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A Champigny-sur-Marne, près de Créteil, Ahmed Dramé cumulait, disait-on, trois handicaps : jeune, de banlieue et noir. Or, « (il) avait de la chance mais (il) ne le savait pas ». Car pour l’accompagner sur son chemin de vie, les fées avaient diligenté des passeurs. Sa mère, émigrée du Mali pour offrir un avenir à ses cinq enfants qu’elle élevait seule ; femme courageuse, elle vénérait l’école républicaine, seule voie de salut. Bakary, un vrai grand-frère, substitut du père, bienveillant et généreux, servit de modèle à Ahmed et lui apprit à dénouer les embrouilles par la parole, sans violence. Ainsi à dix ans, il se révolta contre toute injustice, contre « l’impuissance des faibles soumis au pouvoir arbitraire des forts ».

Vint la première épreuve, le passage en Seconde générale. Malgré des résultats meilleurs que ceux d’un copain blanc, le conseil de classe refusait à Ahmed la voie qu’il désirait. Sa mère combattit proviseur et professeurs ; son fils intégra une Seconde générale, fier de dire : « je n’’ai pas été orienté », une exception pour un jeune de banlieue. Mais la classe se révéla ingérable et tous les enseignants s’en désintéressèrent, sauf Mme Anglès,  la professeur d’Histoire. Exigeante, autoritaire, elle imposa le respect à tous les élèves car elle savait les écouter, les comprendre et « avait envie de les aider ». Elle eut l’idée géniale de présenter la classe au concours de la Résistance :  « Enfants et adolescents dans le système concentrationnaire nazi ». Le choc !! En découvrant l’horreur des camps et du génocide, les élèves prirent conscience que « leurs embrouilles, leurs peurs semblaient, en comparaison, parfaitement dérisoires ».

Puis Léon vint. Survivant d’Auschwitz, il raconta en classe ses années de camps et la perte des siens. Il avait survécu parce qu’il « s’était adapté « à l’inhumain, sans jamais perdre sa dignité d’homme. Lui aussi était une exception. Il leur apprit à ne jamais oublier que la haine « défigure l’humain », et que la bête immonde qu’engendrent l’antisémitisme et le racisme peut se réveiller aujourd’hui encore. La Seconde tant décriée gagna le concours grâce à ce professeur qui lui avait « transmis le sens des autres ».

Son bac obtenu, Ahmed rêvant de devenir acteur, écrivit un scénario inspiré de son année de Seconde. Une réalisatrice l’apprécia, grâce à elle le jeune homme triompha de la dernière épreuve !! Le film, « Les Héritiers » est à l’affiche.

Moralité ? « On peut toujours sortir de la cité. Les enclaves, c’est nous qui les créons » affirme Ahmed. Il a découvert qu’il n’était pas une exception ; chaque homme, avec ses forces et ses limites, en est une. Et tous, « Blanc, noir ou juif, nous avons la même peau ». Un début dans la vie comme un beau conte de Noël !!

 

• Ahmed Dramé. Nous sommes tous des exceptions. Fayard, 2014, 171 pages.

 

Lu par Kate.

 

 

Tag(s) : #RECIT, #ECOLE
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