
Les personnages principaux appartiennent au monde du journalisme. Le quotidien El Tribuno, dirigé par Lorenzo Rinaldi s'intéresse aux faits divers, et dans le cas précis au meurtre d'un habitant de La Maravillosa, un certain Pedro Chazarreta, veuf depuis trois ans, et soupçonné d'avoir assassiné sa femme, Gloria Echagüe. Jaime Brena est proche de la retraite et son poste a déjà été pourvu par « le gamin des faits divers » — on ne connaîtra pas son nom — et ils vont constituer un duo d'enquêteurs, renforcé par la romancière Nurit Iscar, alias Bétibou, jadis maîtresse de Rinaldi qui lui demande de travailler de nouveau pour son journal en rédigeant une chronique depuis l'intérieur du country club où elle s'installera avec des copines.
La où la police, toujours représentée par le commissaire Venturini, ne veut voir que des suicides ou des accidents dans la disparition de Chazaretta et de ses amis, la bande d'El Tribuno échafaude une théorie bien plus complexe après avoir inspecté minutieusement la scène de crime. Une photographie enlevée d'un cadre, le témoignage d'une femme de ménage sur cette photographie, ainsi que des rencontres — dont on ne dira rien ici — permettent à l'équipe de presse de reconstituer toute cette sombre affaire, et de trouver une explication inattendue à la série des assassinats.
Le roman, rédigé de manière remarquablement précise, est enrichi par les discussions entre le gamin des faits divers et son aîné et bientôt modèle, Jaime Brena. Ils s'opposent au début par leur manière de travailler : Internet et les réseaux sociaux pour l'un, le terrain pour l'autre, mais leur complémentarité va payer. Le roman en constitue d'ailleurs une sorte d'illustration pédagogique.
Plus encore que dans Les veuves du jeudi, l'auteure multiplie les remarques critiques contre les excès sécuritaires ridicules des gardiens du country club, d'ailleurs incapables d'empêcher trois assassinats successifs dans leur zone de compétence.
• Claudia Piñeiro. Bétibou. Traduit par R. Magras. Actes Sud, 2013. 395 pages.