
Ils sont trois garçons de douze ans : Franco, Giulio et Maurizio. Ce dernier séjourne chez ses grands-parents, tandis que ses géniteurs partent gagner leur vie sur le continent. Les trois gamins vont à l'étang construire des radeaux, contempler les oiseaux et chercher à les piéger ou explorent l'égout qui longe l'église ; le dimanche ils officient comme enfants de chœur. Cela ne les empêche pas de faire brûler des rats devant l'église à la Pentecôte !
Quand l'évêque décide de scinder la paroisse en deux entités, Santa Maria et Sacro Cuore, l'atmosphère locale devient explosive. Après avoir entendu dire « nous » pour désigner le collectif des familles ou des habitants, Maurizio découvre un changement dans les conversations des anciens, le soir sur les chaises basses sorties sur les trottoirs : il s'étonne de ces « eux » et de ces « ils » qui sanctionnent la division soudaine de la communauté. C'est ainsi que se prépare la guerre des saints.
La fête de la Rencontre se déroule selon une coutume séculaire : au terme d'une procession double, les statues de la Vierge éplorée et du Christ ressuscité se rencontrent sur la place centrale de Crabas. La partition décidée par les autorités religieuses et l'ambition de don Gigi à la tête de la nouvelle paroisse risquent de gâcher la fête qu'attendent les habitants, même les moins pieux. La rivalité qui anime les garçons n'est pas de bonne augure depuis que l'un d'eux a rejoint la paroisse sécessionniste.
Pourtant, dans cette longue nouvelle qui ne prend jamais vraiment des allures de Clochemerle malgré la possibilité qu'offre le sujet, la sagesse prend naissance paradoxalement chez ces gamins qui paraissaient prêts à rejoindre l'affrontement collectif. Telle est la morale de l'histoire.
• Michela Murgia. La guerre des saints. Traduit par Nathalie Bauer. Seuil, 2013, 114 pages (L'incontro. Einaudi, 2012)