Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

C'est une Antiquité qui va de la Mésopotamie à l'Empire romain en passant par la Grèce que ce petit livre permet de réviser sans prise de tête.

Feuilletons donc ce vademecum.

Fatalement, les vingt-et-une idées reçues examinées par l'historien Pierre Cabanes ne sont pas nécessairement celles auxquelles vous auriez pensé.

« Les Phéniciens étaient un peuple de marins-marchands » : oui, bien sûr ! D'ailleurs les Libanais ont su garder leur habileté. Et en plus ils ont inventé un alphabet consonantique. Ce sont les Grecs qui ajoutèrent les voyelles. Adieu l'écriture cunéiforme !

« Les dieux sont les compagnons des humains en Grèce ancienne ». Ben, aujourd'hui on n'a plus cette chance.

Plus décoiffant, « La Cité est l'Etat grec par excellence » est l'occasion de rappeler que tous les Grecs ne vivaient pas dans de petites cités fortifiées gouvernées par le demos , qu'il y avait diverses sortes de gouvernement, et qu'au nord de la Grèce existaient des royaumes plus vastes, comme la Macédoine, avec des bergers pratiquant la transhumance qui n'auraient jamais pu aller trois fois par semaine à l'assemblée des citoyens comme les Athéniens sur la Pnyx.

« La femme a un statut de mineure dans la Grèce ancienne » : nuancer s'impose et ce n'est pas Aristophane qui me contredira. Mais, qu'en était-il dans l'Egypte pharaonique, en Gaule ou à Rome sous la République ?

« Alexandre le Grand a répandu la culture grecque par ses conquêtes ». Oui. Et même jusqu'à l'Indus. Pas étonnant s'il y a des Japonais férus de culture grecque et plus de professeurs de grec au Japon d'aujourd'hui qu'en Angleterre (cf. Michael Lucken, Le Japon grec. Culture et possession, Gallimard, 2019).

« Caton a refusé l'hellénisation de Rome ». Non, là il va falloir nuancer. Mais ce ne serait pas le seul Romain à se méfier des Grecs, surtout philosophes, orateurs et médecins. Il craignait pour sa virtus. L'ironique Plaute, nous rappelle l'auteur, les qualifie de graeculi, de petits Grecs.

Et César, et Auguste ? L'auteur n'oublie pas le rôle du premier qui a cassé la République romaine, et du second qui a fondé l' « empire » tout en prétendant rester le premier des sénateurs, le « Princeps », sans oublier le culte impérial qui a multiplié les statues d'Auguste. On en a même trouvé une dans le Rhône devant Arles.

« La civilisation romaine est supérieure à celle des Grecs » : pas sûr que ça vienne spontanément à l'esprit quand on a fait un peu de philo ! D'ailleurs la partie orientale de l'Empire a tenu le coup plus longtemps que la partie occidentale qui parlait latin et qui dès le Vè siècle était aux mains des diverses tribus « barbares » ; elles frappaient depuis longtemps à la porte de l'empire.

Quand beaucoup rendent hommage à Constantin, le grand empereur qui ouvrit la porte du pouvoir à l'Eglise et aux chrétiens, notre auteur, lui, fait la promotion de son prédécesseur Dioclétien, ce brave soldat Dioclès auquel Jacques Audiberti fit une réputation au théâtre. Pierre Cabanes a bien raison, Dioclétien a réussi à réformer le système de gouvernement avec la Tétrarchie : quatre têtes au sommet de l'Etat, comme le voit le visiteur qui entre au palais des Doges. Et puis après avoir régné vingt ans, il prit sa retraite sur la côte adriatique. Même pas Grec, Illyrien ! C'était quand même une sorte de sage même si les chrétiens d'alors ne devaient pas être de cet avis.

Enfin il y a un point qui fait réellement l'unanimité. Tous avaient leurs esclaves. Les Mésopotamiens, les Egyptiens, les Phéniciens (en plus ils en faisaient commerce), les Gaulois, les Romains, etc. Et ça a continué après la chute de Rome !

 

• Pierre Cabanes. Idées reçues sur l'Antiquité. Le Cavalier bleu, 2è édition, mars 2019, 211 pages.

 

Tag(s) : #ANTIQUITE
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :