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Selon P. Picq, spécialiste d’anthropologie évolutionniste, — science de la Terre, de la Vie et de l’Espace —, l’homme résulte d’une longue coévolution avec d’autres organismes vivants, comme les grands singes, quant à ses gênes ou ses capacités cognitives, et reste inséparable de son environnement naturel. Si Homo Erectus a marqué le début de notre deuxième coévolution, nous entamons la troisième avec la révolution numérique et entrons dans une nouvelle ère : l’Anthropocène, « l’âge de l’Homme ». Ce terme désigne « l’impact significatif des activités humaines sur la nature, le climat et la biodiversité ».

Est-ce une nouvelle phase d’évolution de l’humanité ou une rupture de cette évolution ? P. Picq invite à y réfléchir et nous fait découvrir les différentes tendances des transhumanismes et post-humanismes. Va-t-on seulement, grâce aux nouvelles technologies, prolonger les vivants, améliorer nos potentialités grâce aux progrès des techniques comme le prétendent les transhumanistes évolutionnistes ? Ou allons-nous entrer dans un nouveau monde où l’homme sera libéré de sa condition animale et dégagé des contraintes héritées de son évolution ? C’est le projet de la principale mouvance transhumaniste. Elle ne tient compte ni de l’évolution anthropologique, ni de la nature, ne se soucie que de technologies et vise à couper le cordon qui rattache l’homme à toutes autres formes de vie. Même si ce courant de pensée heurte l’anthropologie il faut le prendre au sérieux selon l’auteur car il nous oblige à regarder en face notre devenir.

« Je ne suis pas un décliniste et encore moins un pessimiste » précise P. Picq, juste un lanceur d’alerte en quelque sorte.

On ne peut nier que nous atteignons les limites de notre évolution ! Comme le notait Diamond dans « Effondrement », toutes les civilisations s’écroulent sous le poids de leur succès ; plus l’espèce humaine domine, plus elle détruit ses environnements et s’autodétruit faute de n’avoir pas fait évoluer les valeurs qui ont permis sa suprématie

Tout s’aggrave : l’extrême vieillissement de la population des pays développés, les inégalités sociales, « la destruction des écosystèmes, l’effondrement des diversités (...) l’urbanisation exponentielle des mégapoles ». Dans les pays de l’hémisphère Nord, mais pas seulement , « les indices de qualité de vie des personnes déclinent : perte de libido, baisse du Q.I., surpoids et obésité, régression de nos sensibilités »...

Face à cet état de fait ,le transhumanisme envisage la procréation assistée et l’eugénisme positif : les parents choisiraient le caractère et le physique de leur enfant. L’homme génétiquement modifié par des prothèses ou un exosquelette serait une solution pour repousser le vieillissement en dépassant les contraintes biologiques et cognitives. Cet homme augmenté ne serait point esclave des robots qui ,au contraire, l’aideraient à s’accomplir sans aucun lien avec la nature, et même sur d’autres planètes comme Mars.

Sans aller jusqu’au transhumanisme extrême qui propose de supprimer la mort par cryogénisation et uploading (transférer le cerveau dans une machine), cette forme de pensée rejoint l’esprit de l’humanisme classique fondé sur la liberté de l’homme, sur sa capacité à s’accomplir en dépassant limites et contraintes.

Or, martèle P. Picq, il faut en finir avec cet anthropocentrisme, avec le mépris des altérités animales, végétales ou douées d’intelligence artificielle : la coévolution n’a jamais visé que le triomphe du seul homme blanc ! Nous avons oublié Darwin : sans diversité nos chances d’adaptation diminuent.

Il faut aussi en finir avec l’idéologie du progrès, tendu selon la flèche du temps vers un monde toujours meilleur une fois l’homme « rendu maître et possesseur de la nature » : car rien ne peut nous arracher à notre condition biologique, ni jamais éradiquer la contingence, la mort , les microbes et les catastrophes naturelles.

À l’inverse du Japon, de la Chine et de l’Angleterre, la France doit combler son retard et accorder droits et considération aux animaux comme aux robots.

Le programme transhumaniste « nous incite à nous informer et à réfléchir aux révolution technologiques en cours » (...) « La France et l’Europe occidentale doivent se réveiller et prendre conscience des bouleversements en cours … et plus particulièrement l’Afrique ». Grâce au dialogue fictif avec une lycéenne africaine, P. Picq rend accessible au plus grand nombre des notions complexes et inouïes. Nul ne peut rester indifférent à ses propos.

 

Pascal Picq. Le nouvel âge de l'humanisme. Allary Éditions, 2018, 329 pages.

 

Chroniqué par Kate

 

Tag(s) : #SCIENCES SOCIALES, #ESSAIS, #ANTHROPOLOGIE
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