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Imaginez un congrès de traducteurs organisé à Port-au-Sphinx, un coin perdu de la côte argentine, et hébergé dans un complexe touristique inachevé tandis que le temps pourri prive les congressistes d'un ersatz de vacances agréables. Traducteur scientifique Miguel De Blast est le narrateur de ce court roman d'un congrès qui ne se déroule vraiment pas normalement. Déjà, le premier jour, De Blast dut remplacer Naum, l'une des stars de la profession, qui avait raté l'avion. On s'aperçoit vite que ces traducteurs ne sont pas des passeurs de littérature générale mais de domaines scientifiques et para-scientifiques.

 

De Blast retrouve Ana, dont il a partagé la vie, avant qu'elle ne le quitte pour son meilleur ami, Silvio Naum : s'en suit une ambiance un peu tendue. En fait, le cœur du sujet s'éloigne d'une simple intrigue amoureuse réchauffée car dès le premier jour il y a le suicide de Valner, un grand amateur d'ésotérisme et d'hermétisme, qui a plongé du cinquième étage dans une piscine presque vide. Le lendemain la traductrice italienne, Rina Agri, est retrouvée sans vie dans sa salle de bain. On s'aperçoit que ces deux-là, ainsi qu'un troisième larron, Zuñiga, s'étaient mystérieusement réunis en commission dès leur arrivée. Ledit Zuñiga tient même des propos dans une langue que personne ne comprend ou ne veut traduire : ni le patient du docteur Blanès réputé traduire toutes les langues instantanément, ni Naum quand il le poursuit jusqu'au phare hors d'usage. La plage où il semble que des phoques viennent mourir d'un mal mystérieux et le phare désaffecté ont tout pour servir de scène à d'autres atrocités. N'en disons pas plus... Le commissaire de police devra au bout du compte recueillir le témoignage du narrateur. Partiel et partial bien sûr.

 

Pablo de Santis, qui avait auparavant publié des livres pour la jeunesse, a su tirer parti des interrogations que cause ce métier de la traduction, en remontant jusqu'à la Renaissance, quand à Florence l'helléniste Marsile Ficin se vit confier par un prince Medicis la traduction impossible d'un livre pourtant rédigé avec l'alphabet grec. La réalité d'un colloque à la fin du XX° siècle se trouve ainsi confrontée à un pan d'antique mythologie ; le don d'une obole à Charon ouvrirait à la connaissance d'une langue universelle datant d'avant la Tour de Babel… 

 

Pablo de Santis. La traduction. Traduit par René Solis. Métailié, 2004, 157 pages.

 

 

 

Tag(s) : #LITTERATURE ESPAGNOLE, #AMERIQUE LATINE, #ARGENTINE
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