L'exposition "Les Mues" réunit des oeuvres de l'artiste d'origine chinoise HUANG Yong Ping, né à Xiamen en 1954 et installé en France. La thématique de la mue est reprise d'œuvre en œuvre pour représenter l'allégorie des mutations en cours dans le monde, figurer l'usure de toutes choses par le Temps, la puissance de la Nature face à la petitesse des forces humaines pourtant destructrices. Dans presque toutes ces œuvres l'artiste figure des animaux.
"Mue de serpent" (2014). Conçue sur le modèle du "Serpent d'océan" de Saint-Brévin et longue de 120 mètres cette mue géante —qui traverse toute la galerie— a été spécialement réalisée pour l'exposition nantaise de 2014.
"Ombre blanche" (2009) la mue d'un éléphant accueille le visiteur. L'œuvre composée de peaux de buffle sur une armature de métal et fibre de verre. L'éléphant est le symbole de la métamorphose ; à ses pieds est étalée la vieille peau. Le Temps s'écoule, l'éléphant quitte sa peau, se débarrasse d'anciennes croyances.
"Commencer en tête de serpent et finir en queue de tigre" (1999). Au sol des panneaux de contre-plaqué évoquent la préparation d'un travail préparatoire : des chimères dessinées pour la Biennale d'Art de Venise. Un serpent (naturalisé) sort de dessous ces plaques tandis qu'au fond le tigre (de fourrure synthétique) repose sur la dernière plaque. Le titre de l'œuvre reprend une expression chinoise en inversant les termes : "commencer en tête de tigre et finir en queue de serpent", autrement dit commencer plein de bonne volonté et finir découragé. Epreuve que le Sage doit surmonter.
"Le Sage suivant l'exemple de l'araignée qui tisse sa toile" (1994). Huang Yong Ping a découvert l'art occidental en même temps qu'il a découvert Marcel Duchamp : sur la table figurent des traductions chinoises de Duchamp. Le titre fait référence à un ouvrage taoiste de Ge Hong qui considérait l'araignée comme un animal mystérieux et sage. L'araignée, sous la lampe, domine les textes posés sur la table.
"Palanquin" (1997). Le monde a changé ! La Chine a depuis longtemps rejeté la période coloniale...
"Ni Hao Ni Hao" (2011). Dans une caisse en bois, l'artiste a moulé un rhinocéros coupé en deux pour le transformer en récipient et son couvercle. Il contient du minerai de chrome et de charbon. Symbolise l'exploitation minière de l'Afrique, notamment par les Chinois. La Chine est devenue le premier partenaire commercial de l'Afrique (cf. "La Chinafrique" de S. Michel et M. Beuret). Les enfants des rues saluent les étrangers : Ni Hao !
"Banque de sable, sable de banque" (2000-2014). L'artiste a pris modèle sur l'architecture de la Hong Kong & Shanghai Bank, première banque britannique implantée à Shanghai en 1923. L'œuvre est massive et puissante comme l'idée qu'on se fait d'une grande banque. Mais l'édifice de sable s'effrite et évoque ainsi doublement la fragilité du système financier mondial.
"La carte du monde" (2000-2007).
Un planisphère a été pelé comme une orange. La carte est piquée de plus de 400 aiguilles en cuivre portant chacune une étiquette désignant -en anglais- toutes les catastrophes naturelles présagées d'ici 2046 par LI Yu, auteure chinoise du livre "Le Siècle à venir" publié en 1993. Un globe terrestre pelé de sa surface de terres et de mers est posé au pied de l'œuvre.
Les regards du public vont aux aiguilles et aux étiquettes en anglais qu'elles supportent.
Les étiquettes annoncent une multitude de catastrophes.
L'Arctique et l'Antarctique voient fondre glaciers et banquises.
Les régions méditerranéennes sont menacées de séismes, de sécheresses... Mais l'exposition évoque aussi guerres et conflits.
"Huit chevaux de Léonard de Vinci déchirant un porte-avions" (2004). Vinci avait conçu des armures pour protéger les chevaux sur le champ de bataille. Huang les a réalisées. Les chevaux de métal tentent d'écarteler un porte-avions dont la puissance semble bien médiocre face à ces chevaux plus grands que lui.
"Trois ailes" (2003). L'artiste évoque la collision entre un chasseur chinois et un avion-espion américain, un Lockheed EP3, en 2001. Les débris de l'appareil furent transportés aux Etats-Unis par un avion chinois. La chauve-souris est à la fois le logo à l'arrière de l'avion-espion et le symbole d'une vie nocturne et secrète.