Quand les amis s'en vont vers d'autres villes, quand de vieux pâtés de maisons sont démolis, quand l'inspiration tarde à venir, on comprend que pour Khalid, le principal personnage de ces Derniers jours d'une ville, le temps soit à la mélancolie.
Le réalisateur Tamer el Said a réuni un groupe de trentenaires qui tournent en rond mais sont de bonne compagnie. Ils sont bientôt décidés à quitter Le Caire alors que le régime de Moubarak réprime ses contestataires et que les radios rabâchent des informations officielles. S'ils ne sont pas militants eux-mêmes c'est qu'ils n'attendent plus rien de leur pays. Khalid, lui, restera dans la métropole, auprès de sa mère hospitalisée, s'apprêtant seulement à déménager si jamais il trouve un deux-pièces abordable et en bon état. Il doit aussi tenter de terminer son film qui tient du journal intime et ça ne semble guère plus facile, si bien qu'un soir on craint que Khalid ne se suicide.
Après son pote Bassem parti à Beyrouth, d'où il lui poste des images de bord de mer, c'est au tour de sa belle amie Maryam de décider de partir, de quitter cette ville étouffante et extrêmement bruyante. Ce sont les klaxons assourdissants que le spectateur risque de retenir plus que quelques airs de musique arabe.
Le sentiment de malaise est souvent recherché par des cadrages imparfaits, ou souligné d'un gros plan exagéré sur un visage, sans oublier le recours au flou artistique d'une scène de rue ou d'un intérieur. Curieusement, ces procédés n'enlèvent rien à la beauté de l'image tandis qu'une fréquente coloration de soleil couchant sinon de pollution atmosphérique ajoute à la poésie un peu triste des lieux.
Humour ou pessimisme, une ambiguïté géniale est offerte par la succession des plans d'une vitrine de magasin de vêtements féminins : les mannequins dans leur nudité seront un peu plus loin cachés par des journaux collés sur la devanture, avant d'être recouverts des robes noires à la mode islamiste. Le film se termine sur une belle calligraphie.
• Les derniers jours d'une ville. Film de Tamer el Said. 1H 40. 2010.