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Connu depuis les années 70 sous le pseudonyme de Simon Leys, Pierre Ryckmans (1935-2014) enseigna la littérature en Australie. Depuis les années 80 jusqu'à sa mort, il échangea une correspondance avec son ami Pierre Boncenne, belge comme lui, mais qui habitait aussi en France.

Le traducteur des Entretiens de Confucius a bien sûr des pistes à nous proposer qui concernent l'approche de la culture chinoise. La plus surprenante est sans doute de conseiller les romans policiers de Robert van Gulik qui fut ambassadeur des Pays-Bas en Malaisie et joua un grand rôle dans l'initiation du jeune Ryckmans à la civilisation du Céleste Empire.

Pour beaucoup, Simon Leys reste le magistral dénonciateur des crimes de Mao et de la sottise du « maoisme mondain » de ses propagandistes occidentaux. Il est bien sûr question de cela dans ce recueil de correspondances reçues des Antipodes, et de bien d'autres sujets !

 

Ces lettres dévoilent en fait les différents habits du professeur Ryckmans. C'est un homme non seulement passionné de culture chinoise, mais aussi de la vie de l'esprit et de la bonne littérature. Boncenne reçoit ainsi des conseils de lecture dont nous profitons à notre tour. Céline, Cioran, Tchékov, Vargas LLosa figurent au nombre de ses auteurs préférés, mais aussi une pléiade d'auteurs de langue anglaise : Barnes, Coetzee, Conrad, Fowles, McEwan, Naipaul, Waugh entre autres. Toujours des titres de qualité supérieure.

Ça et là on voit surgir de fulgurants traits d'esprits et des jugements terribles. On découvre un intellectuel qui ne cache pas ses inimitiés (Badiou, Sartre…) et son admiration pour Jean-François Revel : « Une grande cause de l'impopularité de Revel auprès des imbéciles, c'est sa clarté ».

A propos d'un texte de Badiou : « On ne peut même pas dire que c'est idiot (ce qui supposerait encore un certain contenu susceptible d'être commenté) : c'est simplement opaque à propos de RIEN. »

A propos de Sartre : « C'était un vieil adolescent irresponsable et hurluberlu... l'erreur était certainement de le prendre pour un Sage et un Guide. » Et plus loin : « d'un autre côté, les Sartre, de Beauvoir & Co n'ont jamais été inquiétés pour tout l'encens qu'ils ont brûlé devant leurs sanglantes idoles communistes durant un bon quart de siècle... »

Mais Simon Leys sait très bien opposer la qualité d'une œuvre littéraire et la faiblesse voire la bassesse personnelle de son auteur : voyez Rebatet, Céline, ou encore Garcia Marquez.

 

Cette correspondance choisie permet enfin de découvrir un homme amoureux des îles et de la mer, en train de préparer une anthologie sur La mer dans la littérature française et Les Naufragés du Batavia — ce qui l'amène à envoyer des requêtes à son ami Pierre Boncenne.

Bref, un livre à déguster sans modération !

 

Simon Leys. Quand vous viendrez me voir aux Antipodes. Lettres à Pierre Boncenne. Editions Philippe Rey, 2015, 189 pages.

 

 

Tag(s) : #LITTERATURE FRANÇAISE
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