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Une idée de base qui met le lecteur en appétit. Après des années de prison à Ceylan, un homme apprend qu'il hérite de son oncle. La succession de Martin Harrar consiste en un château familial « restauré par un disciple de Viollet-le-Duc » et qui abrite une institution psychiatrique. Le neveu doit prendre la place de l'oncle, à commencer par ses appartements, ne rien changer à la gestion de l'établissement, et ne pas se mêler des pensionnaires. Tous les cadres dînent ensemble et le neveu découvre soir après soir une galerie de personnages tous plus intrigants les uns que les autres. Le neveu, qui est aussi le narrateur, va de rencontre surprenante en rencontre inquiétante, dans les étages et les ailes du château, ainsi que dans l'immense parc qui le jouxte et que l'auteur dépeint joliment, avec ses statues et sa serre aux papillons. Par ces explorations répétées, dont il rentre parfois mal en point, le neveu indispose au risque de perdre son statut de résident privilégié.

Progressivement, les mystères s'épaississent. Si le neveu nous éclaire sur les raisons qui l'ont mené dans une cellule sri-lankaise, entre possession de drogue et profanation d'un temple, ce qu'il croit découvrir autour de lui, au château et dans ses alentours, amène vite à douter de son état mental. Le rêve et la réalité se mélangent comme des couleurs sur une palette impressionniste. Le narrateur, qui a vécu plus de vingt ans en cellule, se souvient d'un premier et unique amour d'adolescent, accumule les rencontres et les visions érotiques dans les couloirs du château, dans les ombrages du parc, dans l'auberge trop accueillante. Ainsi voit-il surgir devant lui la dame en bleu à « la poitrine ondoyante », Iolé la rêveuse mélancolique, la religieuse sortant du bain, ou encore l'entraîneuse douchée au champagne.

Le poursuit l'incident des bords de Seine lorsqu'il ne put sauver un homme de la noyade, et que suivit la manifestation dont il sortit borgne — c'était avant de devenir châtelain sous surveillance. En feuilletant les livres annotés de la bibliothèque de l'oncle, le neveu s'imagine découvrir peu à peu les éléments d'un complot extravagant. L'oncle Martin serait devenu riche après avoir assisté un dictateur sud-américain, qu'il hébergea en secret, en la personne du discret Albert, dans cet exil voué à un invraisemblable projet scientifique. À l'origine, « savant toqué d'aventures, explorateur, entomologiste, agitateur politique, Martin Harrar n'avait plus qu'une obsession » celle de sa fille qu'il avait presque rendue folle — et non pas hystérique comme le titre l'aurait pu suggérer — en la gardant enfermée dans ce château. Or, après la disparition de l'oncle, le neveu peut-il éviter que le programme d'immortalité, « le plan Maharal », ne dévie en élimination  ? Est-il encore possible de s'évader avec Iolé avant que le piège se referme sur eux ? À moins que ce soit le « ciel de Landsburg » — la recette servie sans cesse aux pensionnaires du château — que le neveu cherche à fuir ?

On peut s'imaginer que l'auteur s'est inspiré des dérives de telle ou telle institution psychiatrique installée dans un château isolé, thème que la littérature et le cinéma ont déjà visité. Plutôt que l'irruption du fantastique, c'est en fait l'intrusion d'une science-fiction assez lourde et confuse qui gâche à mon sens la fin de ce roman initialement très prometteur, riche de suspense, servi par une écriture sensuelle et poétique.

• Hubert Haddad. La culture de l'hystérie n'est pas une spécialité horticole. Fayard, 2004, 261 pages.

 

 

Tag(s) : #LITTERATURE FRANÇAISE
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