois, mais pas une bonne musulmane, une lesbienne avec une homophobie intégrée ».
Ce récit autobiographique, émouvant et dépouillé, témoigne de la douloureuse situation de celles et ceux qui tentent d'exister hors des normes.
• Fatima Daas. La petite dernière. - Notabilia/Noir sur blanc, 2020, 186 pages.
Chroniqué par Kate