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Pour la plupart reporters, journalistes, globe-trotters, les auteurs partagent la même passion pour l’aventure. Mais, « pour quoi faire ? », qu’en est-il aujourd’hui? Tous s’interrogent au regard de leurs propres expériences. Épreuve physique aux confins du monde, suscitée dès leur enfance par la lecture des grands récits d’Ulysse, Don Quichotte ou Robinson Crusoe, l’aventure répond pour eux au besoin de « fuir les mangroves d’une existence trop terne » selon Ph.Tesson, de s’éprouver et d’aller à la rencontre d’autrui.

Protéiforme, l’aventure n’implique pas toujours d’atteindre le bout du monde ; elle peut surgir « au coin de la rue », ou se vivre par l’esprit tels les grands découvreurs, Einstein, Pasteur ou Champollion.Tous s’accordent cependant à reconnaître que les progrès techniques frappent désormais d’obsolescence leur conception de l’aventure. Mais l’esprit d’aventure, lui, demeure : c’est la soif de curiosité et de liberté, le besoin de découvrir et de comprendre.

À l’inverse des conquérants, militaires assoiffés d’argent et de puissance, la véritable aventure n’a d’autre enjeu qu’elle-même : elle ne sert à rien si ce n’est à rencontrer l’autre, notre frère. Comprendre sa façon de voir le monde abat nos préjugés, relativise nos valeurs, nous fait prendre du recul et échapper au conformisme ambiant. Tous ces auteurs dénoncent les excès du principe de précaution de nos sociétés aliénantes d’ordre et de contrôle, où l’individu surprotégé n’est plus acteur de sa vie et perd le sens de la responsabilité. À trop vouloir réduire les risques on bloque toute liberté d’entreprendre et toute innovation. Or, rappelle J.C. Rufin, toutes les sociétés ont toujours progressé grâce à la prise de risques. L’excès d’interdits précipite bien des jeunes dans les conduites à risque, l’abus d’alcool, de drogues, de vitesse, l’aventure virtuelle sur la toile où la mise en danger n’est pas moindre mais d’une autre nature.

Certes, « la véritable aventure est morte » conclut P. Franceschi : les « aventuriers du dimanche », les clients des trekkings bien encadrés et assurés ont pâle figure, tandis que l’on abreuve les touristes d’un exotisme de pacotille par seul intérêt mercantile. D’ailleurs, à quoi sert de s'aventurer en terres inconnues quand internet nous les offre à domicile? ou que les N. Hulot ou autre P. Etienne nous font vivre l’aventure par procuration?

Toutefois ces auteurs baroudeurs souhaitent sauver l’essentiel : l’esprit d’aventure, de curiosité, qu’il faut développer chez les jeunes et entretenir à tout âge, afin de respirer en marge de notre société normale et normée. On apprécie leur enthousiasme ; on regrette leur idéalisme car ils oublient souvent qu’en leur temps ils ont bénéficié d’opportunités et de moyens financiers…

 

L'Aventure, pour quoi faire ? Manifeste. - Éditions Points, 2013, 185 pages. Contributions de Jean-Claude Guillebaud, Sylvain Tesson, Gérard Chaliand, Jean-Christophe Rufin, Bruno Corty, Martin Hirsch, Laurent Joffrin, Olivier Frébourg, Olivier Archambeau, Tristan Savin, Patrice Franceschi.

 

Chroniqué par Kate.

 

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