Pascal, le narrateur, est un enseignant qui a loué un gite rural pour passer l'été. Il a invité la fille d'un collègue, Margaux qui vient d'obtenir son bac et rêve de poésie. Tous deux ont prévu de mettre à profit cette retraite campagnarde pour lire tout à loisir. Mais très vite, ils font la connaissance de leur voisin Florin, « l'homme qui ramassait des cailloux » pour se souvenir de ses aventures passées ; il les stocke dans des bocaux numérotés, année par année. Ce trio va passer bien des soirées à se raconter des histoires : chacun se souvient et Florin encore plus que les autres. Le roman enchaîne ainsi les récits, drolatiques ou tragiques, révélant chez l'auteur un formidable sens de l'imagination. Les deux hommes aiment fumer la pipe et vider des bouteilles de bon vin, deux choses bien connues pour stimuler l'envie de raconter des anecdotes.
Comme il se doit, le passé de Florin est riche d'aventures diverses tant le personnage a roulé sa bosse. Florin prétend avoir découvert au Chili la variante d'un jeu de carte, le capateros, d'où le titre du livre. À la suite d'une partie particulièrement disputée avec trois compagnons de jeu, il est devenu propriétaire de la maison que jouxte une piscine désormais pleine de terre pour cultiver des légumes. Ces quatre compagnons de jeu avaient des passé bien chargés... Ils forment l'essentiel du livre. L'un des récits les plus intrigants tourne autour de cette piscine qui n'en est plus une : l'ancien propriétaire, Alphonse, avait cru réaliser un crime parfait en dissimulant le corps de l'épouse adultère sous la chape de béton. Un autre plus “gore” évoque des trafics au sein d'un cimetière. Vous apprendrez aussi pourquoi Jorge Luis Borges n'a pas eu le prix Nobel. Mais ne dévoilons pas davantage ces textes riches de suspense.
Le passé de Margaux n'est pas simple non plus car elle a indirectement causé la mort accidentelle de sa mère, une dizaine d'années plus tôt, dans une piscine aussi, sans compter la façon dont elle s'est farouchement défendue d'une tentative de viol en blessant son agresseur si gravement qu'il pourrait porter plainte. Mais Florin a encore des “relations” capables de la tirer de ce mauvais pas. En revanche, ce que ne savent ni Florin ni Pascal, c'est apprendre à Margaux comment conduire de nuit quand tous ont longuement sacrifié à la dive bouteille.
Bref, un roman léger et fort distrayant.
• Pierre Raufast. La variante chilienne. Alma, 2015, 262 pages.